Agnes et Nora voient leur père débarquer après de longues années d’absence. Réalisateur de renom, il propose à Nora, comédienne de théâtre, de jouer dans son prochain film, mais celle-ci refuse avec défiance. Il propose alors le rôle à une jeune star hollywoodienne, ravivant des souvenirs de famille douloureux.
Entretien avec Joachim Trier, Renate Reisve, Stellan Skarsgard, Inga Ibsdotter Lilleaas et Elle Fanning
Devenu lui-même père, Joachim Trier s’est interrogé sur ce que chaque génération lègue à la suivante. Alors qu’il écrivait le scénario avec Eskil Vogt, sa maison familiale, transmise de génération en génération, venait justement d’être mise en vente. Une situation qui les a amenés à réfléchir à la notion même de foyer. « Je me suis d’abord demandé ce que mes parents et grands-parents avaient traversé dans leur vie, mais j’ai ensuite commencé à envisager les choses du point de vue d’un jeune, du regard d’un enfant, sur la maison dans laquelle il a grandi », explique le cinéaste. « Un foyer est un concept hautement subjectif, et cette maison est devenue un autre point de départ pour aborder un récit plus complexe : une réflexion sur la vie et nos attentes. » Si l’intrigue se déroule une fois encore à Oslo, ce nouveau film de Joachim Trier se révèle plus dense, plus foisonnant, que les deux premiers volets de la trilogie se déroulant dans la ville capitale. « Ce projet s’articule autour de plusieurs personnages, ce qui a nous ouvert de nouvelles possibilités dans l’écriture », explique le cinéaste. « Passer d’un personnage à l’autre, alterner entre différentes temporalités, permet de créer une expérience polyphonique, une ambition narrative plus ample que celle consistant à suivre le parcours subjectif d’un seul protagoniste. »
Trouver la maison familiale du film s’est révélé aussi délicat et chronophage que le casting. Comme on le voit dans le flash-back en scène d’ouverture, la propriété des Borg est un personnage à part entière – une créature vivante qui observe en silence, d’une époque à l’autre, le comportement des êtres humains qui y habitent. « Dans cette histoire, on sent que la douleur et le chagrin se transmettent de génération en génération, et ; maison nous sert de microcosme pour observer le travail du temps, le pardon, qu’on accorde ou pas, et le legs affectif qu’on reçoit de ses parents », indique Joachim Trier, lui-même petit-fils de réalisateur et fils d’un ingénieur du son. « Je m’intéresse à la manière dont les émotions et les expériences de vie se transmettent au sein d’une famille, et à la question de savoir pourquoi on ressemble tant à l’un de ses parents et pas du tout à l’autre. Gustav, lui, se retrouve confronté à ce qu’il a transmis à ses enfants, involontairement ou inconsciemment, et c’est un thème central du film. Nous avons voulu que la maison familiale tende un miroir au spectateur pour qu’il puisse s’y contempler Au fil des générations, la maison incarne les personnages eux-mêmes et se fait l’écho de leurs relations tourmentées. « C’est une très belle manière de créer un lien entre les générations passées et l’époque actuelle, car une maison peut être un lieu d’ancrage, une sorte d’ange gardien, un espace qui vous ressource », note Inga Ibsdotter Lilleaas. « Ce n’est peut-être qu’une maison, mais elle est le réceptacle de tant d’événements auxquels on n’a pas pu assister : ses murs sont imprégnés du passé et, peut-être aussi, de l’avenir. »
Comédie dramatique, Drame, Comédie de Joachim Trier. 4 étoiles AlloCiné.