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Pas de protection absolue lorsque le congé de maternité est terminé


Une femme, de retour de son congé maternité,  est licenciée pour faute grave pour des faits antérieurs à son congé. Pour la Cour d’appel, elle bénéficiait d’une protection absolue rendant le licenciement nul. Ce n’est pas l’avis de la Cour de cassation pour qui la protection de la salariée était relative et s’arrêtait en même temps que son congé maternité.

Extrait de l’arrêt de la Cour de cassation, civile, Chambre sociale du 1 décembre 2021. Pourvoi n° : 20-13.339.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Chambéry, 27 août 2019), Mme [H] a été engagée en qualité de responsable événementiel à compter du 1er septembre 2008 par la société Crofthawk France devenue la société Mandala international (la société) et a été affectée au poste de responsable administrative et financière le 1er janvier 2009.

2. La salariée a été en congé maladie puis en congé de maternité à compter du 15 avril 2016 jusqu'au 17 décembre 2016. Convoquée le 28 décembre 2016 à un entretien préalable qui s'est tenu le 12 janvier 2017, elle a été licenciée pour faute grave le 20 janvier 2017 et a saisi, le 26 mai 2017, la juridiction prud'homale.

Examen des moyens 

[…]

Sur le second moyen, pris en sa seconde branche. Enoncé du moyen

7. L'employeur fait grief à l'arrêt de dire nul le licenciement de la salariée et de le condamner à lui payer diverses sommes au titre de la rupture du contrat de travail, alors « que si la période de protection de dix semaines suivant le congé de maternité est suspendue par la prise de congés payés suivant immédiatement le congé de maternité, son point de départ étant alors reporté à la date de la reprise du travail par la salariée, il n'en va pas de même en cas d'arrêt de travail pour maladie ; que l'arrêt de travail pour arrêt de maladie consécutif au congé de maternité relève de la période de protection relative de dix semaines durant laquelle la salariée peut se voir notifier un licenciement s'il est justifié par une faute grave ; qu'il ressort des constatations de l'arrêt que le congé maternité de la salariée s'est achevé le 17 décembre 2016, cette dernière ayant par la suite été placée en arrêt maladie ; que la salariée a été convoquée à un entretien préalable le 26 décembre 2016 et licenciée le 20 janvier 2017 ; qu'il s'en induit qu'au jour des actes préparatoires et du prononcé du licenciement, la salariée ne se trouvait plus en période de protection absolue pour congé maternité, mais relevait de la période de protection dite relative de dix semaines durant laquelle le licenciement peut être notifié pour faute grave ; qu'en décidant néanmoins que le licenciement était entaché de nullité en raison de l'engagement des actes préparatoires et de la notification du licenciement « pendant la période de protection de la maternité », cependant que les actes préparatoires et la notification du licenciement pouvaient avoir régulièrement lieu pendant la période de protection relative de dix semaines suivant le congé de maternité, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé les articles L. 1235-3, L. 1225-4 et L. 1225-4-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1225-4 du code du travail dans sa rédaction issue la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 :

8. Aux termes de ce texte, aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d'une salariée lorsqu'elle est en état de grossesse médicalement constaté, pendant l'intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, qu'elle use ou non de ce droit, et au titre des congés payés pris immédiatement après le congé de maternité ainsi que pendant les dix semaines suivant l'expiration de ces périodes.

Toutefois, l'employeur peut rompre le contrat s'il justifie d'une faute grave de l'intéressée, non liée à l'état de grossesse, ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement. Dans ce cas, la rupture du contrat de travail ne peut prendre effet ou être notifiée pendant les périodes de suspension du contrat de travail mentionnées au premier alinéa.

9. Il en résulte que pendant les dix semaines suivant l'expiration des périodes de suspension du contrat de travail, l'employeur peut notifier un licenciement pour faute grave non liée à l'état de grossesse ou pour impossibilité de maintenir le contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l'accouchement.

10. Pour dire le licenciement nul et condamner l'employeur à payer diverses sommes à la salariée, l'arrêt retient, après avoir constaté que le congé de maternité de la salariée s'était terminé le 17 décembre 2016, qu'il résulte de l'article L. 1225-4 du code du travail, interprété à la lumière de l'article 10 de la Directive 92/85 du 19 octobre 1992, concernant la mise en oeuvre de mesures visant à promouvoir l'amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail, qu'il est interdit à un employeur, non seulement de notifier un licenciement, quel qu'en soit le motif, pendant la période de protection visée à ce texte, mais également de prendre des mesures préparatoires à une telle décision.

11. En statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que le congé de maternité avait pris fin le 17 décembre 2016, de sorte que l'employeur pouvait rompre le contrat de travail s'il justifiait d'une faute grave de l'intéressée non liée à son état de grossesse, et qu'il lui appartenait en conséquence de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le licenciement était justifié par une telle faute, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre grief, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il dit que la demande en nullité du licenciement n'est pas une demande nouvelle, l'arrêt rendu le 27 août 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Chambéry ;

Remet, sauf sur ce point, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Grenoble ;

Condamne Mme [H] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du premier décembre deux mille vingt et un.

Photo : Ekaterina Bolovtsova - Pexels.

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