Rupture de période d’essai et délai de prévenance

Un employeur rompt la période d’essai en tenant compte du délai légal minimal de prévenance de 48 heures. Mais dans le contrat de travail était prévu un délai de prévenance d’une semaine qui a été ignoré. La Cour de cassation rappelle que l’employeur doit respecter le délai de prévenance le plus favorable...

Extrait de l’arrête de la Cour de cassation, civile, Chambre sociale du 15 avril 2016.
Pourvoi n° 15-12588. 

« LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : 

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 19 octobre 2009 par la société Socolit, en qualité de manager et coordinateur du département social ; que, par courrier remis en main propre le 28 octobre 2009, la société Socolit a rompu le contrat en cours de période d'essai, que M. X... a saisi la juridiction prud'homale pour voir juger la rupture illicite et condamner la société Socolit au paiement de diverses sommes ; 

Sur le premier moyen : 

Vu l'article 151 du Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne se référant à la Charte sociale européenne et à la Charte communautaire des droits sociaux fondamentaux des travailleurs, l'article L. 3121-45 du code du travail dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, interprété à la lumière de l'article 17, paragraphes 1 et 4, de la directive 1993-104 CE du Conseil du 23 novembre 1993, des articles 17, paragraphe 1, et 19 de la directive 2003-88 CE du Parlement européen et du Conseil du 4 novembre 2003 et de l'article 31 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ; 

Attendu, d'abord, que le droit à la santé et au repos est au nombre des exigences constitutionnelles ; 

Attendu, ensuite, qu'il résulte des articles susvisés des directives de l'Union européenne que les Etats membres ne peuvent déroger aux dispositions relatives à la durée du temps de travail que dans le respect des principes généraux de la protection de la sécurité et de la santé du travailleur ; 

Attendu, enfin, que toute convention de forfait en jours doit être prévue par un accord collectif dont les stipulations assurent la garantie du respect des durées maximales raisonnables de travail ainsi que des repos, journaliers et hebdomadaires ; 

Attendu que, pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'heures supplémentaires, l'arrêt retient que la convention individuelle de forfait, signée par les parties, s'inscrit dans le cadre de l'article 8.1.2.5 de la convention collective nationale des cabinets d'experts-comptables, qu'il n'est pas nécessaire, pour sa validité, qu'elle précise que la société devait organiser un entretien annuel individuel avec le salarié portant sur les points mentionnés à l'article L. 3121-26, celle-ci n'étant tenue à l'organisation d'un tel entretien qu'à l'expiration du délai d'une année ; 

Qu'en statuant ainsi, alors que les dispositions de l'article 8.1.2.5 de la convention collective nationale des cabinets d'experts-comptables et de commissaires aux comptes du 9 décembre 1974, qui se bornent à prévoir, en premier lieu, que la charge de travail confiée ne peut obliger le cadre à excéder une limite de durée quotidienne de travail effectif fixée à dix heures et une limite de durée hebdomadaire de travail effectif fixée à quarante-huit heures et que le dépassement doit être exceptionnel et justifié par le cadre, en deuxième lieu, laisse à l'employeur le soin de prendre les mesures pour assurer le respect des repos quotidiens et hebdomadaires, et, en troisième lieu, que le cadre disposant d'une grande liberté dans la conduite ou l'organisation des missions correspondant à sa fonction et dans la détermination du moment de son travail, le cadre et l'employeur examinent ensemble, afin d'y remédier, les situations dans lesquelles ces dispositions prises par l'employeur pour assurer le respect des repos journaliers et hebdomadaires n'ont pu être respectées, ne sont pas de nature à garantir que l'amplitude et la charge de travail restent raisonnables et assurent une bonne répartition, dans le temps, du travail de l'intéressé, et, donc, à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié, ce dont elle aurait dû déduire que la convention de forfait en jours était nulle, la cour d'appel a violé les textes susvisés ; 

Sur le deuxième moyen : 

Vu l'article 1134 du code civil ; 

Attendu que, pour débouter le salarié de sa demande en paiement d'un rappel de salaire et de congés payés afférents, l'arrêt retient que le délai de prévenance mentionné dans le courrier de rupture, d'une durée de 48 heures est conforme aux dispositions de l'article L. 1221-25 du code du travail ; 

Qu'en statuant ainsi, alors que les stipulations contractuelles prévoyaient un délai de prévenance d'une semaine pour une rupture du contrat de travail intervenant au cours des quatre premiers mois de la période d'essai, la cour d'appel, qui n'a pas appliqué au salarié ces dispositions plus favorables que la loi, a violé le texte susvisé ; 

Sur le troisième moyen : 

Vu l'article L. 3141-3 du code du travail dans sa rédaction issue de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, applicable au litige ; 

Attendu que pour condamner le salarié à rembourser à l'employeur une somme au titre de l'indemnité compensatrice de congés payés indûment versée et le débouter de sa demande en paiement sur ce chef, l'arrêt retient que l'intéressé ne pouvait prétendre à des journées de congés payés dans la mesure où il totalisait moins d'un mois de travail ; 

Qu'en statuant ainsi, alors que la durée minimum exigée était de dix jours de travail effectif chez le même employeur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; 

PAR CES MOTIFS : 

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute M. X... de ses demandes au titre des heures supplémentaires, de rappel de salaire relatif au délai de prévenance, de rappel d'indemnité compensatrice de congés payés et condamne celui-ci à payer à la société Socolit la somme de 134 euros correspondant à l'indemnité compensatrice de congés payés indûment versée, l'arrêt rendu le 28 mai 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ; 

Condamne la société Socolit aux dépens ; 

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société Socolit à payer à la SCP Delvolvé la somme de 3 000 euros ; 

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; 

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quinze avril deux mille seize. »

Photo : FikMik - Fotolia.com.

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