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Contrat de travail : la Cour de cassation valide l'interruption de la rémunération pour motif sanitaire


Face à un contexte légal exceptionnel, la Cour de cassation (20 novembre 2024) confirme la légitimité pour l'employeur de suspendre le contrat et le salaire d'un salarié qui ne remplit pas ses obligations sanitaires. L'arrêt est crucial car il valide cette mesure, malgré l'atteinte qu'elle porte au droit de propriété du salarié sur sa créance salariale.

Faits et procédure

Selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 30 novembre 2022) et les pièces de la procédure, Mme [U] [W] a été engagée par la société Reside études seniors.

Dans le contexte des obligations sanitaires liées à la pandémie de Covid-19, l'employeur lui a notifié le 5 octobre 2021 la suspension de son contrat de travail et de sa rémunération à la suite de son refus de présenter un « passe sanitaire » le même jour, le reclassement n'ayant pas été possible.

La salariée a saisi la juridiction prud'homale statuant en référé d'une demande de réintégration et de reprise immédiate du paiement des salaires. La cour d'appel a confirmé l'ordonnance de référé la déboutant de ses demandes.

Mme [U] [W] a formé un pourvoi en cassation contre cet arrêt, notamment sur le fondement de la violation de la Convention européenne des droits de l'homme.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en ses différentes branches

La salariée fait grief à l'arrêt de dire que la suspension du contrat de travail et de la rémunération est licite, et de la débouter de sa demande de reprise du paiement des salaires, alors :

que toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens ; qu'une créance de nature salariale constitue un bien ; qu'en décidant néanmoins que la société Reside études seniors avait légalement pu suspendre le contrat de travail de Mme [W] et interrompre le versement de sa rémunération, motif pris de l'application des dispositions transitoires de la loi du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, la cour d'appel aurait violé l'article 1er du Protocole n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 3111-1 et suivants du code de la santé publique, dans leur rédaction résultant de la loi n° 2021-1040 du 5 août 2021 relative à la gestion de la crise sanitaire, et l'article 1er du Protocole n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales-:

Il n'y a pas lieu de renvoyer au Conseil constitutionnel la question prioritaire de constitutionnalité soulevée par la salariée, la Cour de cassation ayant déjà statué sur la conformité des dispositions de la loi du 5 août 2021.

Concernant le grief tiré de la violation de l'article 1er du Protocole n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (droit au respect des biens), la Cour de cassation rappelle que la mesure de suspension du contrat de travail et de la rémunération, prise par l'employeur en application de la loi, constitue une ingérence dans le droit au respect des biens.

Toutefois, cette ingérence est légitime car elle poursuit l'objectif de protection de la santé publique et est nécessaire dans une société démocratique pour prévenir la propagation de la maladie, notamment dans les établissements accueillant des personnes vulnérables.

La suspension du contrat de travail, qui n'est pas une sanction et qui prend fin dès que le salarié satisfait à son obligation (présenter le passe sanitaire, le certificat de rétablissement ou de contre-indication, ou accepter d'être reclassé), ne constitue pas une atteinte disproportionnée au droit au respect des biens de la salariée.

La cour d'appel en a donc exactement déduit que la suspension du contrat de travail et de la rémunération était légale.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne Mme [U] [W] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par Mme [U] [W] et la condamne à payer à la société Reside études seniors la somme de 2 000 euros ;

Source : Cour de cassation. Photo : Pavel Danilyuk.

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