Haoui.com

Michel Fourniret, l'ogre des Ardennes


Michel Fourniret, né le 4 avril 1942 à Sedan (Ardennes) et mort le 10 mai 2021 à Paris, est un violeur, pédocriminel et tueur en série français auteur de crimes commis principalement sur des jeunes filles en France et en Belgique.

Repertoire Image

Le château de Sautou, dans les ardennes où vecu Michel Fourniret

Surnommé par les médias dans un premier temps le « Forestier des Ardennes » (il s'est prétendu forestier auprès des policiers, un métier qu'il n'a en fait jamais exercé), puis « l'Ogre des Ardennes », « le Tueur des Ardennes », « le Monstre des Ardennes », il est arrêté en Belgique pour une tentative d'enlèvement d'une fillette en juin 2003. Après enquête des faits qu'il a pu commettre en Belgique et la découverte des crimes commis en France, il est extradé le 9 janvier 2006 vers la France. Plusieurs fois reporté, son procès se conclut par sa condamnation à la réclusion criminelle à perpétuité incompressible pour cinq meurtres et deux assassinats de jeunes filles en France et en Belgique, les justices française et belge s'étant mises d'accord pour un procès unique. Des enquêtes se poursuivent pour d'autres affaires. Il avoue 11 meurtres et est suspecté dans 21 autres affaires de disparition de fillettes et jeunes femmes.

En plus des sept meurtres à l'origine de sa condamnation, il en a avoué trois supplémentaires dont l'un pour lequel l'enquête se poursuit. Il est en outre soupçonné d'en avoir commis plusieurs autres. Certains de ses actes ont visé des filles mineures, dont trois âgées de moins de quinze ans et une de douze ans, ce qui le fait entrer dans la catégorie des crimes pédophiles. Son épouse, Monique Olivier, née le 31 octobre 1948, est accusée de complicité de meurtre et de non-dénonciation de meurtre dont elle avait connaissance. Elle est jugée en même temps que lui et condamnée à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d'une période de sûreté de 28 ans.

Biographie

Enfance et adolescence

Michel Fourniret est né le 4 avril 1942 dans un milieu ouvrier à Sedan, où il a passé son enfance. On sait très peu de choses à ce sujet, car il n'a pas voulu détailler cette période de sa vie auprès des enquêteurs.

Aux psychiatres qui l'interrogent sur sa mère, fille de paysan décrite par lui comme caractérielle, Michel Fourniret recommande les lectures de Jules Renard et Hervé Bazin : dans Poil de Carotte, le petit François, victime de la haine et des humiliations maternelles, prend plaisir à massacrer de petits animaux ; dans Vipère au poing, Jean, maltraité par sa mère tyrannique, trouve les femmes dégoûtantes. L’année de sa naissance, elle faisait des ménages à la Kommandantur de l'armée allemande qui occupait alors les Ardennes. Des rumeurs d'adultère avec un officier allemand ont circulé mais on ne sait si cette relation a réellement été consommée. Il aurait été victime d'inceste dans son enfance, du fait de sa mère, quand il avait quatre ou cinq ans, ou six ans, « sa mère se servant de lui comme d’un objet sexuel ». De la prison de Fleury-Mérogis, il écrit à Monique Olivier : « Maman faisait la grasse matinée. Elle m'avait pris dans le lit… », ce qui fut par la suite démenti par son frère André.

Il a eu une sœur et un frère, tous deux plus âgés que lui : Huguette (morte en 2002), et André. Il aurait été très marqué par la vision de sa sœur déféquant dans un seau et a plus tard déclaré : « Pour moi, une femme, ça ne défèque pas. C'est dégradant, ce n'est pas à la hauteur de l'image de la sainte Vierge ».

Son père travaille comme ouvrier métallurgiste à Sedan. Il est décrit comme alcoolique et absent. Il divorce de sa femme à la santé mentale défaillante et obtient la garde de ses trois enfants.

Michel Fourniret est décrit par ses camarades de classe comme fourbe, voleur de stylos, de portefeuilles et de livres. « Dans l'adolescence, il trépignait de plaisir après avoir fait ses petites conneries perverses » qui lui vaudront d'être battu par ses camarades ou les surveillants de son école.

Vie d'adulte

Joueur d'échecs et passionné par la littérature, il est décrit comme cultivé, citant Dostoïevski, Rilke, Camus. Il sert dans les commandos de l'Air en Algérie puis se tourne vers des métiers techniques et devient ouvrier-fraiseur et menuisier.

Il se marie en 1964 avec Annette et a son premier enfant. En 1967, il est condamné pour la première fois à de la prison avec sursis pour agression sur mineures. Sa femme demande le divorce. En 1970, il se remarie avec Nicole, mariage qui sera suivi de la naissance d'un fils puis de jumelles.

Entre 1966 et 1973, il est condamné pour des faits de voyeurisme et de violence commis à Nantes et à Verdun. Il est incarcéré le 25 mars 1984 pour une dizaine d'agressions et viols sur mineurs en région parisienne et condamné le 26 juin 1987 par la cour d'assises de l'Essonne à sept ans de prison dont deux avec sursis, condamnation assortie de trois ans de mise à l'épreuve. Entre-temps sa seconde épouse a demandé le divorce.

Meurtres avoués par Fourniret

Isabelle Laville, adolescente de 17 ans, enlevée par le couple Fourniret à Auxerre le 11 décembre 1987, alors qu'elle revenait du collège. Son corps a été découvert en juillet 2006, 19 ans après les faits, au fond d'un puits à Bussy-en-Othe dans la campagne auxerroise après des recherches de la gendarmerie sur quelques indications de l'emplacement données par Fourniret. La gendarmerie a dû procéder à un déblaiement sur 30 mètres de profondeur, le puits ayant entretemps été comblé par la commune. Ce meurtre fut un temps attribué à Émile Louis, autre tueur en série de la région.

Farida Hamiche, femme de 31 ans, compagne de Jean-Pierre Hellegouarch, ancien compagnon de cellule de Fourniret disparue depuis le 12 avril 1988. Il avoue l'avoir tuée pour mettre la main sur une partie du magot du gang des postiches dont Hellegouarch était proche, faisant accuser Farida Hamiche du détournement. Lors du procès d'assises, il réitère ses aveux et accuse en outre Monique Olivier d'avoir participé au meurtre, ce qu'elle nie. Il aurait acheté son château du Sautou avec l'argent provenant de ce magot. Le corps de la victime n'a pas été retrouvé et l'enquête se poursuit.

Marie-Angèle Domèce, 19 ans, disparue le 8 juillet 1988 à la sortie du foyer Leclerc de Fourolles à Auxerre. En mars 2008, le tueur en série avait été mis en examen dans cette affaire, dénoncé par Monique Olivier, qui s'était par la suite rétractée. La cour d'appel avait finalement ordonné un non-lieu à l'encontre du tueur en série dans cette affaire et celle de Joanna Parrish, le 14 septembre 2011. Fourniret avoue finalement ce meurtre en février 2018 mais le corps n'a jamais été retrouvé.

Fabienne Leroy, jeune femme de 20 ans, disparue le 3 août 1988 à Chalons-en-Champagne, dont le corps fut retrouvé plus tard dans des bois environnants ; elle avait été violée et tuée par balle. Fourniret aborda la femme sur le parking d'un supermarché en lui demandant de le conduire chez un médecin, Monique Olivier alors enceinte avait fait croire à un malaise.

Jeanne-Marie Desramault, étudiante de 22 ans, disparue le 18 mars 1989 à Charleville-Mézières. Son cadavre fut retrouvé sur la propriété de Fourniret sur indication de ce dernier en juillet 2004. Fourniret l'avait rencontrée dans le train entre Paris et Charleville-Mézières et avait avec sa femme réussi à l'attirer chez lui.

Élisabeth Brichet, une Belge de 12 ans. Elle a disparu de Saint-Servais (près de Namur) le 20 décembre 1989. Le couple l'aurait repérée alors qu'elle se rendait au domicile d'une amie et aurait attendu qu'elle en ressorte. Prétextant que leur bébé était malade, lui et son épouse ont demandé à la fillette de les accompagner chez un médecin. Après l'avoir violée, il la tuera 36 heures plus tard chez lui. On a longtemps cru que son enlèvement était le fait de Marc Dutroux, jusqu'à ce que Fourniret mène la police sur le lieu en juillet 2004 où il l'avait enterrée, dans sa propriété du château du Sautou.

Joanna Parrish (en), femme britannique de 20 ans, lectrice d'anglais au lycée Jacques-Amyot d'Auxerre, retrouvée le 17 mai 1990 dans une rivière à Moneteau (Yonne) après avoir été violée, battue et étranglée. En mars 2008, le tueur en série avait été mis en examen dans cette affaire pour assassinat. La cour d'appel avait finalement ordonné un non-lieu à son encontre le 14 septembre 2011. Un an plus tard, elle avait annulé l'ordonnance de non-lieu dans l'affaire Parrish et demandé aux juges de rouvrir l'instruction sur la base de nouvelles pistes. Fourniret avoue les faits en février 2018.

Natacha Danais, fille de 13 ans, disparue le 24 novembre 1990 à Rezé dans la banlieue sud de Nantes. Fourniret et son épouse s'étaient rendus à Nantes ce jour-là, Fourniret devant répondre à une convocation du tribunal. À la sortie de l'audience, le couple croise la fillette sur le parking du centre commercial E.Leclerc « Atout Sud » et l'enlève. Le corps de l'adolescente est retrouvé quelques jours plus tard, poignardé, dans les dunes de Brem-sur-Mer à 70 km de Nantes. À l'époque, Jean Groix, vétérinaire et militant breton, fut soupçonné. Il habitait en face du domicile de la fillette qu'il connaissait et possédait une fourgonnette blanche similaire à celle de Fourniret, telle que l'avait décrite la sœur de Natacha. Il sera incarcéré à la suite de la découverte fortuite, lors d'une perquisition dans son cabinet pour l'affaire Danais, de trois Basques qu'il hébergeait, membres supposés d'ETA ; Jean Groix s'est suicidé en prison quelques semaines après son incarcération.

Céline Saison, femme de 18 ans qui disparut le 16 mai 2000 à Charleville-Mézières alors qu'elle venait de passer une épreuve du bac. Son corps fut retrouvé en juillet 2000 en Belgique.

Mananya Thumpong, fille de 13 ans, française d'origine thaïlandaise disparue le 5 mai 2001 à Sedan, alors qu'elle revenait de la médiathèque. Ses ossements ont été retrouvés en mars 2002 en Belgique, dans le bois de Nollevaux, à une trentaine de kilomètres de Sedan.

Estelle Mouzin, enfant de 9 ans, française, disparue le 9 janvier 2003 à Guermantes (Seine-et-Marne) en rentrant de l'école. Michel Fourniret avoue son meurtre le 6 mars 2020, dix-sept ans après sa disparition. Son corps n'a pas été retrouvé.

Dans un premier temps, Fourniret a nié toute implication dans les meurtres de Céline Saison et Mananya Thumpong. Il les avouera le 1 juillet 2004 après un long interrogatoire policier. Le 18 janvier 2006, la Cour de cassation a rejeté le pourvoi introduit par Monique Olivier, requérant la prescription de l'action publique pour les meurtres d'Isabelle Laville, de Fabienne Leroy, de Jeanne-Marie Desramault, d'Élisabeth Brichet, de Natacha Danais et de Farida Hamiche.

La femme de Fourniret, également incarcérée pour complicité de crimes, indiqua que son mari avait également tué une fille de 16 ans qui travaillait au pair à leur domicile. Il l'aurait assassinée en 1993 mais cela n'a pas pu être confirmé, ni l'identité de la victime connue. Monique Olivier ayant indiqué que le corps avait été enterré à Sart-Custinne, plusieurs fouilles ont été entreprises en 2004 au domicile des Fourniret et dans les environs mais sans résultats.

Fourniret a aussi avoué la tentative de meurtre d'un représentant de commerce dans les années 1980 sur une aire d'autoroute, indiquant qu'il lui avait tiré dessus pour lui voler son portefeuille et l'avait laissé pour mort. En fait, l'homme n'avait pas été tué et avait pu être secouru. Il avait porté plainte mais l'enquête avait ensuite été classée sans suite, faute d'éléments. La victime a été retrouvée en 2004 grâce à la sagacité d'un gendarme en retraite car l'homme ne s'était pas fait connaître malgré la médiatisation de l'affaire après l'arrestation de Fourniret. Mais ce crime ne sera sans doute pas jugé, les faits risquant d'être considérés comme prescrits.

Procès

Le procès s'est ouvert le 27 mars 2008 à la cour d'assises de Charleville-Mézières et s'est achevé le 28 mai 2008.

Fourniret a refusé de s'exprimer en brandissant plusieurs fois un écriteau « sans huis clos, bouche cousue », avant de tendre un « exposé » au président de la cour, Gilles Latapie. Il a répondu aux questions sur son identité en brandissant cette feuille de papier blanche avec ces mots écrits par ordinateur.

Monique Olivier, elle, a répondu aux questions sur son identité.

Pendant toute la durée de leur procès, ils ont été incarcérés à la prison de Charleville-Mézières.

Deux mois d'audience ont été nécessaires afin de juger le couple. L'avocat général Francis Nachbar a requis la réclusion criminelle à perpétuité incompressible pour Michel Fourniret et la perpétuité assortie d'une période incompressible de trente ans pour Monique Olivier. Mais il a redistribué les rôles, désignant le premier comme le « pitoyable petit Fourniret » et la seconde comme l'« égérie criminelle », la « muse sanglante ». La cour a délivré son arrêt le 28 mai 2008 : Michel Fourniret a été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité réelle, Monique Olivier à la perpétuité accompagnée d'une peine de sûreté de 28 ans. Elle est, à ce jour, en France, la seule femme condamnée à une peine de perpétuité assortie d'une période incompressible de plus de vingt-deux ans. Les audiences civiles se sont déroulées le lendemain du verdict.

Les deux accusés n'ont pas fait appel de la décision. Ils ont été transférés à la prison qui les accueillait avant le procès : Michel Fourniret à Châlons-en-Champagne et Monique Olivier à Valenciennes. Michel Fourniret a été ensuite détenu à la maison centrale d'Ensisheim en Alsace, puis au centre pénitentiaire de Fresnes.

Alors qu'elle était toujours en stationnement depuis plus de deux ans sur le parking du tribunal, la camionnette blanche de Michel Fourniret a été détruite à la casse en juin 2010 sur ordre du tribunal de Charleville-Mézières.

Le 2 juillet 2010, le juge aux affaires familiales du tribunal de Charleville-Mézières prononce le divorce entre Michel Fourniret et Monique Olivier, après 21 ans de mariage.

Michel Fourniret et Monique Olivier sont encore mis en examen pour les affaires Parrish et Domèce à Paris et pour l'affaire Hamiche à Versailles.

Texte et photo sous licence CC BY-SA 3.0. Contributeurs, ici.

 

">