Des salariés se sont pourvus en cassation car ils avaient été condamnés en appel à verser à leur employeur 10 mois de salaire pour non respect de leur clause de non-concurrence. Ils reprochaient à la Cour d’appel de ne pas avoir vérifié si ce montant était excessif ou non. La Cour de cassation confirme le jugement d’appel car elle a considéré qu’en fixant la pénalité au niveau du montant forfaitaire prévu par le contrat de travail, la Cour d’appel avait par là-même jugé que ce montant n’était pas excessif...
« LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° N 16-13.392 et P 16-13.393 ;
Attendu, selon les arrêts attaqués (Versailles, 7 janvier 2016), que M. F... et Mme W... ont été engagés le 1er mars 2010 par la société Carglass France (la société), respectivement en qualité de directeur général distribution Specials Europe et directrice des achats et ventes distribution Specials Europe ; que leurs contrats de travail prévoyaient une clause de non concurrence, dont la violation était sanctionnée par une pénalité fixée forfaitairement à dix mois du dernier salaire de base brut ; que les salariés ont pris acte de la rupture de leur contrat de travail le 16 novembre 2010, et ont saisi la juridiction prud'homale ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que les salariés font grief aux arrêts de les débouter de leurs demandes de condamnation de l'employeur à leur payer une somme au titre de l'indemnité afférente à l'obligation de non concurrence prévue aux termes des contrats de travail et de leurs demandes tendant à voir juger qu'ils étaient libérés de la clause de non concurrence, alors, selon le moyen :
1°/ que l'indemnité compensatrice de l'interdiction de concurrence est acquise dès lors que l'employeur n'a pas renoncé au bénéfice de celle-ci dans le délai requis ; que le salarié est libéré de son obligation de non concurrence dès lors que l'employeur ne lui verse pas la contrepartie financière prévue par le contrat dès son départ effectif de l'entreprise ; qu'en l'espèce, à la supposer licite, la clause de non concurrence figurant dans le contrat de travail prévoyait que la société se réservait la possibilité de renoncer unilatéralement à l'interdiction de non concurrence à la condition d'en informer le salarié par courrier remis en main propre contre décharge ou adressé par lettre recommandée avec accusé de réception au plus tard le dernier jour du préavis entièrement exécuté ou dans les quinze jours suivant la date de départ effectif en l'absence de préavis applicable ou d'exécution partielle de ce dernier, suite à la notification de la rupture ; qu'il n'était pas contesté que la société n'avait pas renoncé au bénéfice de l'interdiction de concurrence dans le délai requis ; que le salarié faisait valoir que dans la mesure où aucune indemnité ne lui avait été réglée par son employeur lors de la rupture de son contrat de travail, il s'était trouvé libéré de l'obligation de non-concurrence ; qu'en déboutant néanmoins le salarié de sa demande de condamnation de la société à lui payer une somme au titre de l'indemnité afférente à l'obligation de non concurrence prévue aux termes du contrat de travail, sans constater que la société avait régulièrement renoncé à la clause de non-concurrence dans le délai contractuellement prévu, ni qu'elle avait réglé la contrepartie financière dans les délais requis, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1 du code du travail et 1134 du code civil ;
2°/ qu'il incombe à l'employeur qui se prétend libéré du versement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence, de prouver que le salarié n'a pas respecté cette clause ; qu'en l'espèce, en déboutant le salarié de sa demande de condamnation de la société à lui payer une somme au titre de l'indemnité afférente à l'obligation de non concurrence prévue aux termes du contrat de travail, aux motifs que, pour pouvoir être indemnisé au titre de la clause de non-concurrence, encore faut-il que le salarié justifie la respecter, la cour d'appel a renversé la charge de la preuve et violé l'article 1315 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel, qui a constaté que les salariés n'avaient pas respecté leur obligation de non-concurrence, a exactement retenu, sans inverser la charge de la preuve, qu'ils n'étaient pas fondés à demander le paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que les salariés font grief aux arrêts de les condamner à payer à l'employeur une somme au titre de la pénalité forfaitaire prévue à l'article 9 de leur contrat de travail, alors, selon le moyen, que toute partie a droit à un procès équitable, ce qui implique le droit à une décision juridictionnelle motivée, a fortiori lorsqu'elle porte condamnation ; qu'il ne saurait être porté atteinte de manière disproportionnée au droit de toute personne au respect de ses biens ; qu'en l'espèce, le salarié soutenait, en tout état de cause, que la pénalité forfaitaire réclamée par la société, représentant dix mois de rémunération, était excessive et devait être minorée par le juge ; qu'en condamnant le salarié à payer l'intégralité de la pénalité forfaitaire stipulée au contrat, sans rechercher comme elle y était invitée, si cette pénalité n'était pas manifestement excessive, ni exposer les raisons pour lesquelles elle refusait de la modérer à ce titre, la cour d'appel a violé l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 1er du premier protocole additionnel à cette Convention, ensemble l'article 1152 du code civil ;
Mais attendu que le juge qui fixe la pénalité au montant forfaitaire prévu par le contrat juge, par là-même, que son montant n'est pas excessif ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur le premier moyen et sur les première à septième branches du troisième moyen ci-après annexés, qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne M. F... et Mme W... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit septembre deux mille dix-neuf. »
Photo : Sang Hyun Cho - Pixabay.
Pour vous accompagner juridiquement, des avocats :
75001 - CABINET BOUGARDIER http://www.credit-hypothecaire-paris.com