Satuts de société : attention à leur rédaction

Une SCI de trois associés avait pour objet social « l’acquisition, la gestion et l’administration de tous biens mobiliers ou immobiliers, ainsi que l’emprunt de fonds et le cautionnement hypothécaire de toutes opérations, se rattachant directement ou indirectement à cet objet et nécessaires à la réalisation de ces objectifs ».  La gérante décide de vendre un immeuble sans l’accord des associés. Un des associés demande l’annulation de cette vente au motif qu’elle est contraire à l’objet social de la SCI. En appel, la cour rejette la demande de l’associé. Mais la cour de cassation censure cet arrêt au motif qu’il dénaturait les termes clairs et précis de l’objet social de la SCI… 

Cour de cassation, Chambre civile, le 23 octobre 2013, pourvoi n°12-22.720

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le moyen unique :

Vu l'article 1134 du code civil ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 16 mars 2012), que la société civile immobilière Azur RNC (la SCI) a été constituée le 30 mai 1999 entre Mme Naziha X..., épouse Y..., Mme Samira X... et Mme Taous X... avec pour objet social l'acquisition de tous biens mobiliers ou immobiliers, la gestion et l'administration des biens dont la société pourrait devenir propriétaire ; qu'après modification des statuts sans son accord le 6 octobre 2003 et la vente par la gérante seule, à M. Z..., par acte du 29 novembre 2004 reçu par M. A... notaire, d'un appartement acheté aux enchères publiques, Mme Taous X..., estimant cette vente contraire à l'objet social de la SCI, a assigné les associés et la SCI en annulation de la modification statutaire et M. Z... avec M. A..., notaire, en annulation de la vente de l'appartement ;

Attendu que pour débouter Mme Taous X... de ses demandes, l'arrêt retient qu'il résulte de l'objet de la SCI, visant non seulement les actes d'acquisition, mais aussi, la réalisation de toutes opérations se rattachant directement ou indirectement à cet objet, dont les associés n'ont pas entendu donner une définition restrictive, que l'acquisition d'un immeuble par la SCI lui en confère la propriété avec tous ses attributs, c'est-à-dire celui de l'administrer, mais également celui de l'aliéner, que l'objet social ne saurait être contrarié ou dépassé par la vente d'un élément de son patrimoine et que la vente attaquée se situe donc bien dans l'objet social de la SCI ;

Qu'en statuant ainsi, alors que l'article 2 des statuts précisait que la SCI avait pour objet "l'acquisition, la gestion et l'administration de tous biens mobiliers ou immobiliers, ainsi que l'emprunt de fonds et le cautionnement hypothécaire de toutes opérations, se rattachant directement ou indirectement à cet objet et nécessaires à la réalisation de ces objectifs", la cour d'appel, qui a dénaturé les termes clairs et précis de cet article, a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 mars 2012, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;

Condamne Mme Naziha X..., épouse Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne Mme Naziha X..., épouse Y..., à payer la somme de 3 000 euros à Mme Taous X... ; rejette les autres demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille treize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt

Moyen produit par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils, pour Mme Taous X...

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté les demandes de Mme Taous X... et en particulier sa demande d'annulation de la vente de l'appartement de la rue Puget à Nice ;

AUX MOTIFS QUE la demande de nullité de Mme X... est fondée sur la nullité alléguée de la modification des dispositions statutaires de la société Azur RNC quant à la définition de l'objet social ; que quelle que soit la validité de cette modification, qui n'a été prise le 6 octobre 2003 que pour préciser sans ambiguïté l'objet social et ce, en prévention des difficultés pressenties relativement à la vente attaquée (¿), la cour relève que les statuts initiaux étaient ainsi rédigés quant à l'objet de la société : «l'acquisition de tous biens mobiliers ou immobiliers (¿), Et plus généralement, la réalisation de toutes opérations se rattachant directement ou indirectement à ce objet et notamment le cautionnement hypothécaire non rémunéré de la société civile immobilière pourvu que ces opérations n'affectent pas le caractère civil de la société » ; qu'il en résulte que par leurs termes visant ainsi non seulement les actes d'acquisition, mais aussi, in fine, de façon générale, la réalisation de toutes opérations se rattachant directement ou indirectement à cet objet, les associés n'ont pas entendu donner une définition restrictive de l'objet social ; que dès lors que l'acquisition d'un immeuble par une SCI lui en confère la propriété avec tous ses attributs, c'est-à-dire celui de l'administrer, mais également celui de l'aliéner, l'objet social ne saurait être contrarié ou dépassé par la vente d'un élément de son patrimoine ; que la vente attaquée se situe donc bien dans l'objet social de la société Azur RNC et les demandes de nullité ainsi que les demandes subsidiaires de Mme X... seront en conséquence rejetées ;

ALORS QUE l'article 2 des statuts de la société Azur RNC limite expressément l'objet de la société à « l'acquisition de tous biens mobiliers ou immobiliers, la gestion et l'administration desdits biens dont la société pourrait devenir propriétaire, sous quelque forme que ce soit, l'emprunt de tous les fonds nécessaires à la réalisation de ces objectifs (¿) », que la vente d'immeubles n'est pas prévue dans les statuts et nécessite ainsi l'accord des associés aux conditions requises pour une modification statutaire ; que les statuts se bornent à ajouter : « plus généralement, la réalisation de toutes opérations, se rattachant directement ou indirectement à cet objet et notamment le cautionnement hypothécaire non rémunéré de la société civile immobilière, pourvu que ces opérations n'affectent pas le caractère civil de la société » ; qu'en affirmant cependant que par les termes ainsi employés les associés n'avaient pas entendu donner une définition restrictive de l'objet social et que dès lors l'acquisition d'un immeuble par une SCI lui en conférait la propriété avec tous ses attributs, c'est-à-dire celui de l'administrer, mais également celui de l'aliéner, de telle sorte que l'objet social ne pouvait être contrarié ou dépassé par la vente d'un élément de son patrimoine, la cour d'appel à dénaturé l'article 2 des statuts de la société Azur RNC, violant ainsi l'article 1134 du code civil.

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