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Balloon


Au cœur des étendues tibétaines, Drolkar et son mari élèvent des brebis, tout en veillant sur leurs trois fils. En réaction à la politique de l’enfant unique imposée par Pékin, elle s’initie en secret à la contraception, pratique taboue dans cette communauté traditionnelle.

La maigre réserve de préservatifs qu’elle se procure au compte-gouttes devient alors son bien le plus précieux. Le jour où elle surprend ses enfants en train de jouer dehors avec les « ballons » volés sous son oreiller, Drolkar sait aussitôt qu’elle va devoir tout affronter : les reproches des aînés, le poids de la tradition, le regard des hommes. Et une naissance à venir…

Entretien avec le réalisateur, Pema Tseden

Comme vos deux films précédents, Tharlo et Jinpa, Balloon est tiré d'une nouvelle que vous avez écrite. Pouvez-vous expliquer d'où vient cette histoire ?

L'inspiration est née il y a de nombreuses années. Au début des années 2000, j'étudiais à l'Académie du cinéma de Pékin. Un soir d'automne, je marchais dans le quartier et mon regard a croisé un ballon rouge qui volait dans le vent. Il m’a semblé qu’il s’agissait d’une image de départ très forte pour un film, alors j'ai commencé à imaginer d’autres plans qui pourraient s’y rattacher. Cette image clé m’a aussi renvoyé à une autre symbolique du ballon : celle du préservatif. C’est ainsi que le squelette de cette histoire a pris forme dans mon esprit.

Il y a plus d'humour dans ce film que dans vos précédentes réalisations, même s'il n’a jamais été totalement absent. Était-ce intentionnel ou cela s'est produit au cours de la réalisation du film ? 

Je ne me place jamais dans une posture où je me dis consciemment qu’il faudrait que j’ajoute des moments drôles. La présence d’une dimension humoristique est naturelle pour moi, et ces aspects étaient présents dès le processus d'écriture. 

Avez-vous fait des demandes spécifiques à Lü Songye, votre directeur de la photographie avec qui vous collaborez pour la troisième fois, en ce qui concerne l'utilisation de la caméra, de la lumière, des couleurs ?

 Avant le tournage, nous avons choisi un style général, dont le principe de base est que la caméra serait toujours en mouvement, pour souligner l'état de tension des personnages. La dominante de couleur est principalement froide pour correspondre à l'ambiance globale du film. Les intensités lumineuses permettent de souligner la distinction entre les parties dites réelles et les parties plus oniriques. 

Où se déroule exactement le film ? 

Le lycée du Lac Kokonor existe-t-il vraiment ? Toute l’action se passe dans les environs du lac Qinghai. Situer l'histoire là-bas me permettait d’utiliser l’ensemble des décors et des contextes dont j’avais besoin, pour les dimensions les plus réalistes du film comme pour ses passages oniriques. Le collège du Lac Kokonor est fictif, nous avons trouvé un établissement scolaire au moment des repérages et nous l’avons en partie transformé pour le tournage.

Le film a-t-il connu des difficultés avec les autorités ? 

Il y a eu quelques commentaires négatifs mineurs de la part des autorités, j’ai effectué des modifications pour en tenir compte, cela n'a pas causé de dommages majeurs au film lui-même. Dans les festivals où il a été présenté, la réaction des médias - y compris des médias chinois - et du public est très bonne, peut-être même meilleure que celle suscitée par tous mes films précédents.

Propos recueillis par courriel par Jean-Michel Frodon, traduits par Tsemdo Thar. Film sélectionné en 2019 à la Mostra de Venise  et au Toronto International Film Festival.

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