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Temps de travail et droit au repos : implications pour les dirigeants et RH 


La Cour de cassation a récemment précisé les règles concernant la prise d’acte de rupture par le salarié et le droit au repos hebdomadaire. Cette décision rappelle que le non-respect de ces obligations peut entraîner une requalification en licenciement sans cause réelle et sérieuse et des indemnisations conséquentes.

Pour les dirigeants et responsables RH, il s’agit d’une alerte pratique : vérifier la conformité des plannings et la gestion du temps de travail est indispensable pour limiter les risques juridiques. Cette actualité doit donc être suivie de près pour sécuriser vos pratiques.

Faits et procédure

Selon l'arrêt attaqué, M. [X] a été engagé en qualité de directeur des ventes par la société [Société Y] le 8 janvier 2018.

Il a pris acte de la rupture du contrat de travail aux torts de l'employeur le 16 novembre 2018.

Le 9 mai 2019, le salarié a saisi la juridiction prud'homale de demandes au titre de l'exécution et de la rupture du contrat de travail.

Examen des moyens

Sur le premier moyen et sur le second moyen, pris en ses première à quatrième branches et en ses sixième et septième branches

En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces griefs qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Énoncé du moyen

L'employeur fait grief à l'arrêt de requalifier la prise d'acte du 18 novembre 2018 en licenciement sans cause réelle et sérieuse à cette date et de le condamner à verser au salarié des sommes au titre de la requalification de la prise d'acte en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnités compensatrice de préavis, de congés payés afférents, d'indemnité de licenciement et pour non-respect du droit au repos ainsi qu'à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires, outre les congés payés afférents, d'avantages en nature pour les mois d'octobre et novembre 2018 et d'indemnité de congés payés afférents, alors « que l'interdiction pour l'employeur de faire travailler un même salarié plus de six jours par semaine civile, n'impose pas que le jour de repos lui soit accordé au plus tard le jour qui suit une période de six jours de travail consécutifs, mais impose qu'il lui soit accordé à l'intérieur de chaque semaine civile ; qu'en jugeant que l'employeur aurait méconnu le droit au repos hebdomadaire du salarié aux motifs que sur une période globale de deux semaines civiles, le salarié avait travaillé onze jours consécutifs entre le 3 avril 2018 et le 13 avril 2018, puis douze jours consécutifs entre le 3 septembre et le 14 septembre 2018, la cour d'appel qui n'a pas vérifié si, pour chaque semaine civile, le salarié s'était bien vu accorder ou non un jour de repos, a statué par des motifs impropres à justifier sa décision et a violé l'article L. 3132-1 du code du travail et, par voie de conséquence, les articles L. 1231-1 du code du travail et 1103 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 3132-1 et L. 3132-2 du code du travail :

Aux termes du premier de ces textes, il est interdit de faire travailler un même salarié plus de six jours par semaine.

Selon le second, le repos hebdomadaire a une durée minimale de vingt-quatre heures consécutives auxquelles s'ajoutent les heures consécutives de repos quotidien.

La cour de justice de l'Union européenne a jugé qu'il est obligatoire que tout travailleur bénéficie, au cours d'une période de sept jours, d'une période minimale de repos sans interruption de vingt-quatre heures, auxquelles s'ajoutent les onze heures de repos journalier prévues, sans préciser toutefois le moment auquel cette période minimale de repos doit être accordée.

Il résulte de l'article L. 3132-1 du code du travail que toute semaine civile doit comporter un repos de vingt-quatre heures consécutives auxquelles s'ajoutent les heures consécutives de repos quotidien, sans exiger que cette période minimale de repos hebdomadaire soit accordée au plus tard le jour qui suit une période de six jours de travail consécutifs.

Pour condamner l'employeur à payer au salarié une somme à titre de dommages-intérêts pour non-respect du droit au repos, l'arrêt retient qu'il est établi que le salarié avait travaillé du mardi 3 avril 2018 au vendredi 13 avril 2018, soit onze jours consécutifs, et du lundi 3 septembre 2018 au vendredi 14 septembre 2018, soit douze jours consécutifs, sans aucun jour de repos en méconnaissance des dispositions de l'article L. 3132-1 du code du travail.

En statuant ainsi, alors que chaque salarié doit bénéficier d'un repos hebdomadaire au cours de chaque semaine civile, soit du lundi 0 heure au dimanche 24 heures, la cour d'appel, qui a retenu une période de référence différente, a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

La cassation prononcée sur le second moyen pris en sa cinquième branche est sans incidence sur les chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur au paiement de diverses sommes au titre des heures supplémentaires et des avantages en nature pour les mois d'octobre et novembre 2018, outre congés payés afférents, que la critique formulée par ce moyen n'est pas susceptible d'atteindre.

La cassation des chefs de dispositif prononcée n'emporte pas non plus celle des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une somme en application de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci et non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il requalifie la prise d'acte du 18 novembre 2018 en licenciement sans cause réelle et sérieuse à la date du 18 novembre 2018, condamne la société [Société Y] à payer à M. [X] 2 000 euros au titre de la requalification de la prise d'acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse, 22 500 euros au titre de l'indemnité compensatrice de préavis, outre 2 250 euros au titre des congés payés afférents, 1 562,50 euros au titre de l'indemnité de licenciement et 1 500 euros au titre du non-respect du droit au repos, l'arrêt rendu le 16 novembre 2023 par la cour d'appel ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel compétente ;

Condamne M. [X] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société [Société Y].

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