Leave no trace

Tom a 15 ans. Elle habite clandestinement avec son père dans la forêt qui borde Portland, Oregon. Limitant au maximum leurs contacts avec le monde moderne, ils forment une famille atypique et fusionnelle. Expulsés soudainement de leur refuge, les deux solitaires se voient offrir un toit, une scolarité et un travail. Alors que son père éprouve des difficultés à s'adapter, Tom découvre avec curiosité cette nouvelle vie. Le temps est-il venu pour elle de choisir entre l’amour filial et ce monde qui l'appelle ?... 

Note de production
Leave no trace est le nouveau film de Debra Granik (Winter's Bone, Stray Dog, Down To The Bone).

L'exploration mystérieuse et fascinante d'une existence vécue à la marge. Le film est adapté du roman "L’abandon" de Peter Rock.

Que ce soit dans son premier film, Down to the Bone, primé à Sundance, ou dans son documentaire, Stray Dog, Debra Granik a toujours eu à cœur d'explorer les vies des outsiders qui se battent pour garder leur indépendance. La troisième réalisation de Debra Granik ne fait pas exception à la règle, puisqu'elle est basée dans les chemins de traverse du Pacific Northwest, là où le roman, tiré d'une histoire vraie, de Peter Rock était déjà situé.

L'histoire vraie sur laquelle est basé Leave no trace est presque devenue une légende à Portland. Celle d'une fille et de son père, découverts alors qu'ils vivaient depuis 4 ans dans la réserve naturelle qui borde la banlieue de la ville. Ils ne s'y aventuraient que pour récupérer la pension d'invalidité du père et y acheter ce qu'ils ne pouvaient pas faire pousser.

L'adolescente était en pleine santé, ne manquait de rien affectivement et son niveau scolaire était bien supérieur à celui d'autres enfants de son âge. Après avoir été placés dans un hara où le père pouvait travailler, le duo a disparu dans la nature. Peter Rock, intrigué par ce mystère, en a tiré une histoire fictionnelle qui remplit les trous de cette histoire, en imaginant des détails impossibles à connaître.

Ce sont les productrices Linda Reisman et Anne Harrison qui ont proposé ce roman à Debra Granik et sa collaboratrice de longue date, Anne Rossellini. L'histoire nous emmène dans les forêts et les enclaves rurales isolées de l'Oregon et de l'État de Washington. Un environnement qui a fasciné Granik : "Les films qui se situent dans une région spécifique ont une façon unique de nous parler et cette histoire est inextricable du Pacific Northwest. Il était facile de se projeter dans le lieu, d'imaginer le fond de ce voyage, et qu'il serait extrêmement photogénique. En plus d'une histoire intéressante à raconter."

Au moment où nous rencontrons ce duo père-fille, ils vivent dans un campement rudimentaire, utilisant leurs talents de survie pour se construire une vie presque entièrement en dehors des radars, invisible du monde extérieur. "Will et Tom ont un parcours très différent de ce que j'ai pu connaitre, ou vivre. Qui peut vivre sur un territoire public et rester indétectable pendant si longtemps ? Le livre de Peter détaillait pas mal de comportements très spécifiques que le père et la fille devaient avoir adopté, et ce qu'il leur fallait savoir pour vivre dans les bois. Cela nous a amené à une grande phase de recherche et de repérage, parce qu'il fallait les comprendre pour savoir comment filmer leur existence."

Will et Tom forment un duo des plus classiques dans la narration. Granik est allée chercher du côté de Shakespeare et des personnages de Prospero et Miranda pour les approcher au plus près. "Je suis très attirée par la façon dont les classiques content les relations humaines, la façon dont les gens se complètent. Les personnages de cette histoire prennent soin l'un de l'autre, et leurs pensées se croisent pour grandir dans la tête l'un de l'autre. Dans cette relation parent-enfant, parfois Tom doit prendre le rôle de l'adulte. Parce que son père a ses propres problèmes psychiatriques. Son rôle à lui c'est de tenter de lui apprendre tout ce qu'il sait d'utile".

La structure du film permet à Granik de conter cette histoire sans figure de "méchant". "Je veux parler à ceux qui aiment ces histoires, et ceux qui les créent, explique-t-elle. "Il y a 4 ou 5 thèmes majeurs dans la littérature et le cinéma, et nous les connaissons tous. Aujourd'hui il semble que ceux où les menaces sont directes, où les crimes ont des enjeux énormes, sont ceux que l'on apprécie le plus. Mais je pense que notre goût pour les histoires qui n'ont pas forcément les mêmes enjeux "catastrophe" peuvent résonner fortement en nous. Tom et son père cherchent un endroit où vivre. Beaucoup les aident dans leurs parcours. Mais ça reste un combat pour eux, parce qu'ils choisissent de vivre différemment." Les forces antagonistes ne sont pas personnifiées par un personnage "méchant", mais par quelque chose de plus impalpable : la pression de se conformer à la norme sociale.

"Dans cette histoire, l'enjeu, c'est la survie. Où vont ceux qui ne rentrent pas dans les clous de notre culture "mainstream" ? Comment peuvent-ils s'en sortir ? Les enjeux sont aussi liés à la relation complexe entre Tom et son père. Après leur expulsion du parc, où ils avaient un mode de communication et de structure qui leur convenait, ils sont plongés dans un autre monde qui les oblige à en apprendre plus l'un sur l'autre. Tom est curieuse, une vraie Pandore, et Will sent que cette curiosité l'éloigne de lui, ce qui les séparera. C'est quelque chose d'universel et chacun a sa façon de l'aborder puisque grandir peut vouloir dire se séparer de celui ou celle auprès de qui on a grandi. Ces enjeux sont énormes : cela peut être extrêmement difficile."

Avec le personnage du père, Granik revient à un sujet qui lui est cher et qu'elle a déjà exploré dans ses œuvres précédentes : "Je trouve les vies de vétérans très intéressantes, en particulier la façon dont la guerre affecte leurs vies à leur retour. Cela fait longtemps que les guerres en Irak et en Afghanistan ont commencé, les civils commencent à oublier. Mais les vétérans ne le peuvent pas. Dans le livre, le père était un vétéran, mais quand je suis arrivée à Portland, c'est quelque chose que j'ai pu ajouter en me basant sur les expériences de vétérans que j'ai rencontrés."

Drame de Debra Granik. 5 nominations au festival du cinéma américain de Deauvile 2018. 4 nominations ç la qsuinzaine des réalisateurs, Cannes 2018. 4 étoiles AlloCine.


Voir toutes les newsletters :
www.haoui.com
Pour les professionnels : HaOui.fr