Première année

Antoine entame sa première année de médecine pour la troisième fois. Benjamin arrive directement du lycée, mais il réalise rapidement que cette année ne sera pas une promenade de santé. Dans un environnement compétitif violent, avec des journées de cours ardues et des nuits dédiées aux révisions plutôt qu'à la fête, les deux étudiants devront s’acharner et trouver un juste équilibre entre les épreuves d’aujourd’hui et les espérances de demain...

Après Hippocrate (2014) et Médecin de campagne (2016), vous racontez à nouveau dans Première année une histoire en lien avec l’univers de la médecine. Comment ce nouveau film est-il né ?
La naissance d’un film, c’est toujours un cheminement très particulier. J’avais en moi, depuis longtemps, l’envie de faire un film sur l’université, sur l’énergie des étudiants au travail. J’avais dans la tête une vision très cinématographique de ce que pourrait donner un film là-dessus. Ça devait s’appeler « PanthéonSorbonne ». On était loin de la médecine.

Mais l’idée de Première année a pris vraiment forme lors de la tournée des avant-premières de Médecin de campagne. Forcément, durant les débats avec le public, on n’arrêtait pas de me demander mon avis sur les raisons du manque de médecins dans les campagnes. Donc au fil de la tournée, j’en viens à la conclusion suivante : peut-être que le problème, ce ne sont pas les jeunes médecins, mais le système qui les forme. Là, tout d’un coup, j’ai l’impression que quelque chose se débloque. Parce que les études de médecine, je connais. Je sais ce qui ce marche, ce qui ne marche pas. Et j’ai l’intuition que ce que j’ai vécu, moi, en tant qu’étudiant, peut être le symptôme d’un problème plus vaste.  

Le concours de médecine est donc plutôt un prétexte pour parler du système éducatif ?
Contrairement à mes deux précédents films, Première année n’est pas directement un film sur l’exercice de la médecine. Ce qui m’intéresse ici, c’est la jeunesse et la façon dont le système ne fait rien pour les aider et les mettre en valeur. Je voulais raconter la violence et l’épreuve que sont ces grands concours qui déterminent toute une vie.

Cette première année de médecine, complètement folle où on ne vit plus que pour quelques heures dans un centre d’examen, je l’ai vécue. La médecine n’est pas, ici, un prétexte mais plutôt un « contexte », une porte d’entrée qui doit permettre aux spectateurs de comprendre très vite le but des personnages. Un moyen de parler de cette « hyper compétition » dans laquelle notre époque nous oblige à vivre. On sort à peine du lycée et déjà le système des études supérieures nous met en compétition, nous classe, nous oppose. À quel moment on a fini par trouver ça normal ? Est-ce que ce système marche vraiment ? Par ce film, je voulais faire un constat et soulever ces questions.  

Au cœur de vos films, Il y a toujours eu des duos souvent antagonistes qui finissaient par se réconcilier. Dans Première Année, au contraire, Benjamin et Antoine deviennent très vite amis…
C’est aussi un film sur l’amitié. C’était important de montrer qu’au milieu de cette épreuve, quelque chose de beau pouvait se créer. Le coeur du film c’est, au fond, la relation entre Benjamin et Antoine. Le maitre et l’élève. Sauf que les choses évoluent. Et pas forcément dans le sens où on l’attend. Il fallait qu’à l’écran, leur complicité soit évidente et immédiate. Ils se soutiennent, s’épaulent, vivent ensemble quelque chose de fort.

Mais la compétition détruit tout. Il faut qu’on comprenne pourquoi Antoine craque et pourquoi la pression de ce système l’oblige, quelque part, à tout gâcher. Il y a dans les duos, et surtout dans l’amitié, quelque chose de romanesque. On est inséparable mais on finit toujours par se séparer. Pourquoi ? Comment ? Qu’est-ce qui a tout gâché ? À l’écriture, c’est mon moteur. Le duo devait être capable de surmonter ça. Ce n’est pas dans mon tempérament de voir tout en noir.

La réconciliation m’intéresse souvent plus que la dispute. C’est autant un film sur l’amitié qu’un film sur l’entraide. Une sorte d’antidote à ce monde hyper compétitif dans lequel on nous fait vivre. Peut-être que certains verront dans la décision finale de Benjamin quelque chose d’absurde ou de complétement irréaliste. C’est un geste d’amitié, un vrai, autant qu’une  décision très personnelle. Dans la complicité, les moments de partage mais aussi de tension de ce duo, il y a tout le sujet du film et tout mon cinéma. Un mélange de réalisme et de romanesque. 

Comédie dramatique de Thomas Lilti. Nominé au festival francophone d'Angoulême 2018. 4,2 étoiles AlloCiné.


Voir toutes les newsletters :
www.haoui.com
Pour les professionnels : HaOui.fr