Histoire extraordinaire : Van Gogh aurait pu devenir pasteur

Vincent Willem van Gogh, né le 30 mars 1853, mort le 29 juillet 1890  peintre et dessinateur néerlandais dont l’œuvre pleine de naturalisme, inspirée par l'impressionnisme et le pointillisme, annonce le fauvisme et l'expressionnisme, aurait pu devenir pasteur…

1853–1869
La famille de Van Gogh mène une vie simple. L'ambiance laborieuse du foyer parental marque profondément le jeune Vincent, qui est un enfant sérieux, silencieux et pensif.

En 1860, Vincent Van Gogh entre à l'école de Zundert, dont l'effectif est de deux cents élèves. À partir de 1861, lui et sa sœur Anna suivent les enseignements d'une institutrice qui donne des cours à la maison jusqu'au 1  octobre 1864, date à laquelle il part pour l'internat de Jan Provily à Zevenbergen, une ville rattachée à la commune de Moerdijk à trente kilomètres de chez lui. Il y apprend le français, l'anglais et l'allemand. Il y réalise aussi ses premiers essais de dessin. Le 15 septembre 1866, il entre au collège Guillaume II, à Tilburg. Vincent vit difficilement cet éloignement. En mars 1868, il quitte précipitamment l'établissement et retourne chez ses parents à Zundert. 

1869-1878
Le 30 juillet 1869, à l'âge de 16 ans, Vincent quitte la maison familiale pour devenir apprenti chez Goupil & C  à La Haye, filiale fondée par son oncle Hein. Cette firme internationale qui vend des tableaux, des dessins et des reproductions, est alors dirigée par Hermanus Tersteeg, pour qui l'artiste avait un grand respect. En 1871, son père est muté à Helvoirt. Vincent y passe ses vacances en 1872, avant de rendre visite à son frère, Theo, à Bruxelles.

Après sa formation en apprentissage, il est engagé chez Goupil & C. En juin 1873, Adolphe Goupil l'envoie dans la succursale de Londres avec l'accord de son oncle Cent. Selon la future femme de Theo, Johanna Bonger dite « Jo », c'est la période la plus heureuse de sa vie. Il réussit et, à 20 ans, il gagne plus que son père. Il tombe amoureux d'Eugénie Loyer, la fille de sa logeuse à Brixton, mais lorsqu'il lui révèle ses sentiments, elle lui avoue qu'elle s'est déjà secrètement fiancée avec le locataire précédent. Van Gogh s'isole de plus en plus. À la même époque, il développe un fervent intérêt pour la religion. Son zèle religieux prend des proportions qui inquiètent sa famille. Le 12 novembre 1873, Theo est muté à la succursale de La Haye par son oncle Cent.

Son père et son oncle envoient Vincent à Paris à la mi-mai 1875, au siège principal de Goupil & C  au 9 rue Chaptal. Choqué de voir l'art traité comme un produit et une marchandise, il en parle à certains clients, ce qui provoque son licenciement le 1  avril 1876. Entre-temps, la famille Van Gogh a déménagé à Etten, village du Brabant-Septentrional.

Van Gogh se sent alors une vocation spirituelle et religieuse. Il retourne en Angleterre où, pendant quelque temps, il travaille bénévolement, d'abord comme professeur suppléant dans un petit internat donnant sur le port de Ramsgate, où il est engagé. Il dessine quelques croquis de la ville. À son frère Theo, il écrit : « À Londres, je me suis souvent arrêté pour dessiner sur les rives de la Tamise en revenant de Southampton Street le soir, et cela n'aboutissait à rien ; il aurait fallu que quelqu'un m'explique la perspective. » Comme l'école doit par la suite déménager à Isleworth dans le Middlesex, Van Gogh décide de s'y rendre. Mais le déménagement n'a finalement pas lieu. Il reste sur place, devient un fervent animateur méthodiste et veut « prêcher l'Évangile partout ». À la fin d'octobre 1876, il prononce son premier sermon à la Wesleyan Methodist Church à Richmond. En novembre, il est engagé comme assistant à la Congregational Church de Turnham Green.

À Noël 1876, il retourne chez ses parents. Sa famille l'incite alors à travailler dans une librairie de Dordrecht aux Pays-Bas pendant quelques mois. Toutefois, il n'y est pas heureux. Il passe la majeure partie de son temps dans l'arrière-boutique du magasin à dessiner ou à traduire des passages de la Bible en anglais, en français et en allemand. Ses lettres comportent de plus en plus de textes religieux. Son compagnon de chambre de l'époque, un jeune professeur appelé Görlitz, expliquera plus tard que Van Gogh se nourrit avec parcimonie : « Il ne mangeait pas de viande, juste un petit morceau le dimanche, et seulement après que notre propriétaire eut longuement insisté. Quatre pommes de terre avec un soupçon de sauce et une bouchée de légumes constituaient son dîner. »

Le soutenant dans son désir de devenir pasteur, sa famille l'envoie en mai 1877 à Amsterdam, où il séjourne chez son oncle Jan, qui est amiral. Vincent se prépare pour l'université et étudie la théologie avec son oncle Johannes Stricker, théologien respecté. Il échoue à ses examens. Il quitte alors le domicile de son oncle Jan, en juillet 1878, pour retourner à la maison familiale à Etten. Il suit des cours pendant trois mois à l'école protestante de Laeken, près de Bruxelles, mais il échoue à nouveau et abandonne ses études pour devenir prédicateur laïc. Au début de décembre 1878, il obtient une mission d'évangéliste en Belgique, auprès des mineurs de charbon du Borinage, dans la région de Mons. Il y devient un prédicateur solidaire des luttes contre le patronat mais il a déjà fait son apprentissage pictural en ayant visité tous les grands musées des villes importantes qu'il a traversées quand il travaillait chez Goupil & C.

1879-1880
Sa traversée du Borinage en Belgique commence à Pâturages (aujourd'hui dans la commune de Colfontaine) en 1878. Il y est accueilli par un évangéliste qui l'installe chez un cultivateur à Wasmes. Très vite, il juge cette maison trop luxueuse et, en août, il part pour Cuesmespour loger chez un autre évangéliste. Allant au bout de ses convictions, Van Gogh décide de vivre comme ceux auprès desquels il prêche, partageant leurs difficultés, jusqu'à dormir sur la paille dans une petite hutte.

Il consacre tout aux mineurs et à leur famille. Il va même jusqu'à descendre dans un puits de mine du Charbonnage de Marcasse, à 700 mètres de profondeur. Lors d'un coup de grisou, il sauve un mineur. Mais ses activités de pasteur ouvrier ne tardent pas à être désapprouvées, ce qui le choque. Accusé d'être un meneur, il est contraint d'abandonner la mission — suspendue par le comité d'évangélisation — qu'il s'était donnée. Il en garde l'image de la misère humaine qui apparaîtra dans une partie de son œuvre. Après ces évènements, il se rend à Bruxelles puis revient brièvement à Cuesmes, où il s'installe dans une maison. Mais, sous la pression de ses parents, il retourne à Etten. Il y reste désœuvré, jusqu'en mars 1880, ce qui préoccupe de plus en plus sa famille. Vincent et Theo se disputent au sujet de son avenir : ces tensions les privent de communication pendant près d'un an.

De plus, un grave conflit éclate entre Vincent et son père, ce dernier allant jusqu'à se renseigner pour faire admettre son fils à l'asile de Geel. Il s'enfuit de nouveau et se réfugie à Cuesmes, où il loge jusqu'en octobre 1880 chez un mineur. Entre-temps, Theo obtient un emploi stable chez Goupil & C  à Paris.

La maturité
Van Gogh atteint sa maturité au moment où il commence sa carrière d'artiste. Il s'intéresse de plus en plus à ses proches et aux scènes quotidiennes qu'il commence à représenter dans des croquis à la mine de plomb, au fusain ou au crayon. En octobre 1880, il part à Bruxelles et, le 15 novembre 1880, il s'inscrit à l'Académie royale des beaux-arts sur les conseils du peintre Willem Roelofs. Il a l'opportunité de travailler à l'atelier du peintre Anthon van Rappard, rue Traversière. Le 1  février 1881, Theo est nommé gérant de la succursale de Goupil & C  sur le boulevard Montmartre ; il décide alors de subvenir aux besoins de son frère. Vincent est presque âgé de 28 ans.

À la suite d'une violente dispute avec son père, il part pour La Haye, où il s'installe dans un modeste atelier. Il y reçoit des leçons de peinture de son cousin par alliance, Anton Mauve, pratique alors essentiellement l’aquarelle et étudie la perspective. 

En juin 1882, une hospitalisation liée à une maladie vénérienne lui permet de se réconcilier avec ses parents.

C'est au cours de l'été 1882 qu'il commence la peinture à l'huile. Cette période de sa vie lui permet de se consacrer à son art. Il partage ses réflexions sur des peintres qu'il admire comme Daumier ou Jean-François Millet dont il connaît bien les œuvres. Il exécute de nombreux tableaux et dessins selon différentes techniques. Il envoie ses œuvres à Theo et écrit à Anthon van Rappard. À partir du printemps 1883, il s'intéresse à des compositions plus élaborées, basées sur le dessin. Très peu de ces dessins ont survécu car, manquant de nervosité et de fraîcheur selon Theo, ils seront détruits par Vincent.

Les vingt mois qu'il passe à La Haye (entre 1882 et 1883) semblent décisifs pour l’artiste, qui réalise sa volonté de rompre avec les conventions morales de son milieu social, et son impossibilité à mener une existence normale. De nombreuses lectures, Honoré de Balzac, Victor Hugo, Émile Zola ou encore Charles Dickens, viennent enrichir sa vision du monde, et renforcent ses convictions sociales. 

A partir de là, autodidacte et passionné Van Gogh ne cesse d'enrichir sa culture picturale : il analyse le travail des peintres de l'époque, il visite les musées et les galeries d'art, il échange des idées avec ses amis peintres, il étudie les estampes japonaises, les gravures anglaises, etc. Sa peinture reflète ses recherches et l'étendue de ses connaissances artistiques. 

Toutefois, sa vie est parsemée de crises qui révèlent son instabilité mentale. L'une d'elles provoque son suicide, à l'âge de 37 ans. 

L'abondante correspondance de Van Gogh permet de mieux le comprendre. Elle est constituée de plus de huit-cents lettres écrites à sa famille et à ses amis, dont six-cent-cinquante-deux envoyées à son frère « Theo », avec qui il entretient une relation soutenue aussi bien sur le plan personnel que professionnel. 

L'œuvre de Van Gogh est composée de plus de deux mille toiles et dessins datant principalement des années 1880. Elle fait écho au milieu artistique européen de la fin du XIX  siècle. Il est influencé par ses amis peintres, notamment Anthon van Rappard, Émile Bernard et Paul Gauguin. Il échange aussi des points de vue avec son frère Theo, un marchand d'art connu. Il admire Jean-François Millet, Rembrandt, Frans Hals, Anton Mauve et Eugène Delacroix, tout en s'inspirant d'Hiroshige, Claude Monet, Adolphe Monticelli, Paul Cézanne, Edgar Degas et Paul Signac.

Peu connu dans les années 1890, Van Gogh n'a été remarqué que par un petit nombre d'auteurs et de peintres en France, aux Pays-Bas, en Belgique et au Danemark. Cependant, dans les années 1930, ses œuvres attirent cent vingt mille personnes à une exposition du Museum of Modern Art, à New York. 

Il est aujourd'hui considéré comme l'un des plus grands artistes de tous les temps.

Texte sous licence CC BY-SA 3.0. Contributeurs, ici. Photo : Autoportrait au chapeau de feutre, 1887, huile sur toile (41,7 × 32,7 cm), musée Van Gogh (Amsterdam). Propriété de la Fondation Vincent van Gogh.


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