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Mikado


Mikado et Laetitia vivent avec leurs enfants sur les routes. Une panne de moteur les amène à s’installer le temps d’un été chez Vincent, un enseignant qui vit seul avec sa fille. C’est le début d’une parenthèse enchantée qui pourrait aussi bouleverser l’équilibre de toute la famille alors que Nuage, leur fille aînée, se prend à rêver d’une vie normale.

Entretien avec Baya Kasmi

 

Le titre de votre film – Mikado – correspond au surnom de votre personnage principal. Le mikado étant par ailleurs un jeu d’adresse, et l’une des appellations données, autrefois, à l’empereur d’ascendance divine du Japon, on suppose que ce choix ne relève pas du hasard : expliquez-nous…

Je ne savais pas pour l’empereur du Japon. Mais cela correspond très bien au personnage de Mikado : il a ce côté tyran d’un tout petit monde qui, en même temps, le protège. D’ailleurs, il sent bien que s’il en sort, il sera perdu. La référence au jeu d’adresse, en revanche, est totalement assumée. J’adore ce jeu, il me rappelle l’enfance et ça n’est pas un hasard en effet, puisque c’est le sujet du film : l’enfance et le désir de liberté qui, souvent, l’accompagne. Très vite j’ai voulu relier ce personnage à son enfance et le mikado sert à ça, je l’imagine comme un objet transitionnel, quelque chose qui le rassure et qui lui donne l’impression que la vie est régie par des règles qu’il maîtrise.

D’où vous est venue, au départ, cette idée de construire un film autour d’un couple qui a fait le choix de vivre sur la route, avec ses enfants, en marge de toute institution et autorité ?

Je suis partie d’histoires personnelles que l’on m’a racontées. Les hasards de la vie font que dans ma famille élargie, dans mes amitiés, il y a des gens qui ont été placés dans des foyers ou dans des familles d’accueil, et cela sans que l’autorité parentale ait été retirée à leurs pères et/ou à leurs mères. Cela veut dire, en gros, que les parents n’étaient pas en mesure de s’occuper d’eux mais continuaient de décider pour eux… Un paradoxe qui crée un sentiment d’injustice puissant chez eux et a fondé en partie ce qu’ils sont devenus à l’âge adulte. Comment ne pas être méfiant, comment ne pas avoir peur des autres, quand on a grandi sans protection et sans regard d’amour ? Mais ce qui m’intéressait c’est surtout de voir ce qu’ils sont devenus, comment ils se sont relevés. Comment on gère ce vide dans la vie qui nous rend différent des autres, comment on en fait une force aussi. Mikado et Laetitia veulent recréer la famille qu’ils n’ont jamais eue mais ils n’ont pas les codes, ils n’ont pas d’autres choix que d’inventer. 

Diriez-vous, pour finir, que votre film, qui raconte l’émancipation d’une jeune fille, raconte aussi la vôtre ?

Oui, j’ai cette sensation. J’étais très frustrée d’être enfermée dans un genre, celui de la comédie, même si c’est un genre que j’adore et que je ne veux pas lâcher. La comédie c’est tyrannique, il faut être drôle avant tout, ça impose un rythme, un découpage. Mikado me libère, car en me délestant de la comédie, j’ai pu prendre le temps des personnages, des ambiances, de la poésie. Ce film m’a apporté cette liberté d’autant plus galvanisante que le tournage a été très joyeux. 

Comédie dramatique de Baya Kasmi. 3,7 étoiles AlloCiné.

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