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Accepter n’empêche pas de contester par la suite


Un salarié accepte et signe un avenant formalisant sa rétrogradation disciplinaire. Il conteste par la suite cette sanction et la Cour d’appel lui donne tort au motif qu’il avait accepté cette rétrogradation. Mais la Cour de cassation casse cet arrêt estimant que la Cour d’appel aurait du regarder si la sanction disciplinaire était fondée…

Extrait de l’arrêt de la Cour de cassation, Chambre sociale du 14 avril 2021. Pourvoi n° : 19-12.180.

[…]

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 12 décembre 2018), M. [B] a été engagé le 31 mars 1989, en qualité de responsable atelier imprimerie par le comité central d’entreprise de la SNCF, aux droits duquel est venu le [Personne morale 1].

2. Le 1er mars 2008, il a été promu au poste de responsable du patrimoine régional (coefficient 172) du village de vacances de [Localité 1]. Sa rémunération mensuelle brute moyenne s’élevait à 2 969,70 euros.

3. Le 12 septembre 2014, l’employeur lui a notifié, sous réserve de son acceptation, une rétrogradation disciplinaire au poste de bibliothécaire 1, catégorie employé 3, coefficient minimum de 141, à [Localité 2], pour une rémunération mensuelle brute de 2 235,85 euros. Un avenant à son contrat de travail à durée indéterminée a été régularisé en ce sens par les parties à effet du 6 octobre 2014.

4. M. [B] a saisi la juridiction prud’homale notamment en annulation de cette sanction et rétablissement sous astreinte dans un poste de qualification et rémunération équivalentes à son précédent emploi.

5. Suite à l’annulation de la sanction de rétrogradation, par jugement du 10 mai 2016, M. [B] a été réintégré selon un avenant du 1er juin 2016, dans la catégorie socioprofessionnelle qu’il occupait avant la notification de sa rétrogradation et maintenu avec son accord dans l’emploi de bibliothécaire 1 au sein du service du livre et des bibliothèques, à [Localité 2].

Examen du moyen. Enoncé du moyen

6. Le salarié fait grief à l’arrêt de dire que la sanction notifiée le 12 septembre 2014 était fondée et de le débouter de ses demandes salariales, alors « que le juge, saisi d’un litige, doit contrôler la proportionnalité de la sanction à la faute commise ; que la simple signature d’un avenant portant rétrogradation disciplinaire, ne prive pas le salarié de la faculté de contester la sanction dont il a fait l’objet ; qu’en se bornant à retenir que c’est ’’en parfaite connaissance de cause que M. [R] [B] a signé l’avenant entérinant sa rétrogradation disciplinaire qu’il a ainsi acceptée et qu’il n’est plus fondé à remettre en cause’’, sans examiner, comme elle y était pourtant invitée, si la sanction infligée n’était pas disproportionnée au regard des faits reprochés, la cour d’appel a violé les dispositions de l’article L. 1333-2 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1333-1 et L. 1333-2 du code du travail :

7. Selon ces textes, en cas de litige, le conseil de prud’hommes apprécie la régularité de la procédure suivie et si les faits reprochés au salarié sont de nature à justifier une sanction. Il peut annuler une sanction irrégulière en la forme ou injustifiée ou disproportionnée à la faute commise.

8. L’acceptation par le salarié de la modification du contrat de travail proposée par l’employeur à titre de sanction n’emporte pas renonciation du droit à contester la régularité et le bien-fondé de la sanction.

9. Pour dire que la sanction était fondée et débouter le salarié de ses demandes à ce titre, l’arrêt retient que l’intéressé a retourné l’avenant signé et précédé de la mention « lu et approuvé » dans lequel figurent précisément son nouvel emploi avec ses attributions, son lieu de travail, ses conditions d’hébergement, sa rémunération et la durée du travail, et que c’est donc en parfaite connaissance de cause qu’il a signé l’avenant entérinant sa rétrogradation disciplinaire qu’il a ainsi acceptée et n’est plus fondé à remettre en cause.

10. En statuant ainsi, sans s’assurer, comme elle y était invitée, de la réalité des faits invoqués par l’employeur, de leur caractère fautif et de la proportionnalité de la sanction prononcée à la faute reprochée au salarié, la cour d’appel, qui n’a pas exercé son office, a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

11. La cassation prononcée entraîne, par voie de conséquence, la cassation des chefs de dispositif relatifs aux dépens et aux demandes formées sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il déboute M. [B] de ses demandes de remboursement de frais de déménagement, de rappel d’avantage en nature pendant six mois, de dommages-intérêts pour préjudice moral, et condamne le [Personne morale 1] à payer à M. [B] la somme de 636,72 euros au titre des heures supplémentaires outre celle de 63,67 euros au titre des congés payés afférents, avec intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation, soit le 21 juillet 2015, l’arrêt rendu le 12 décembre 2018, entre les parties, par la cour d’appel de Paris ;

Remet, sauf sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Paris autrement composée ;

Condamne le [Personne morale 1] aux dépens ;

Photo : Pexels - Ekaterina Bolovtsova.

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