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Qui a autorité pour signer une lettre de licenciement ?


Selon la Cour de cassation, le DRH d’une filiale ne peut pas licencier un salarié d’une autre filiale même s’il a reçu mandat du président de leur société mère.

Extrait de l’arrêt de la Cour de cassation, civile, Chambre sociale du 20 octobre 2021. Pourvoi n° : 20-11.485

[…]

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Bourges, 29 novembre 2019), M. [C], engagé le 1er octobre 2014 par la société Etablissements Bodin Joyeux, filiale de la société Chanel international BV, en qualité de directeur général, a été licencié le 9 juin 2017 par Mme [E], directrice des ressources humaines de la société Manufactures de mode, autre filiale du groupe, mandatée à cette fin par l'employeur.

Examen du moyen. Enoncé du moyen

2. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, de le condamner à payer au salarié diverses sommes à ce titre et de lui ordonner le remboursement aux organismes sociaux concernés des indemnités de chômage éventuellement versées au salarié, dans la limite de six mois, alors :

« 1°/ que si la finalité même de l'entretien préalable et les règles relatives à la notification du licenciement interdisent à l'employeur de donner mandat à une personne étrangère à l'entreprise pour conduire la procédure de licenciement jusqu'à son terme, il en va différemment pour une personne qui, sans être membre du personnel de la société employeur, est salariée d'une autre société du groupe, sans qu'une telle faculté de donner mandat soit réservée aux salariés de la seule société mère ; que dès lors qu'il n'est pas contesté qu'un mandat a été donné à une salariée ayant qualité de directrice des ressources humaines d'une filiale du groupe auquel appartient la société employeur, la lettre de licenciement signée par cette salariée a vocation à produire effet ; qu'en jugeant au contraire que le mandat n'avait pas été valablement délivré au motif que la salariée mandataire n'était pas salariée de la société mère du groupe, la cour d'appel a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;

2°/ que les sociétés du groupe ont la faculté de donner mandat au responsable des ressources humaines de l'une des sociétés du groupe aux fins de prendre des décisions particulières comme le licenciement d'un cadre dirigeant d'une filiale du groupe, nonobstant le fait que cette filiale avait embauché un directeur administratif, financier et des ressources humaines dont les attributions pouvaient être ainsi limitées ; qu'en jugeant que le mandat n'avait pas été valablement délivré à la responsable des ressources humaines d'une autre filiale du même groupe au motif que la société employeur venait d'embaucher un ''directeur administratif, financier et des ressources humaines'', la cour d'appel s'est prononcée par un motif inopérant et a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;

3°/ que les sociétés du groupe ayant la faculté de donner mandat au responsable des ressources humaines de l'une d'entre elles, aux fins de prendre des décisions particulières comme le licenciement d'un cadre dirigeant d'une filiale du groupe, il en résulte que seule importe l'existence non contestée du mandat, non les énonciations du contrat de travail de ce responsable ; qu'en jugeant que le mandat n'avait pas été valablement délivré à la responsable des ressources humaines d'une autre filiale du même groupe au motif ''que le contrat de travail de Mme [E], dont il est constant qu'elle est directrice des ressources humaines de la société Manufactures de mode depuis avril 2017, n'est pas versé aux débats'', la cour d'appel s'est fondée sur un motif inopérant et a violé l'article L. 1232-6 du code du travail ;

4°/ qu'en statuant comme elle l'a fait, sans rechercher, comme l'y invitaient les conclusions de l'exposante, si l'organisation du groupe ne commandait pas que le pouvoir de licencier le directeur général d'une filiale soit délégué à la société du groupe qui était spécialement chargée d'accompagner les missions des filiales et des sites de fabrication, de telle sorte que le licenciement signé par Mme [E] était régulier, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1232-6 du code du travail. »

Réponse de la Cour

3. La finalité même de l'entretien préalable et les règles relatives à la notification du licenciement interdisent à l'employeur de donner mandat à une personne étrangère à l'entreprise pour procéder à cet entretien et notifier le licenciement.

4. Ayant relevé qu'il n'était pas démontré que la gestion des ressources humaines de la société Bodin Joyeux relevait des fonctions de la directrice des ressources humaines de la société Manufactures de mode, ni que cette dernière exerçait un pouvoir sur la direction de la société Bodin Joyeux, la cour d'appel en a exactement déduit, sans être tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, que la lettre de licenciement avait été signée par une personne étrangère à l'entreprise qui ne pouvait recevoir délégation de pouvoir pour procéder au licenciement.

5. Le moyen n'est donc n'est pas fondé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Etablissements Bodin Joyeux aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Etablissements Bodin Joyeux et la condamne à payer à M. [C] la somme de 3 000 euros ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt octobre deux mille vingt et un.

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