Nino
Dans trois jours, Nino devra affronter une grande épreuve. D’ici là, les médecins lui ont confié deux missions. Deux impératifs qui vont mener le jeune homme à travers Paris, le pousser à refaire corps avec les autres et avec lui-même.

Entretient avec la réalisatrice, Pauline Loquès :
Comment sont nés Nino et la constellation de personnages qui l’entoure ?
Au moment où j’ai rencontré Sandra, ma famille était confrontée à la maladie d’un de nos proches atteint d’un cancer très agressif et qui en est mort à l’âge de trente-sept ans. Il s’appelait Romain et le film lui est dédié. J’étais terrassée par une grande tristesse et un sentiment d’injustice profond. Je me suis mise à écrire, pour retrouver l’espoir.
Le personnage de Nino est arrivé par hasard dans mon esprit, un peu comme une rencontre au coin d’une rue. Comme si j’avais croisé ce jeune homme aux vêtements larges, au phrasé hésitant, sur qui la maladie s’abat. Il m’a montré le chemin de ce qu’il allait vivre. J’ai écrit au fil de l’eau, en suivant son errance de manière très instinctive.
Votre histoire est en prise directe avec une génération sensibilisée au papillomavirus et à son dépistage. Pourquoi avoir choisi le cancer de la gorge et comment vous êtes-vous documentée ?
Je voulais choisir un cancer qui touche les jeunes et dont on peut guérir, car il m’importait de sauver mon personnage. J’étais fâchée contre la maladie, il me fallait réinventer l’histoire, réparer ce qu’elle m’avait enlevé de manière symbolique.
Je voulais aussi m’interroger sur les bénéfices d’un pareil traumatisme et voir si Nino pouvait en tirer profit dans son existence, s’il pouvait cheminer vers plus de lumière. J’ai fait des recherches sur la maladie, les protocoles, rencontré des spécialistes, des oncologues, des malades, des accompagnants, et j’ai pu dresser le constat que, même si c’est une épreuve, les chances de s’en sortir sont grandes.
Quels étaient vos partis pris de réalisation ?
Je ne voulais pas d’une mise en scène entièrement naturaliste tournée caméra à l’épaule. Il fallait trouver une manière d’être à la fois très près et très loin de Nino pour faire sentir qu’il n’était pas seul dans cette ville. Il lui arrive un événement, mais, vu de loin, c’est une histoire parmi tant d’autres.
Cela a guidé le reste de la mise en scène : nous nous demandions toujours si nous étions avec lui seul ou avec lui et les autres. Le film est une errance, il s’agissait donc d’estimer si Nino ressentait quelque chose ou non selon les situations, pour trouver cette distance. Nous avons travaillé ainsi de manière instinctive avec ma cheffe-opératrice Lucie Baudinaud, sans peur de mélanger les genres.
Prix de la Révélation, 64e semaine de la crtique. 3,9 étoiles sur Allociné.