Le populisme, que peut-on en dire ?

Le populisme désigne un type de discours et de courants politiques qui fait appel aux intérêts du « peuple » (d’où son nom) et prône à son recours, tout particulièrement en opposant ses intérêts avec ceux de « l'élite », qu'il prend pour cible de ses critiques, s’incarnant dans une figure charismatique et soutenu par un parti acquis à ce corpus idéologique...

Le terme est régulièrement employé dans un sens péjoratif, synonyme de « démagogie ». Dans cette acception, il suppose l'existence d'une démocratie représentative qu’il critique. C'est pourquoi il est apparu avec les démocraties modernes, après avoir connu selon certains historiens une première existence sous la République romaine.

Le substantif populisme est apparu, en français en 1912, sous la plume de Grégoire Alexinsky, dans sa Russie moderne. Il dérive du mot populiste auquel le Larousse mensuel illustré donnait le sens de membre d'un parti prônant des thèses de type socialiste (en Russie). Tous deux servent à désigner des mouvements politiques apparaissant au XIX siècle : en Russie depuis les années 1860 (« Les narodniki de l'Empire russe, en « allant au peuple », rêvaient de restaurer une communauté perdue ») et aux États-Unisdans les années 1890 (« le populisme rural et petit-bourgeois voulut réincarner le peuple fondateur de la démocratie américaine »). Léon Lemonnier réutilise en 1929 le terme pour désigner une nouvelle école littéraire dont il a écrit le manifeste. Cette doctrine littéraire, se présentant comme inspirée par le naturalisme, entendait ramener la littérature à l'humble niveau des vies « médiocres », débarrassée de toutes « ces doctrines sociales qui tendent à déformer les œuvres littéraires ».

Avant les années 1990, les termes « populisme » et « populiste » pouvaient désigner divers courants politiques se référant au peuple, parmi lesquels le parti de centre droit ÖVP autrichien ou le SHP turc au centre gauche qu'on a tendance depuis à ne plus vouloir qualifier ainsi, leur préférant le label de « populaire ». Si le terme populisme est aujourd'hui (années 2010) péjoratif en politique, les politiques dites populistes peuvent être très différentes : différences gauche/droite, et entre populismes d'Europe et d'Amérique du Sud. L'historien Philippe Roger déclare que le mot populisme « désigne un complexe d'idées, d'expériences et de pratiques qu'aucune typologie, si fouillée soit-elle, ne saurait épuiser. »

Depuis les années 1980, les mouvements et partis considérés comme populistes ont connu divers succès dans de nombreuses démocraties du premier monde, telles que le Canada, l'Italie, les Pays-Bas, et les pays scandinaves.

Étymologie
Le suffixe -isme, implique une prise de position favorable envers ce qu'induit le substantif latin populus, peuple, auquel il est adjoint sur le modèle de populiste.

Définitions et analyses
La définition du populisme a largement varié au cours des époques, mais le terme a souvent été employé pour définir un appel aux intérêts du « peuple », la démagogie, et comme un fourre-tout politique.

Daniele Albertazzi et Duncan McDonnell définissent le populisme comme une idéologie qui « oppose un peuple vertueux et homogène à un ensemble d'élites et autres groupes d'intérêts particuliers de la société, accusés de priver (ou tenter de priver) le peuple souverain de ses droits, de ses biens, de son identité, et de sa liberté d'expression ».

Le populisme désigne l'instrumentalisation de l'opinion du peuple par des partis et des hommes politiques qui s'en prétendent le porte-parole alors qu'ils appartiennent le plus souvent aux classes sociales supérieures. En démocratie, le peuple étant souverain son vote ou son opinion ne peut à proprement parler être qualifiée de populiste. C'est la manipulation du peuple dont se rend coupable l'homme politique qui relève du populisme.

Pour Vincent Coussedière, le mot appartient à la « novlangue » et est un « poncif ». Son utilisation pléthorique fonctionnerait « comme une idéologie paresseuse, par laquelle les élites politiques et intellectuelles cherchent à éviter le défi qui leur est posé: reconstruire une véritable offre politique. ». Le rapprochement fréquent de ce mot avec les termes « extrême droite » et « nationalisme » serait peu précis et non dénué d'ambiguïtés. Il réfute « l' extrémisation à tout va de mouvements qui n'ont rien d'extrême » et met en doute le caractère seulement « protestataire » que l'on se plait à appliquer à ces mouvements et que les médias opposent de manière factice à des « partis de gouvernement » alors même que ces mouvements peuvent se trouver au pouvoir dans certains pays.

D'après Catherine Colliot-Thélène, qualifier un mouvement politique de populiste « est un obstacle à une analyse sérieuse des transformations de la politique, en Europe ou aux États-Unis », « c’est bien sûr un terme qui disqualifie les opinions et les individus » et « le populisme est devenu, dans le langage ¬courant, le nom d’une dissidence qui peut se ¬ manifester dans des mouvements extérieurs à ces partis politiques classiques ou à l’intérieur de ceux-ci », or la méfiance envers les partis traditionnels et les élites a « ses raisons, et celles-ci sont fondées puisque, après tout, ce sont ces élites – partis de gauche et de droite confondus en Europe, Partis républicain et démocrate aux États-Unis – qui ont conduit, depuis plusieurs décennies, des politiques économiques ayant créé des inégalités sociales dans des proportions inédites depuis la fin de la seconde guerre mondiale. »

Parce qu'ils détiennent un pouvoir, le populisme attribue « aux élites » la responsabilité des maux de la société : ces groupes chercheraient la satisfaction de leurs intérêts propres et trahiraient les intérêts de la plus grande partie de la population. Les populistes proposent donc de retirer l'appareil d'État des mains de ces élites qui seraient égoïstes, voire criminelles, pour le « mettre au service du peuple ». Afin de remédier à cette situation, le dirigeant populiste propose des solutions qui appellent au bon sens populaire et à la simplicité. Ces solutions qu'il propose sont présentées comme applicables immédiatement et émanant d'une opinion publique qu'il présente comme monolithique, c'est-à-dire unanimement consentante. Les populistes critiquent généralement les milieux d'argent ou une minorité quelconque (ethnique, politique, administrative, etc.), accusés de s'être accaparé le pouvoir ; pour y faire face, ils leur opposent les aspirations du peuple, qu'ils estiment majoritairement différer.

Typologie des mouvements populistes européens
Mark Leonard, cofondateur et directeur du Conseil européen des relations étrangères (ECFR), think tank basé à Londres, présente une typologie des principaux mouvements populistes en Europe  :

Europe du Nord : s'opposent aux transferts entre pays

Parti de la liberté d'Autriche (Autriche), Parti populaire danois (Danemark) , Parti pour la liberté (Pays-Bas) , Parti socialiste (Pays-Bas), Vrais Finlandais (Finlande)

Europe de l'Est : refusent de subventionner les pays les plus riches

Droit et justice (Pologne), Jobbik (Hongrie), Liberté et Solidarité (Slovaquie), Parti démocratique civique (République tchèque), Parti des citoyens libres (République tchèque), Alternative für Deutschland (Allemagne)

Europe du Sud : s'opposent à l'austérité

Front national (France), Ligue du Nord (Italie), Parti communiste (Grèce), SYRIZA (Grèce), Podemos (Espagne) , Front de gauche (France) (d'après Le Monde, contesté par Marianne)

Europe de l'Ouest : souhaitent prendre leurs distances avec l'UE

Parti conservateur (Royaume-Uni) , Parti pour l'indépendance du Royaume-Uni (Royaume-Uni), Union démocratique du centre (Suisse)

Spécificités nationales

Russie

À la même époque, l'Empire russe connaissait un mouvement politique qui visait à instaurer un système d'économie socialiste agraire, le mouvement des narodniki (gens du peuple, en russe). Combattu par la police, le mouvement se fragmenta ensuite en divers groupuscules « populistes », dont Narodnaïa Volia, qui se réclame ouvertement du terrorisme et qui finit par assassiner l'empereur Alexandre II en mars 1881. Le populisme est le thème dominant de l'intelligentsia russe jusqu'à la révolution de 1917.

Suisse

En Suisse, l'UDC (Union démocratique du centre, Schweizerische Volkspartei : Parti suisse du peuple en allemand) est parfois considéré comme un parti populiste par ses adversaires et dans les médias. De fait, il en appelle bien souvent le peuple suisse à voter contre les recommandations de vote du gouvernement. S'appuyant sur la démocratie directe, composante fondamentale du système politique suisse, il lance régulièrement des initiatives populaires ou des référendums sur des thèmes particulièrement sensibles, par exemple, l'initiative populaire « Contre la construction de minarets » de 2009, qui a obtenu une majorité des voix, ou encore l'initiative populaire « Contre l'immigration de masse », acceptée par la majorité des votants en 2014. Christoph Blocher, un leader de ce parti se caractérise par des « discours grandiloquents, des idées simples, une xénophobie assumée, un marketing agressif…  ».

France

Dans la foulée des nationalismes, le thème de l'émancipation du peuple a inspiré de nombreux partis politiques dits populistes. Le boulangisme, ainsi que le poujadisme sont des mouvements populistes, tout comme l'est aujourd'hui le Front national « en ce sens qu'il est un mouvement protestataire contre les élites [...] à commencer par les énarques, les intellectuels, les politiciens éloignés de la réalité populaire. C'est un national-populisme [...] en ce sens qu'il est aussi un mouvement identitaire, nationaliste, protectionniste, xénophobe, islamophobe, antieuropéen ».

En 2005, cinq anciens cadres du Front national et du Mouvement national républicain fondent le Parti populiste.

Pour Pierre Birnbaum, auteur de l'ouvrage Genèse du populisme, celui-ci consiste à opposer les gros aux petits, la finance cosmopolite au bon peuple.

Le populisme a depuis cette époque souvent été identifié à l'extrême droite. En effet, comme le souligne l'historien Michel Winock, « [l]e populisme n'est pas spécifiquement d'extrême droite. Le mot désigne une confiance dans le peuple, que l'on rencontre dans les discours de Robespierre ou les écrits de Michelet. Mais le populisme a eu tendance à se localiser à l'extrême droite, avec l'ère des masses et de la démocratie parlementaire. L'extrême gauche, elle, était ouvriériste, tandis que l'extrême droite tendait au populisme, sans distinction de classe. ».

Dans son ouvrage sur le quinquennat Sarkozy, le chercheur Damon Mayaffre montre comment une rhétorique selon lui populiste a pu triompher au plus haut sommet de l'État en France comme en Italie au début du XXI siècle (référence au peuple, dénonciation des élites, discours sensationnalistes, culte du chef ou hyper-présidence).

Pour Raphaël Liogier, « le populisme actuel, contrairement à celui qui a porté Hitler au pouvoir dans les années 1930, ne défend pas la race mais la culture occidentale. On pouvait jadis décrier la culture judaïque, parce que c’était celle de la « race juive ». À l’inverse, parce qu’on ne peut plus être ouvertement raciste, si l’on veut dénigrer des Maghrébins, ce sera sous couvert de rejeter, non pas une race, mais une culture incompatible avec la « nôtre ». ».

Annie Collovald a fait remarquer que le mot populisme connaît un nouveau succès depuis les années 1980, comme synonyme de démagogie ou d'opportunisme politique, surtout lorsqu'il s'agit de mouvements d'opposition. Selon cette universitaire en sciences politiques, la catégorie renseignerait moins sur ceux qu'elle désigne que sur ceux qui l'emploient. Annie Collovald met en parallèle le succès du vocable avec la disparition progressive des classes populaires dans les appareils et dans les discours des partis politiques et interprète l'usage croissant du mot populisme ou populiste comme l'expression d'une méfiance grandissante à l'égard des classes populaires et d'un penchant nouveau pour la démocratie capacitaire voire censitaire.

Dans la continuité de cette analyse, la dénonciation des tendances populistes de certains courants d'opinion peut faire l'objet de plusieurs critiques. Le rejet du populisme peut être une solution de facilité pour discréditer certaines revendications et aspirations des couches populaires. Certains auteurs comme Laurent Bouvet (politologue) ou Christophe Guilluy cherchent à mettre en lumière l'« autisme des classes dirigeantes » face aux problèmes vécus par les citoyens et leur attentes qu'elles qualifient de populistes.

Le discours populiste n'est pas réservé aux seuls partis extrémistes ou radicaux mais concerne également les partis de gouvernement et modérés. Des hommes politiques appartenant à des partis de gouvernement tels que Mitterrand, Chirac, Sarkozy, Hollande ont tenu des propos populistes. Dès lors, plus qu'une pathologie de la démocratie , le populisme est une composante de celle-ci.

Amérique latine

Cependant le terme de populisme reste aujourd'hui surtout utilisé pour qualifier certains régimes en Amérique latine. Il renvoie principalement à trois expériences politiques, au gouvernement de Juan Perón en Argentine de 1946 à 1955, de Getúlio Vargas au Brésilde 1930 à 1945, et dans une moindre mesure au gouvernement Cárdenas au Mexique.

Allemagne

Le 13 mars 2016, le mouvement Alternative für Deutschland recueille entre 10% et 23% des voix lors des trois scrutins pour les parlements régionaux.

États-Unis

Le mot de « populisme » se réfère d'abord à un mouvement politique organisé dans la seconde moitié du XIX siècle aux États-Unis par des agriculteurs confrontés à des tarifs prohibitifs qu'un accès privilégié au domaine public avait permis aux compagnies de chemin de fer de leur imposer. D'autres mouvements, notamment ouvriers, se sont organisés contre des taux d'intérêt qu'ils jugeaient abusifs.

Enfin la victoire de Donald Trump aux Etats-Unis nous montre que les idées populistes qui traversent actuellement le monde occidental connaissent une indéniable renouveau.

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