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Bail commercial sur une propriété démembrée


L’usufruitier d’une propriété démembrée avait consenti un bail commercial qu’il n’avait ensuite pas renouvelé. Le locataire avait demandé en justice une indemnité d’éviction in solidum à l’usufruitier et au nu-propriétaire. La Cour de cassation a jugé que seul l’usufruitier était redevable de l’indemnité d’éviction au motif qu’ayant, seul, la qualité de bailleur, c’était à lui d’en assumer les obligations, y compris la charge de l’indemnité.

Extrait de l’arrêt de la Cour de cassation, chambre civile, du jeudi 19 décembre 2019. Pourvoi n° : 18-26162.

« LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 595, alinéa 4, du code civil, ensemble l'article L. 145-14 du code du commerce ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Toulouse, 3 octobre 2018), que, le 5 mars 2004, Mme X... veuve V..., usufruitière, et Mme D..., nue-propriétaire, d'un immeuble à usage commercial, ont délivré à M. et Mme T..., preneurs, un refus de renouvellement du bail sans indemnité d'éviction, lequel, par arrêt du 20 février 2008, a été déclaré sans motif grave et légitime ;

Attendu que, pour condamner in solidum Mmes X... veuve V... et D... à payer l'indemnité d'éviction due aux preneurs, l'arrêt retient que Mme V... et Mme D..., laquelle a la qualité de bailleur, ayant, ensemble, fait délivrer un refus de renouvellement, sont toutes les deux redevables de l'indemnité d'éviction dès lors que l'acte de refus de renouvellement excède les pouvoirs du seul usufruitier ;

Attendu qu'en cas de démembrement de propriété, l'usufruitier, qui a la jouissance du bien, ne peut, en application de l'article 595, dernier alinéa, du code civil, consentir un bail commercial ou le renouveler sans le concours du nu-propriétaire (3e Civ., 24 mars 1999, pourvoi n° 97-16.856, Bull. 1999, III, n° 78) ou, à défaut d'accord de ce dernier, qu'avec une autorisation judiciaire, en raison du droit au renouvellement du bail dont bénéficie le preneur même après l'extinction de l'usufruit ;

Qu'en revanche, l'usufruitier a le pouvoir de mettre fin au bail commercial et, par suite, de notifier au preneur, sans le concours du nu-propriétaire, un congé avec refus de renouvellement (3e Civ., 29 janvier 1974, pourvoi n° 72-13.968, Bull. 1974, III, n° 48) ;

Qu'ayant, seul, la qualité de bailleur dont il assume toutes les obligations à l'égard du preneur, l'indemnité d'éviction due en application de l'article L. 145-14 du code de commerce, qui a pour objet de compenser le préjudice causé au preneur par le défaut de renouvellement du bail, est à sa charge ;

Qu'en condamnant la nue-propriétaire, in solidum avec l'usufruitière, alors que l'indemnité d'éviction n'était due que par celle-ci, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen qui est subsidiaire :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne in solidum Mmes X... veuve V... et D... à payer à M. et Mme T... la somme de 134 250 euros à titre d'indemnité principale d'éviction, condamne Mme D... aux dépens en ce compris les frais d'expertise judiciaire ainsi qu'à payer à M. et Mme T... la somme de 3 000 euros pour les frais irrépétibles exposés en cause d'appel, l'arrêt rendu le 3 octobre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi de ces chefs ;

Condamne Mme X... veuve V... à payer à M. et Mme T... la somme de 134 250 euros à titre d'indemnité principale d'éviction ;

Condamne Mme X... veuve V... aux dépens d'appel en ce compris les frais d'expertise judiciaire ;

Rejette la demande d'indemnité formée en appel par M. et Mme T... au titre de l'article 700 du code de procédure civile contre Mme D... ;

Condamne Mme X... veuve V..., M. et Mme T... aux dépens de cassation ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes présentées devant la Cour de cassation ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf décembre deux mille dix-neuf.

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