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Accord de performance collective et cause réelle et sérieuse du licenciement


La Cour de cassation rappelle que, lorsqu’un salarié refuse une modification de son contrat de travail issue d’un accord de performance collective, le juge doit vérifier si cet accord est justifié par les nécessités du fonctionnement de l’entreprise. À défaut, le licenciement ne peut être considéré comme fondé sur une cause réelle et sérieuse.

Faits et procédure

Mme [E] a été engagée le 1er mars 2002 comme comptable par la société A, devenue société B, son lieu de travail étant fixé à [Localité 3].

Le 12 juin 2018, un accord collectif de gestion prévisionnelle des emplois et des compétences a été conclu, incluant un chapitre sur la mobilité interne, conformément à l’article L. 2254-2 du code du travail.

Ayant refusé la modification de son contrat proposée le 30 avril 2019 dans le cadre de cet accord, Mme [E] a été licenciée le 7 juin 2019.

Elle a saisi le conseil de prud’hommes pour obtenir des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Moyens

Mme [E] reprochait à la cour d’appel de l’avoir déboutée :

1°/ qu’un accord de performance collective doit répondre aux nécessités du fonctionnement de l’entreprise ou viser à préserver ou développer l’emploi ; qu’en refusant d’en apprécier la réalité, la cour d’appel a violé l’article L. 2254-2 du code du travail ;

2°/ qu’il revient au juge de vérifier si le licenciement consécutif au refus du salarié est justifié par les nécessités du fonctionnement de l’entreprise au sens de la Convention n°158 de l’OIT ; qu’en omettant cette vérification, la cour d’appel a méconnu ces textes.

Motivation

6-8. Selon la Convention n°158 de l’OIT, un salarié ne peut être licencié sans motif valable, et le juge doit pouvoir examiner ces motifs pour en apprécier la réalité.

9-10. L’article L. 2254-2 du code du travail précise qu’en cas de refus d’une modification issue d’un accord de performance collective, le licenciement repose sur un motif spécifique constituant une cause réelle et sérieuse, à condition que l’accord soit justifié par les nécessités du fonctionnement de l’entreprise.

11-13. La cour d’appel avait jugé le licenciement fondé, estimant ne pas avoir à apprécier le bien-fondé des objectifs de l’accord, qui visaient à développer l’activité et l’emploi.

14. En statuant ainsi, sans vérifier concrètement si l’accord répondait aux nécessités de fonctionnement de l’entreprise, la cour d’appel a violé la loi et la Convention de l’OIT.

Dispositif

Par ces motifs, la Cour de cassation :

Casse et annule l’arrêt du 5 octobre 2023, uniquement en ce qu’il déboute Mme [E] de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

Renvoie l’affaire devant la cour d’appel de Bordeaux ;

Condamne la société B aux dépens et à verser 3 000 € à Mme [E] au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Ordonne la transcription du présent arrêt en marge de la décision partiellement cassée.

Ainsi fait et jugé par la chambre sociale de la Cour de cassation, le 10 septembre 2025.

Photo : Photolia

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