Alger, 1938. Meursault, un jeune homme d’une trentaine d’années, modeste employé, enterre sa mère sans manifester la moindre émotion. Le lendemain, il entame une liaison avec Marie, une collègue de bureau. Puis il reprend sa vie de tous les jours. Mais son voisin, Raymond Sintès vient perturber son quotidien en l’entraînant dans des histoires louches jusqu’à un drame sur une plage, sous un soleil de plomb.

J’avais écrit un scénario original en triptyque. Dans l’une des histoires, d’une trentaine de minutes, j’avais brossé le portrait d’un jeune homme contemporain, désabusé, coupé du monde, qui ne voyait aucun sens à sa vie. Benjamin Voisin devait jouer le rôle. Mais le projet n’a pas pu se faire et des amis m’ont conseillé de développer cette histoire pour un long métrage. Pour la nourrir, j’ai relu L’Étranger, que je n’avais pas relu depuis mon adolescence. Et là, ce fut un choc : ce roman avait gardé toute sa puissance et rejoignait des choses que je voulais raconter – en plus intelligent et en plus fort ! J’ai alors contacté les Éditions Gallimard, en pensant qu’évidemment les droits pour le cinéma étaient déjà pris, mais à ma grande surprise ils étaient libres. Je me suis alors lancé dans l’adaptation, certain que Benjamin serait parfait pour incarner Meursault.
Mettre en images l’histoire de Meursault a été un moyen d’essayer de le comprendre, de percer son mystère. Je découvre mes films en les tournant. Je ne sais jamais vraiment à quoi ils vont ressembler au final. Je savais que j’étais profondément touché par le livre, par cette absurdité de la vie que Camus décrit sans jamais céder au désespoir. Ce livre – et j’espère ce film – nous interroge. C’est ce que j’attends du cinéma.
C’était important pour moi de rencontrer catherine camus, qui veille sur l’œuvre de son père, avec bienveillance et fermeté. C’était très émouvant d’aller à lourmarin, de voir la chambre de camus, son bureau, la vue de la terrasse où il écrivait et de ressentir la chaleur du sud qui lui rappelait tant l’algérie. Elle a lu le scénario, m’a dit des choses importantes sur les circonstances de l’écriture du livre, sur certaines inspirations, sur des détails biographiques, ce qui m’a aidé à finaliser mon scénario. Elle a compris mon besoin et mon souci de contextualiser, pour que le film soit recevable par un public d’aujourd’hui, pour ne pas être perçu comme déconnecté de la réalité complexe qu’on connait. Il ne s’agissait pas de faire une adaptation littérale, mais d’apporter un regard d’aujourd’hui sur cette œuvre majeure du xxème siècle, sur notre passé colonial et sur cette douleur encore si vive entre la france et l’algérie.
Drame adaptaté de L’Étranger d’Albert Camus. 3,8 étoiles AlloCiné.