Haoui.com

Attention aux circonstances vexatoires d’un licenciement 


Un salarié est licencié pour faute grave et le conteste en justice. La Cour d’appel lui donne tort mais la Cour de cassation casse partiellement son arrêt au motif qu’elle n’aurait pas examiné les circonstances prétendument vexatoire du licenciement du salarié qui demandait, à ce titre, des dommages et intérêts.

Extrait de l’arrêt de la Cour de cassation, civile, Chambre sociale du 6 septembre 2023. Pourvoi n° : 22-17.695

[...]

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Dijon, 4 novembre 2021), M. [O] a été engagé en qualité d'agent professionnel de fabrication le 25 mars 1997 par la société Automobiles Peugeot.

2. Son contrat de travail a été transféré à la société JTEKT JADS le 1er avril 2000.

3. Licencié pour faute grave le 5 avril 2018, le salarié a saisi la juridiction prud'homale afin de contester son licenciement.

Examen des moyens. Sur le premier moyen

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le second moyen. Enoncé du moyen

5. Le salarié fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande de dommages-intérêts pour préjudice distinct, alors « que même lorsqu'il est prononcé pour faute grave, le licenciement peut causer au salarié, en raison des circonstances vexatoires qui l'ont accompagné, un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi et dont il est fondé à demander réparation ; que pour débouter le salarié de sa demande de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait d'avoir été accusé à tort d'actes de sabotage, d'avoir vu son image atteinte auprès de ses anciens collègues, tous informés du motif de la rupture, et d'avoir été congédié de façon expéditive et vexatoire, la cour d'appel a retenu que le licenciement [?] étant fondé sur une faute grave, la demande formulée à ce titre sera rejetée " ; qu'en statuant ainsi, par un motif inopérant et sans vérifier, ainsi qu'il lui était demandé, si le licenciement avait été entouré de circonstances vexatoires de nature à causer au salarié un préjudice distinct de celui résultant de la perte de son emploi, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1231-1 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1231-1 du code civil, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 :

6. Même lorsqu'il est justifié par une faute grave du salarié, le licenciement peut causer à celui-ci, en raison des circonstances vexatoires qui l'ont accompagné, un préjudice dont il est fondé à demander réparation.

7. Pour débouter le salarié qui demandait des dommages-intérêts en réparation du préjudice moral subi du fait d'avoir été accusé à tort d'actes de sabotage, d'avoir vu son image atteinte auprès de ses anciens collègues et d'avoir été congédié de façon expéditive et vexatoire, l'arrêt retient que le licenciement du salarié étant fondé sur une faute grave, sa demande sera rejetée.

8. En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le licenciement n'avait pas été entouré de circonstances vexatoires, la cour d'appel a privé sa décision de base légale.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de dommages-intérêts formée par M. [O] en réparation des circonstances vexatoires de son licenciement et le condamne à payer à la société JTEKT JADS la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile et aux dépens d'appel, l'arrêt rendu le 4 novembre 2021, entre les parties, par la cour d'appel de Dijon ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Besançon ;

Condamne la société JTEKT JADS aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société JTEKT JADS et la condamne à payer à la SCP Thouvenin, Coudray et Grevy la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six septembre deux mille vingt-trois.

Photo : Pavel Danilyuk - Pexels.

Pour vous accompagner juridiquement, des avocats :

75008 - HEBE AVOCATS A LA COUR https://www.avocat-droit-fiscal-paris.com
75116 - MAITRE ALEXIA DECAMPS https://www.alexia-decamps-avocat.fr
78000 - BVK VERSAILLES 78 AVOCATS ASSOCIES AVOCAT https://www.bvk-avocats-versailles.com