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SNCF : des avantages coûteux pour la collectivité Les personnels de la SNCF bénéficient, pour eux-mêmes et leur famille, de la gratuité de circulation sur l’ensemble du réseau ferroviaire. Cette gratuité est sans limite pour les agents actifs et retraités, réserve faite de restrictions d’usage durant quelques périodes de forte affluence. Elle est contingentée pour leurs ayants droit, qui, au-delà d’un quota annuel de voyages gratuits, disposent de droits à une réduction permanente de 90 % sur le prix des billets… Télécharger le rapport complet de la Cour des comptes sur la SNCF La Cour des comptes, dans son dernier rapport sur la SNCF, renchérit : « Sur les lignes à réservation obligatoire (lignes à grande vitesse et quelques liaisons Intercités), les bénéficiaires acquittent une participation aux frais de réservation. Cette obligation, déjà modique, est allégée pour les agents actifs qui jouissent d’un quota annuel de huit dispenses de paiement des réservations. À ces facilités dites « principales » s’ajoutent diverses facilités dites « accessoires », essentiellement des possibilités de transport de marchandises ou de mobilier liées aux circonstances de la vie personnelle et professionnelle de l’agent. En dépit d’un effort de clarification depuis 2009, les directives internes de la SNCF régissant le régime des facilités de circulation accordées à ses personnels et leurs ayants droit demeurent un ensemble touffu, marqué par l’accumulation de concessions successives dans le cadre du dialogue social, et, de ce fait, recélant nombre d’archaïsmes et d’incohérences. Mais la sensibilité sociale du sujet freine toute tentative de simplification et a dissuadé jusqu’à présent toute réflexion sur la modernisation d’ensemble d’un dispositif vieux de 75 ans. La dérive du champ des bénéficiaires À partir de cette base réglementaire manifestement destinée à harmoniser les pratiques en place dans les différentes sociétés concessionnaires de chemin de fer nationalisées et réunies au sein de la SNCF, l’adaptation ultérieure du régime s’est effectuée par une succession de textes internes à la SNCF, plus d’une cinquantaine depuis 1952, avalisés par le ministère de tutelle. En pratique, c’est par de simples lettres signées par le directeur chargé des transports ferroviaires à ce ministère que sont homologuées les modifications du dispositif. Ces révisions successives ont très rapidement dépassé la définition de 1938 et ont substantiellement élargi le champ des bénéficiaires. Certains de ces élargissements peuvent être considérés comme des adaptations normales aux évolutions de la société depuis 1938, comme le travail féminin, le développement de nouvelles formes de vie de couple ou le développement des familles recomposées. Ils ont contribué à augmenter le nombre de bénéficiaires en faisant ainsi admettre comme ayants droit le concubin ou le partenaire de PACS, ainsi que les beaux enfants mineurs de l’agent actif ou retraité (enfants du conjoint, du concubin ou du partenaire de PACS). D’autres extensions ont clairement outrepassé les limites fixées par le décret-loi de 1938. La principale concerne l’octroi, en 1956, de facilités aux ascendants (parents et grands-parents) de l’agent et de son conjoint puis, en 1974, aux ascendants (parents et grands-parents et même, curieusement, arrière grands-parents) du retraité et de son conjoint. Ces extensions ont elles-mêmes été amplifiées par les élargissements précités de la notion de conjoint. Les intéressés se voient reconnaître, sur demande de leur part, le bénéfice de quatre droits à voyages gratuits par an. L’inclusion des ascendants dans les ayants droit est une spécificité de la SNCF : ainsi, dans le cadre des accords de réciprocité avec les compagnies étrangères, les ascendants et les ayants droit des agents ne bénéficient pas de facilités de circulation. De même, la limitation aux « enfants mineurs » posée par le texte de 1938 a été battue en brèche, d’abord par le maintien des facilités aux enfants de 18 à 21 ans lorsque la majorité civile a été abaissée à 18 ans, puis par la prise en compte des enfants majeurs dans des situations particulières (enfants à charge, étudiants jusqu’à 28 ans, handicapés) ou dans certaines circonstances (gratuité des trajets pour parcours scolaire, des trajets pour rejoindre un parent en cas de divorce ou de séparation, des trajets liés à certaines activités culturelles ou sportives). Par ailleurs, les quelque 3 360 médecins exerçant à temps complet ou partiel au profit de la SNCF bénéficient, comme les cheminots, de facilités de circulation pour eux-mêmes et leurs ayants droit, avantage présenté par la SNCF comme un moyen de s’attacher la collaboration durable de ces praticiens. Un coût pour l’entreprise très supérieur aux évaluations de la SNCF La SNCF ne suit régulièrement aucun de ces coûts. Les présentations qu’elle en fait se caractérisent par une sous-estimation manifeste. Elle évaluait le coût direct en 2011 à 9,7 M€ et considérait qu’il était largement couvert par les contributions versées par les bénéficiaires. Toutefois, cette somme n’incluait que les charges, essentiellement salariales, de gestion des facilités, et ne prenait pas en compte les cotisations sociales acquittées par la SNCF sur l’avantage en nature que constituent les facilités de circulation, soit entre 13 et 15 M€ selon les années. Le coût direct du dispositif se situe ainsi à près de 25 M€ par an, presque le triple du chiffre fourni par la SNCF, et n’est donc pas totalement couvert par les contributions des bénéficiaires. Surtout, une bonne estimation de l’impact de ce dispositif sur les comptes de l’entreprise ne doit pas se limiter au seul coût direct : elle doit inclure le manque à gagner commercial qu’il entraîne. La SNCF a une conception minimaliste de ce manque à gagner, puisqu’elle l’estime limité à l’effet d’éviction sur les trains à réservation obligatoire complets, c'est-à-dire le prix total des places qui n’ont pu être vendues à des clients parce que réservées par des personnels de la SNCF ou leurs ayants droit. Par cette méthode, elle évaluait le manque à gagner à 21 M€ en 2010. La Cour considère pour sa part que le manque à gagner correspond à la différence entre les contributions actuellement payées par les bénéficiaires des facilités et ce qu’ils paieraient s’ils étaient assujettis aux tarifs commerciaux applicables aux voyageurs « normaux », en tenant compte de la diminution corrélative du nombre de leurs voyages en train. L’estimation de ce manque à gagner est d’autant plus difficile que la SNCF ne s’est pas dotée des moyens de l’évaluer, faute d’adaptation en ce sens de son système d’information pour suivre les consommations individuelles de facilités de circulation. Selon la méthode et les hypothèses retenues, les évaluations de l’impact total des facilités de circulation du personnel et des ayants droit sur les comptes de la SNCF vont d’une cinquantaine de millions d’euros à des sommes dépassant significativement 100 M€. Si ces évaluations doivent être prises avec précaution, il est avéré que le coût global pour la SNCF est très supérieur à l’évaluation qu’elle en donne. » La SNCF étant un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) on peut penser que les économies liées à la réduction de ces coûts pourraient servir à diminuer le prix des billets ou encore à désendetter le système ferroviaire dont la dette est actuellement de 40 milliards €... Télécharger le rapport complet de la Cour des comptes sur la SNCF Pour aider votre entreprise à gérer au mieux ses finances, des experts-comptables : 60270 - PATRICK GAUTIER EXPERTISE http://www.expert-comptable-chantilly-60.com Voir toutes les newsletters : www.haoui.com Pour les professionnels : HaOui.fr |