Commerce équitable : un peu d’histoire

L'idée d'une plus juste répartition entre les différents acteurs de la chaîne commerciale naît progressivement au XX siècle, d'abord aux États-Unis avec le mouvement religieux protestant des mennonites, qui commercialise, en 1946, de l'artisanat fabriqué à Porto Rico, en Palestine et à Haïti. Fondé sur une relation plus directe entre les consommateurs du Nord et les producteurs du Sud, ce commerce solidaire soutenait le principe d'une rémunération plus équitable, tout en sensibilisant les acheteurs aux inégalités engendrées par le commerce traditionnel. Puis, c'est en Europe que les organisations religieuses et humanitaires se mobilisent. La première association de commerce solidaire, Kerbrade, voit le jour aux Pays-Bas à la fin des années 1950. C'est la fédération Artisans du monde qui ouvre, pour la première fois en France, un magasin en 1974, à l’initiative de l'Abbé Pierre. Depuis, le mouvement a fait tache d'huile et l'on trouve plus de produits équitables sur Internet et dans les supermarchés que dans les boutiques spécialisées...

Défendant la solidarité dans l'échange, le commerce équitable a été fortement marqué à ses débuts par l’humanisme des mouvements religieux chrétiens, et souvent protestante de l’éthique. D’essence caritative, mais influencé ultérieurement par une approche politique plus tiers-mondiste, il se transforme alors en acte d’opposition au système capitaliste. Il se revendique alors comme un mouvement alternatif au libéralisme. « Nous étions et sommes toujours anticapitalistes, opposés aux transnationales », rappelle le prêtre ouvrier Frans van der Hoff, cofondateur en 1988 de la marque Max Havelaar.

Pourtant, happé par la vague néolibérale, la démarche « solidaire » puis « alternative » a muté, au tournant des années 2000, jusqu’à devenir un « commerce équitable » largement dépolitisé. « L’heure n’est plus à la révolution mais à la réforme, souligne Diaz Pedregal. L’objectif du mouvement est de bonifier le système libéral en le modifiant de l’intérieur ». Certains y voient le risque que ce soit le système libéral qui modifie le commerce équitable en l'adaptant à ses objectifs économiques et financiers.

Les Boutiques du Monde
À la fin des années cinquante, Leslie Kirkley, directrice d'Oxfam, une organisation humanitaire créée en Grande-Bretagne pendant la Seconde Guerre, est en mission à Hong Kong pour un programme d'aide aux réfugiés originaires de Chine continentale. Elle aperçoit des réfugiées chinoises confectionnant des pelotes à épingle. Kirkley a alors l'idée d'en remplir une valise et de les vendre dans les boutiques d'OXFAM. À partir de cette date l'importation et la vente de produits artisanaux devient une pratique systématique de OXFAM, qui crée en 1964 la première organisation de commerce alternatif Alternative Trade Organizations (ATO).

La même année, la CNUCED lance l'idée Trade, not Aid! (le commerce, pas l'aide), popularisant ainsi le concept de commerce équitable.

Aux Pays-Bas, l'association caritative Steun Onderontwikkelde Streken (SOS) est créée en 1959, mais il faut attendre 1969 pour voir s'ouvrir la première « boutique du monde » aux Pays-Bas. Elle a un grand succès et de nombreuses boutiques similaires, qui vendent des produits artisanaux, s'ouvrent au Benelux. En Allemagne, le mouvement Aktion Dritte Welt Handel est fondé en 1970 dans la mouvance des mouvements de jeunesse chrétiens.

En France, le mouvement Artisans du Monde émergeant à partir de 1973 de la mouvance des Compagnons d'Emmaüs de l'Abbé Pierre crée de la même façon des boutiques où des bénévoles vendent des produits artisanaux en provenance du Tiers-monde. L'association se détache rapidement de la sphère Emmaüs et s'implique dans un militantisme tiers-mondiste. En 2008 un consultant spécialiste des ethnies du sud-est asiatique initia le Micro commerce équitable en France.

En Belgique, deux associations néerlandophones Oxfam-Wereldwinkels et francophone Oxfam-Magasins du Monde voient le jour autour de 1976. Elles sont issues d'Oxfam-Belgique très active dans les années 1960 dans le soutien aux mouvements de décolonisation. Les débuts commerciaux sont nés de cette volonté de soutenir les luttes de libération. Si les boutiques belges vendent du café de Tanzanie, ce n'est pas spécialement pour aider les petits producteurs, mais pour porter le projet socialiste du président Julius Nyerere. De même pour le café du Nicaragua, destiné à soutenir les sandinistes. Le commerce équitable s'inscrit comme une véritable démarche politique.

Texte sous licence CC BY-SA 3.0. Contributeurs, iciPhoto : ho visto nina volare - Flickr.

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