La fête est finie

C’est l’histoire d’une renaissance, celle de Céleste et Sihem. Arrivées le même jour dans un centre de désintoxication, elles vont sceller une amitié indestructible. Celle-ci sera autant une force qu’un obstacle lorsque, virées du centre, elles se retrouvent livrées à elles-mêmes, à l’épreuve du monde réel et de ses tentations. Le vrai combat commence alors, celui de l’abstinence et de la liberté, celui vers la vie. 

 

Entretien avec Marie Garel-Weiss, la réalisatrice 

L’amitié qui unit Céleste et Sihem est forte mais ambivalente car associée à une forme de dépendance aux yeux du personnel médical et social qui les entoure
Cette idée a été un peu le pivot de l’écriture, avec ce thérapeute qui dit à Céleste et Sihem : « Si vous restez ensemble, vous allez rechuter ». Cette réplique est un élément narratif majeur car cet homme a raison et… il a tort. Nous avions envie que les événements contredisent les propos du thérapeute mais qu’à chaque fois qu’ils lui donnent apparemment raison, on le vive comme une petite torture. De par son âge et son passé, Sihem pourrait être une grande sœur ou une mère de substitution pour Céleste mais les places ne sont jamais aussi clairement définies, tout est toujours en mouvement. Dans les premières versions du scénario, Sihem était le personnage au caractère fort et Céleste était plus fragile, en creux. Sans doute parce que je m’étais projetée en elle et que je ne l’assumais pas totalement. Au fil de l’écriture, Céleste est devenue plus explosive, indomptable, comique aussi parfois. A l’inverse Sihem s’est complexifiée, elle semble solide mais vacille alors que Céleste parait inconséquente mais finit par prendre sa vie en main. Nous voulions que rien ne soit joué d’avance.

On découvre à leurs côtés les règles de fonctionnement du centre de désintoxication où elles arrivent
Je me suis inspirée du centre APTE, ouvert notamment par Kate Barry. Ce centre m’a sauvé la vie à un moment très critique. Il privilégie la thérapie de groupe, l’identification entre patients, l’entraide, peu importe ses addictions ou son histoire.  

Sihem veut s’en sortir, elle incarne la volonté. Céleste est moins déterminée mais elle est habitée par une force naturelle
Quand tu es toxico, tu as une volonté d’acier, une volonté déchainée ! Tu es capable de sortir par moins vingt, tout nu sous la neige, pour aller chercher de la came. Ce n’est pas une question de volonté mais au contraire presque de lâcher prise. Céleste le dit à la fin : « Je ne me bats plus ». L’entourage et la société fonctionnent beaucoup au chantage au mérite parce qu’ils ont peur et veulent des solutions rapides : si tu fais des choses conformes, si tu as un boulot, un toit, un mec, tu vas t’en sortir.  

Le diagramme qui explique que la famille se construit autour de l’élément dépendant est très éclairant…
L’entourage a lui aussi ses responsabilités. En tout cas, il doit s’interroger, notamment sur ses motivations. Etre considéré comme une personne totalement dévouée à son enfant dépendant ou le chevalier servant d’une fille défoncée, avec qui vous pouvez faire tout ce que vous voulez, dans tous les domaines, ça peut aussi être une source de bénéfices dont on devient dépendant à sa manière…

Le film interroge aussi l’après chaos, la résilience...
Ce sont des moments très intenses, l’envie de s’en sortir et la peur de rechuter se mêlent. C’est ce que Sihem et Céleste expérimentent, parfois avec fracas. Il y a un risque à prendre d’abandonner ce qui détruit, mais qui est familier, pour l’inconnu. Ça ne marche pas à tous les coups, alors quand la petite lueur s’allume, c’est une explosion de vie.

La scène entre Sihem et le garçon est un peu désenchantée… mais aussi romantique
Oui, le garçon est démuni face à Sihem, il en tombe amoureux. Sihem et Céleste sont censées avoir quelque chose en moins que ces jeunes bien sous tous rapports mais finalement, sans le savoir, elles ont une force en plus : celle de la différence, celle de ceux qui ont souffert.

Drame français de Rachel Garel-Weiss. Prix du public et de la meilleure interprétation féméinine au festival 2017 des jeunes réalisateurs de St Jean de Luz. 4,1 étoiles AlloCiné.


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