L'armagnac

L’armagnac est une eau-de-vie de vin produite dans les départements français du Gers, des Landes et du Lot-et-Garonne, avec comme appellations géographiquement plus restreintes le bas-armagnac, l'armagnac-ténarèze (ou ténarèze) et le haut-armagnac. La blanche-armagnac (ou armagnac blanc) partage la même aire de production, mais est une appellation différente. Toutes ces appellations doivent leur nom à l'ancienne province d'Armagnac, qui constitue une partie du vignoble du Sud-Ouest...

L'armagnac est produit dès le Moyen Âge, mais sa production massive commence au XVIIe siècle pour connaître son apogée au XIXe siècle. Eauze (en Bas-Armagnac) et Condom (en Ténarèze), toutes deux dans le Gers, en sont les centres historiques et économiques.

La fabrication des armagnacs se fait par distillation de vins blancs secs. Divers produits sont concernés par ces appellations, avec des alcools d'âge croissant, cette durée représentant le temps passé en barrique de chêne. Leurs titres alcoométriques sont supérieurs ou égaux à 40 % en volume. En 2010, 2 105 hectares de vignes ont servi à produire de l'armagnac, avec une production cette année-là de 18 900 hectolitres d'alcool pur (soit l'équivalent d'un peu plus de six millions de bouteilles de 70 cℓ).

Définitions des appellations
Cinq appellations partagent des caractéristiques proches. L'armagnac est une eau-de-vie de vin vieillie en fût de chêne, de couleur marron doré, produite sur une partie des départements du Gers, des Landes et du Lot-et-Garonne. Cette appellation générique est subdivisée en trois autres appellations géographiquement plus restreintes :

- le bas-armagnac est un armagnac produit sur la partie occidentale du Gers et la partie des Landes ;
- l'armagnac-ténarèze est un armagnac produit sur une autre partie de l'aire d'appellation, correspondant au Nord du Gers et à la partie du Lot-et-Garonne ;
- le haut-armagnac est un armagnac produit sur le reste de l'aire d'appellation, soit la partie orientale et méridionale.

Enfin, la blanche-armagnac est une appellation un peu à part, car il s'agit d'une eau-de-vie qui n'a pas bénéficié d'un vieillissement sous bois, d'où son allure translucide

Étymologie
Les appellations doivent leur nom à l'ancienne province d'Armagnac. Herreman, un soldat franc de l'époque de Clovis, fut nommé seigneur d'un fief gascon ; le nom francique herreman aurait été latinisé en Arminius, puis devenu « Armagnac » en gascon45. Les termes de Bas- et de Haut-Armagnac renvoient à l'altitude, le Bas-Armagnac étant plutôt en aval du second.

Quant au toponyme « Ténarèze », il s'agit selon Paul Labrouche d'une déformation du latin iter cesarum (le « chemin de César », César étant un titre des empereurs romains, ne désignant pas forcément Jules César), soit une ancienne route reliant la vallée de la Garonne à celle de l'Èbre, en passant par Sos, Labarrère, Allez-et-Cazeneuve, Saint-Christaud, Lupiac, Dému, Miélan, Arreau et peut être le chemin de la vallée d'Aure (menant aux ports d'Ourdissétou et du Plan).

Distillation
La distillation consiste à faire chauffer le vin et à en récupérer l'alcool : le procédé utilisé est basé sur la différence de point d'ébullition entre l'éthanol et l'eau, le premier se transformant en vapeur à 78,5 °C, le second à100 °C. La campagne de distillation doit avoir lieu avant le 30 avril de l’année suivant la récolte (ce qui évite au vin de trop s'altérer), mais un arrêté annuel peut réduire cette période. Par exemple, pour la récolte 2007, la période de distillation a été limitée au 29 février 2008.

Il y a deux modèles d'alambics utilisés pour produire l'armagnac. Le premier, le plus utilisé, est à distillation continue à plateaux dit « alambic armagnacais », produisant en un seul passage des eaux-de-vie entre 52 et 62 % d'alcool. Le second permet une double-distillation, d'où son nom d'alambic à repasse (dit aussi « à chauffes » ou « cognacaise » car utilisé pour faire le cognac), produisant des eaux-de-vie à environ 70 % d'alcool. 95 % de la distillation est effectuée par des alambics continus dits « armagnacais ».

Pour la distillation armagnacaise, le vin blanc est introduit à 10 °C dans la première cuve de l'alambic, par le bas. Cette cuve est traversée par un serpentin contenant les vapeurs d'alcool, qui réchauffent le vin au fur et à mesure qu'il monte, pour atteindre 80 °C. Le vin réchauffé entre alors dans une seconde cuve, par le haut et remplit le premier d'une série de plateaux superposés. Une fois plein, ce premier plateau déborde et remplit le deuxième plateau situé juste en dessous ; et ainsi de suite, jusqu'à remplir le fond de la cuve. En descendant ainsi, le vin se réchauffe jusqu'à atteindre la température de 110 °C, tandis que ses alcools et constituants volatils s'évaporent. En montant, les vapeurs obtenues traversent le vin contenu dans chaque plateau et captent ses arômes. En haut de la cuve, elles passent dans le serpentin (servant de condensateur) de la première cuve et se condensent pour donner à son extrémité l'eau-de-vie incolore (l'armagnac blanc) dont le degré alcoolique est généralement entre 52 et 62 % vol., suivant la vitesse de distillation et l'intensité du chauffage.

Élevage et vieillissement
Pour toutes les autres eaux-de-vie d'armagnac autres que la blanche, le vieillissement en barrique (appelé « pièces ») de chêne (sessile ou pédonculé uniquement) est essentiel et obligatoire pour que l'eau-de-vie devienne de l'armagnac. Il transforme l'aspect translucide de l'armagnac blanc (tel que sortie de l'alambic) en or rouge, couleur issue de la dissolution de composants du chêne de la barrique. Cette coloration peut être marginalement accélérée par l'adjonction de copeaux de chêne et de quelques colorants (infusion de copeau, caramel, etc.). En plus de cette couleur, le vieillissement en fût permet l'apparition de nouveaux composés aromatiques venant du bois de chêne qui, en se concentrant, augmentent la puissance aromatique de l'eau-de-vie : vanilline, lactones, furanes et tanins. On dit que le cœur de l'un fait l'âme de l'autre (les douelles des fûts étant théoriquement faites dans du cœur de chêne).

Enfin, le vieillissement favorise la diminution du degré d'alcool de l'armagnac par évaporation : c'est ce que l'on appelle la « part des anges » qu'il faut compenser par l'ouillage, l'alcool s'évaporant plus vite que l'eau à travers le bois, à raison d'un à 1,5 degré par an. L'hygrométrie du lieu de stockage est importante : dans un chai humide (à environ 80 %) c'est l'alcool qui s'évapore principalement, tandis que dans un chai sec c'est surtout l'eau qui part (laissant une eau-de-vie qui a « le feu »). Cette baisse du degré d'alcool est nécessaire car la vente de l'armagnac n'est autorisée que lorsque l'eau-de-vie titre un peu plus de 40 % vol. Celle-ci peut aussi s'obtenir par coupage (ajout) de « petites eaux », constituées par un mélange d'eau distillée et d'un peu d'armagnac.

Arrivée naturellement (« brut de fût » ou « non-réduit ») ou par coupage (« coupé » ou « réduit ») entre 40 et 48 % vol. d'alcool, l'eau-de-vie est alors conservée en cuve métallique pour permettre une bonne conservation ; on peut aussi le conserver dans un vieux fût ayant perdu tous ses tanins, ou en dame-jeanne (bonbonne en verre). À partir de ce moment-là, l'armagnac ne vieillit plus, mais il va très lentement s'oxyder et continuer à perdre de l'alcool. Il peut être mis en bouteille l’année de la vente (l'année de mise en bouteille est parfois indiquée). L'armagnac est le plus souvent un assemblage non seulement de différents cépages, mais aussi de différentes années. L'imitation de ce qui se pratique pour le vin fait qu'il existe quelques armagnacs mono-cépages ou d'une seule année (le produit est dit millésimé) : l'étiquette insiste sur cet argument de vente en indiquant le cépage ou l'année. Comme pour n'importe quelle eau-de-vie, la bouteille d'armagnac doit être entreposée verticalement afin que l'alcool n'altère pas le bouchon en liège et surtout à l'abri de la lumière qui altère les caractères organoleptiques. Une fois ouverte, une bouteille d'armagnac peut se conserver plusieurs années dans une armoire fermée, mais on peut aussi la transvaser dans une bouteille plus petite pour limiter l'oxydation.

Dégustation
Les vieux armagnacs se boivent le plus souvent comme digestifs à la fin du repas, purs. Ils sont servis à température ambiante, de préférence dans de petits verres (de 6 à 9 cℓ) au col un peu refermé (pour concentrer les odeurs) ; traditionnellement, on fait chauffer le verre dans le creux de la main, parfois en couvrant le verre de l'autre main pour concentrer encore plus le « nez » de l'eau-de-vie. Les différences de terroirs (terrains, assemblage des cépages, façon de distiller et surtout d'élever l'eau-de-vie) entre les trois zones de production de l'armagnac donnent des produits avec des réputations différentes : les bas-armagnacs plutôt fruités (lepruneau), les ténarèzes plus corsés (plutôt les épices et un peu de violette) et les haut-armagnacs plus rustiques

Les armagnacs blancs peuvent se boire purs comme tous les alcools blancs, ils peuvent être refroidis par un passage au réfrigérateur ou en les servant avec des glaçons (on the rocks) ou ils peuvent être allongés (long drink) d'eau plate ou gazeuse, de soda ou de jus de fruits pour en faire des cocktails.

L'armagnac entre dans la composition d'autres boissons : le floc de Gascogne est une mistelle (vin de liqueur) fabriquée en mélangeant quatre cinquièmes de moût de raisin avec un cinquième d'armagnac (jeune), en blanc comme en rosé (en fait franchement rouge).

Plusieurs liqueurs sont proposées à base d'armagnac, avec des extraits d'orange (marques « pousse-rapière », « liqueur des mousquetaires », « grande Josiane » ou « Mousquet », utilisées en cocktail avec du vin mousseux), de vanille (« Esprit d'Armagnac ») ou de la crème (« cassagnac », inspiré des Irish Cream).

Le brûlot d'Armagnac est un flambage d'armagnac blanc dans du sucre. Le « trou gascon » est l'équivalent du trou normand, mais avec de l'armagnac (plus une liqueur ou de la glace au pruneau).

Enfin, les autres usages culinaires des armagnacs sont notamment de servir à parfumer des pâtisseries (le pastis gascon, appelé aussi tourtière ou croustade), en conserverie (les pruneaux à l'armagnac), pour faire flamber un plat (par exemple un salmis de palombe), pour relever une sauce ou pour faire une marinade.

Texte sous licence CC BY-SA 3.0. Contributeurs, ici. Photo : EspritVin.

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