Laura, la trentaine, essaie de se reconstruire après une relation tumultueuse avec Joachim. Elle mène une vie en apparence tranquille, en élevant seule sa petite fille. Mais l'accident de Shirine, la nouvelle compagne de Joachim, va faire ressurgir son passé. Les deux femmes, en proie à la violence du même homme,vont peu à peu se soutenir.

Entretien avec Nathalie Najem
Il est né de plusieurs désirs : raconter une histoire intime tout en lui apportant une dimension plus universelle. Grâce au personnage de Shirine, la deuxième compagne de Joachim, non seulement l’expérience de l’emprise et de la violence n’était plus vécue une seule fois par une seule personne, mais elle permettait d’ouvrir la voie à l’après, après la violence, après la séparation… L’expérience vécue par la deuxième femme ne renvoie pas seulement Laura à son traumatisme mais elle l’oblige à affronter plus frontalement encore la difficulté des relations entre ex-conjoints. J’avais aussi envie de sortir des clichés qui entourent souvent ces sujets. Quand j’ai entamé l’écriture du scénario, beaucoup d’histoires commençaient à circuler autour de ce thème, et les personnages, qu’ils soient masculins ou féminins, me semblaient manquer de complexité. Dès la première image, les premiers apparaissaient comme des méchants et les secondes, aveuglées, n’anticipaient rien. Moi, je ne crois pas qu’une rencontre puisse être aussi lisible, aussi univoque, ni qu’on puisse aimer quelqu’un s’il n’y a pas quelque chose - les gens n’ont pas écrit sur leur front qu’ils vont nous faire du mal ! Même s’il y a des indices…. Après, il y a des cas limites, de froids manipulateurs mais ce n’était pas ceux-là que je voulais aborder.
Il s’agissait d’incarner sa fragilité et sa solitude aussi dans cette dépendance. Avec ce qu’elle créée comme ambivalence elle aussi. On peut considérer Joachim comme quelqu’un de malade, quelqu’un qu’il faut aider et soigner, mais ça n’empêche pas qu’on le rejette, qu’on le réprouve, parce qu’in fine, il est responsable de ses actes. Et ce retournement permanent entre compassion et condamnation, c’est ce que ces femmes ressentent pour lui. Jusqu’à sa petite fille. Mon souhait, au fond, était qu’on puisse s’identifier aux sentiments mêlés que vivent ces personnages. Car personnellement, et particulièrement dans ma jeunesse, les œuvres qui me permettaient de m’identifier sans jugement, me redonnaient une place dans le monde. Et c’était très puissant.
Non, mais elle a honte. Elle ne s’imagine pas raconter à sa famille et à ses proches qu’elle a été séquestrée puis enlevée par l’homme qu’elle aime. Elle sait que Laura et elle ont une expérience commune et pense sans doute que Laura la comprendra sans la juger ; qu’elle saura quoi faire. J’ai été frappée, ces dernières années, de voir à quel point le fait qu’une femme témoigne en incite d’autres à parler à leur tour. Dès qu’elle est partagée, la honte s’amenuise, la solidarité entre femmes prend le dessus.
Comédie dramatique de Nathalie Najem. 3,5 étoiles AlloCiné.