Heures supplémentaires : les libeller sous forme de primes, c’est risquer de payer double

Une société avait licencié pour faute grave un de ses salariés. En appel, le licenciement avait été requalifié en licenciement sans cause réelle et sérieuse. L’employeur avait été, entre autres, condamné à régler à son ancien salarié des heures supplémentaires alors qu’il prétendait les avoir déjà réglées sous forme de primes exceptionnelles. La cour de cassation a suivi la cour d’appel et rejeté le pourvoi de l’employeur…

Extraits de l’arrêt du 3 avril 2013, n° 12-10092 de la chambre sociale de la Cour de Cassation

"LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 3 novembre 2011) que, M. X..., engagé le 11 avril 2002 en qualité de chef de partie par la société La closerie des Lilas, a été licencié pour faute grave, le 15 octobre 2007 ;

Sur le premier moyen : 

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de le condamner à payer au salarié diverses sommes au titre de la rupture, alors, selon le moyen, que le juge a l'obligation d'examiner l'ensemble des griefs énoncés dans la lettre de licenciement ; qu'en s'abstenant d'examiner le grief énoncé dans la lettre de licenciement de M. X...et relatif à l'abandon, par le salarié, de son poste de travail en plein service le 6 septembre 2007, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;

Mais attendu que contrairement aux énonciations du moyen, après avoir écarté la seule pièce produite par l'employeur pour justifier de l'incident du 6 septembre 2007 à la suite duquel le salarié aurait quitté son poste de travail prématurément, la cour d'appel a estimé que ce grief n'était pas établi ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le deuxième moyen : 

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser au salarié des sommes au titre de rappel de salaires sur la période de juillet 2003 à octobre 2007et de congés payés y afférents, alors selon le moyen, que la société avait fait valoir, dans ses conclusions d'appel, que « M. Y...avait occupé des postes de Chef de Partie Tournant et de Chef de cuisine, ce qui ne correspondait pas du tout aux mêmes compétences que M. X...» (page 9) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef péremptoire des conclusions qui lui étaient soumises, dont il résultait que M. Y...bénéficiait d'une expérience professionnelle supérieure à celle de M. X...justifiant la différence de rémunération entre ces deux salariés, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu que sous couvert du grief non-fondé de défaut de réponse à conclusions, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion l'appréciation souveraine de la cour d'appel qui, au vu des éléments de fait et de preuve soumis à son examen, a estimé que la preuve n'était pas rapportée des justifications avancées par l'employeur pour fonder la différence de rémunération entre M. X...et M. Y...; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen : 

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser au salarié des sommes au titre de rappel d'heures supplémentaires et des congés payés y afférents, alors, selon le moyen, que lorsqu'il n'est pas contesté par les parties en litige qu'une prime a pour objet exclusif la rémunération, à un taux majoré, de l'intégralité des heures supplémentaires effectuées, le salarié peut seulement percevoir des dommages-et-intérêts pour perte de ses repos compensateurs mais ne peut prétendre à un nouveau paiement de ces heures ; qu'en condamnant la société à verser au salarié un rappel de salaires au titre des heures supplémentaires effectuées entre 2002 et 2007, quand elle avait constaté l'exacte correspondance, reconnue par les parties en litige, entre le salaire dû à M. X...au titre de ses heures supplémentaires et le montant des primes exceptionnelles qui lui avaient été versées entre 2002 et 2007, la cour d'appel a violé les articles 1234 du code civil et L. 3121-22 du code du travail ;

Mais attendu que la cour d'appel a décidé à bon droit que le versement de primes exceptionnelles ne peut tenir lieu de règlement des heures supplémentaires, peu important que le montant de ces primes paraissait correspondre à celui des heures supplémentaires effectuées ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le quatrième moyen : 

Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt de le condamner à verser au salarié une somme à titre d'indemnité pour travail dissimulé, alors, selon le moyen :

1°/ que la société avait fait valoir, dans ses conclusions d'appel, que « tous les organismes sociaux ont été régulièrement réglés et que M. X...a reçu paiement de l'intégralité des sommes qui lui étaient dues » (page 17) ; qu'en s'abstenant de répondre à ce chef péremptoire des conclusions qui lui étaient soumises, dont il résultait que la rémunération, sous forme de primes exceptionnelles, de la totalité des heures supplémentaires effectuées par M. X...ne reposait sur aucune intention de l'employeur de se soustraire aux formalités énumérées à l'article L. 8221-5 du code du travail, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile.

2°/ qu'en ne précisant pas en quoi l'usage du terme « primes exceptionnelles » sur les bulletins de salaire aux lieu et place du terme « heures supplémentaires » aurait procédé d'une volonté de dissimulation de la part de l'employeur, la cour d'appel a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;

Mais attendu qu'ayant constaté que l'employeur avait sciemment omis de mentionner les heures supplémentaires sur les bulletins de paie du salarié, la cour d'appel a caractérisé l'élément intentionnel ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société La Closerie des Lilas aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société La Closerie des Lilas et la condamne à payer à M. X...la somme de 2 500 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du trois avril deux mille treize."

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