La philosophie du langage, qu’est-ce que c’est ?

La philosophie du langage s'intéresse particulièrement à la signification, à la référence ou au sens en général, à l'usage du langage, à son apprentissage et à ses processus de création, ainsi qu'à sa compréhension, à la communication en général, à l'interprétation et à la traduction...

Bien que les problèmes philosophiques posés par le langage aient fait l'objet d'analyses dès Platon et Aristote ainsi que dans la philosophie médiévale et classique, on désigne plus particulièrement par philosophie du langage, en tant que champ spécifique, la tradition analytique qui s'est développée au XX  siècle, majoritairement dans la philosophie anglo-saxonne. Toutefois, la philosophie continentale n'a pas délaissé le champ du langage, même si elle a développé une autre approche, en particulier à partir du concept d'intentionnalité dans la phénoménologie husserlienne. Ontologie, métaphysique et philosophie du langage sont en effet liées, et ce depuis Parménide, dans la mesure où le discours semble se référer au réel. Ces deux traditions, analytique et continentale, se sont croisées, par exemple lors du débat entre Jacques Derrida et John Searle ou encore par la formulation d'objections, par Hubert Dreyfus, à l'approche computationnaliste prônée par Jerry Fodor. 

Les problèmes de philosophie du langage
La philosophie du langage se pose des questions telles que celles-ci :

- Quelle est l'origine du langage ?
- Quelle est la relation entre le langage et la réalité ?
- Quelle est la relation entre le langage et la pensée ?
- Quelle est la relation entre le langage et la connaissance ?
- Quelle est la relation entre le langage et d'autres modes d'expression ?
- Qu’est-ce que la communication ?
- La multiplicité des langues entraîne-t-elle la diversité des modes de penser ?
- Qu’est-ce qu'un signe, un dialogue, un texte, un discours, un énoncé ? 

Deux approches possibles
D'une façon générale, il y a deux approches possibles du problème de la signification, qui ne sont pas nécessairement incompatibles  : soit on part de la fonction expressive du langage, c'est-à-dire du rapport des mots aux idées qu'ils sont censés communiquer ; soit on part plutôt de la fonction représentative du langage, c'est-à-dire du rapport des mots aux choses ou encore au réel.

L'approche expressive est celle de Hobbes, qui affirme ainsi que : « l'usage général de la parole est de transformer notre discours mental en discours verbal et l'enchaînement de nos pensées en un enchaînement de mots » (Léviathan, I, 4 ). Cette théorie classique du langage repose sur une théorie des signes et des idées. Or, la théorie classique du signe distingue entre « signes naturels », où par exemple la fumée est le signe du feu, et « signes conventionnels », où le mot « chien » est le signe du chien. Comme l'indique la Logique de Port-Royal, le signe renvoie toujours à ce qui est représenté  ; mais la même chose peut être chose et signe. Quant aux idées, celles-ci peuvent, dans la philosophie classique, faire référence aux images mentales, aux pensées, mais aussi aux sensations. Les idées sont ainsi tout ce qui peuple notre esprit, indépendamment du monde réel. Or, si les mots peuvent renvoyer au monde, c'est parce que, selon ce paradigme de la représentation, ce sont les signes des idées qui sont elles-mêmes les images des choses. Cela pose toutefois un problème, soulevé par Berkeley : comment une image, particulière, peut-elle véhiculer un terme abstrait ou des termes syncatégorématiques  ?

Au XX  siècle, l'approche expressive a été reprise par Jerry Fodor et Paul Grice. Fodor, l'un des principaux défenseurs du computationnalisme, un courant majeur des années 1980 qui a popularisé l'analogie entre l'esprit et l'ordinateur, défend ainsi l'idée d'un « langage de la pensée », le « mentalais » (mentalese) qui fonctionnerait à l'aide d'opérateurs symboliques. Autrement dit, la pensée serait, selon lui, structurée comme un langage. Fodor reprend ainsi l'hypothèse de la lingua mentalis dont on peut trouver des prémisses au Moyen Âge chez Guillaume d'Ockham. Le computationnalisme de Fodor peut être caractérisé comme une synthèse entre le réalisme intentionnel et le physicalisme. Si le réalisme intentionnel affirme l'existence et la causalité des états mentaux et prend en compte les attitudes propositionnelles, c'est-à-dire la manière dont le sujet se comporte à l'égard d'une proposition : « je crois que x », « je pense que p », etc., le physicalisme affirme pour sa part que toute entité existante est une entité physique : cette théorie est fortement liée aux recherches en intelligence artificielle et en sciences cognitives.

Grice, quant à lui, affirme que les propriétés du langage dépendent des propriétés des pensées : la « signification du locuteur », le sens que celui-ci donne à sa phrase en tel ou tel contexte, prime sur la « signification conventionnelle ». C'est ce que le locuteur veut dire qui permet de trancher les phrases ambiguës. On parle de théorie de la pertinence. Tenant de la pragmatique, mouvement initié par John L. Austin, Grice insiste par exemple sur les implicatures conversationnelles, c'est-à-dire sur ce que le locuteur implique sans que cela soit explicite dans l'énoncé. Dans ce cas, le sens de la phrase ne dépend pas simplement de son contenu sémantique mais aussi du contexte conversationnel. On note qu'au Moyen Âge, la sémantique de Bacon faisait aussi dépendre « la signification non seulement du signe lui-même mais encore de celui qui en fait usage et de l'intention posée. »

Cette approche expressive a été fortement critiquée par Frege et Husserl , qui s'opposent au « psychologisme », c'est-à-dire à la croyance selon laquelle les lois de la logique ne seraient que des descriptions de régularités psychologiques ou encore des généralisations se fondant sur le raisonnement individuel de chacun. Ils défendent au contraire une approche objectiviste de la signification. Le sens des mots ne peut être réduit, selon eux, à des entités subjectives telles que des idées, ce qui conduirait à accepter qu'il soit soumis à la fantaisie de chacun.

Cette approche conduit vers une théorie de la vérité-correspondance  : un énoncé contient un contenu propositionnel, lequel est vrai s'il correspond avec un état de chose réel. Par exemple, la phrase « il pleut » et « it's raining » contient le même contenu propositionnel qui est sa signification. Or, cette phrase est vraie s'il pleut effectivement. Dans La Philosophie de l'atomisme logique (1918), Russell attire ainsi l'attention sur ce « truisme » selon lequel dans le monde il y a d'un côté des « faits » et de l'autre des « croyances » à propos de ces faits, susceptibles d'être vraies ou fausses. Les faits, ou l'état de choses, sont donc les conditions de vérité de la proposition qui est elle porteuse de vérité, c'est-à-dire susceptible d'être vraie ou fausse. On a donc d'un côté les truth-bearers (en) ou « porteurs de vérité », les propositions susceptibles d'être vraies ou fausses, et de l'autre les truth-makers ou « faiseurs de vérité », les entités en fonction desquels les porteurs de vérité sont vrais ou faux.

Texte sous licence CC BY-SA 3.0. Contributeurs, ici. Photo : Fotolia.com.

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