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La promesse verte


Pour tenter de sauver son fils Martin injustement condamné à mort en Indonésie, Carole se lance dans un combat inégal contre les exploitants d’huile de palme responsables de la déforestation et contre les puissants lobbies industriels.


Entretien avec le réalisateur, Edourd Bergeon.

Comment vous est venue l’envie de réaliser ce film LA PROMESSE VERTE ?

Lors du tournage de mon premier film " Au nom de la terre " en 2018, je suis tombé sur un article de presse concernant le blocage de la raffinerie Total de la Mède par des agriculteurs. Ils protestaient contre l’importation d’huile de palme d’Asie du Sud-Est, destinée à la production de biocarburants. Les agriculteurs français avaient été incités par le gouvernement, via des primes, à cultiver du palme pour produire du biocarburant et les importations d’huile de palme allaient faire baisser les cours de marché de l’huile française. La colère de ces agriculteurs qui se sentaient floués a tout de suite résonné en moi. Car au-delà du faible prix de production de l’huile de palme, se pose surtout la question de ce qui se cache derrière la promesse des « carburants verts » qui ne proposent au fond rien de durable pour la planète, ni pour les humains. 

Vous avez imaginé l’histoire d’un jeune homme qui risque la mort et de sa mère qui est prête à tout pour le sauver. Racontez-nous.

Avec mes scénaristes, nous avons voulu écrire des personnages proches de nous, de nos préoccupations quotidiennes, à qui on puisse facilement s’identifier. Martin est emblématique de cette nouvelle génération qui a toujours baigné dans les discours de préservation de l’environnement. Il est persuadé qu’il faut éveiller les consciences et faire changer les choses. Et qu’il est du devoir de chacun de prendre les choses en main. Aussi se rend-il en Indonésie pour essayer de montrer au monde les conséquences concrètes de la culture intensive des palmiers à huile. Carole, c’est un peu la mère des années 2020. Dynamique, volontaire, une citoyenne ancrée dans un quotidien à la fois engagé mais loin des réalités politiques et économiques internationales. Elle va se retrouver dans une situation inimaginable : son fils est condamné à mort à l’autre bout du monde, dans un pays dont elle ne maîtrise ni la langue ni la culture. C’est une femme qui passe d’une vie tranquille, sans histoires, à un combat sans relâche pour tenter de sauver son fils. Cette femme « ordinaire » devient une héroïne malgré elle, ballotée dans une lessiveuse qui menace de la broyer et qui la propulse à l'autre bout du monde, dans l'univers des lobbies ou sous les ors de la République. 

Vos personnages sont-ils inspirés de personnes réelles ?

Le film n’est pas à proprement parler d'une histoire vrai, les personnages du film n’ont pas existé. En revanche, les enjeux présentés le sont. J’ai été journaliste puis j’ai réalisé des documentaires, où j’ai raconté de vrai histoires. J’ai gardé cet ADN en faisant aujourd’hui un cinéma du réel, engagé. Les informations que je distille dans le film sur l’Indonésie, sur la forêt, la diplomatie française, l’industrie des carburants verts, l’huile de palme, la géopolitique, etc… Tout est vrai. C’est essentiel que tout soit crédible. Ce que vivent les personnages du film, c’est vraiment une situation que chacun pourrait connaître, même si je ne le souhaite à personne.

Le tournage a-t-il eu lieu en Indonésie ?

Vu le sujet, il nous était impossible de tourner en Indonésie. Seuls les plans aériens de la forêt primaire ont été tournés là-bas. L'essentiel du film a été tourné en Thaïlande, l'un des cinq plus grands pays producteurs d’huile de palme. On y trouve, à une autre échelle, des forêts primaires et des palmeraies, des usines d'extraction d'huile, le même type de paysages et de climat, une architecture similaire... La chaleur y est aussi suffocante qu’en Indonésie (nous avons vécu un pic historique de température et de pollution lorsque nous y étions). La Thaïlande a également une industrie du cinéma reconnue. Le pays dispose d’infrastructures et d’équipes techniques très professionnelles. Nous nous sommes inspirés de nos repérages en Indonésie pour le choix de nos décors. Comme pour " Au nom de la  terre ", je voulais que tout soit crédible, jusqu'au moindre détail. C’était primordial. Nous avons tourné pendant deux mois en Thaïlande au cours du printemps 2023.

Un mot sur la musique ? 

Thomas Dappel a réalisé une partition incroyable pour ce film. Il a travaillé à un mélange d'instruments européens et d'instruments indonésiens, notamment le gamelan, un ensemble instrumental traditionnel très impressionnant composé de nombreuses percussions en bronze et de tambours. 

Drame de Edouard Bergeon. Propos recueilli par André-Paul Ricci et Tony Arnoux. 3,9 étoiles AlloCiné.

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