Licenciement économique : attention aux motivations

Une société exploite en location-gérance la station service d’un groupe pétrolier. Celui-ci décide de remplacer le pont mécanique de la station par un espace de lavage automatique. Le salarié affecté aux réparations est donc licencié sur un motif économique du fait de la cessation de l’activité « réparation » imposée par un tiers. Mais la Cour de cassation n’est pas de cet avis. La cessation d’activité n’étant que partielle, l’employeur, pour justifier le licenciement,  aurait dû chercher à se placer sur le terrain des difficultés économiques, des mutations technologiques ou de la réorganisation nécessaire à la sauvegarde de la compétitivité... 

Extrait de l’arrêt de la Cour de cassation, civile, Chambre sociale du 11 avril 2018.
Pourvoi n° 16-27891. 

« LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : 

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. Y... a été engagé par la société Blot, aux droits de laquelle se trouve la société Charpenet qui exploite une station-service dans le cadre d'un contrat de location gérance régularisé avec la société Total, en qualité de chef d'équipe ; qu'il occupait en dernier lieu les fonctions de gestion de la baie mécanique et de l'activité entretien et réparation ; qu'il a été licencié pour motif économique le 9 juillet 2011 ; 

Sur le premier moyen : 

Attendu que le salarié fait grief à l'arrêt de le débouter de sa demande tendant à voir juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner la société Charpenet au paiement de dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et frais de déménagement alors, selon le moyen, qu'à défaut d'emploi de même catégorie ou équivalent, assorti d'une rémunération équivalente, le reclassement doit être recherché sur les emplois d'une catégorie inférieure à celui occupé par le salarié ; qu'en retenant que la société Charpenet avait satisfait à son obligation de reclassement aux termes de motifs dont il ne résulte ni qu'elle aurait cherché à reclasser M. Y... sur un emploi de catégorie inférieure au sien, ni qu'un tel reclassement était impossible, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1233-4 du code du travail ; 

Mais attendu que la cour d'appel relève que la société Charpenet n'employait, au moment du licenciement, que dix salariés, dont neuf à temps partiel, en plus de M. Y... et qu'il n'existait aucun poste disponible susceptible d'être offert à l'intéressé, faisant ainsi ressortir l'absence de toute possibilité de reclassement, y compris sur un poste de catégorie inférieure à celui occupé par le salarié ; que le moyen n'est pas fondé ; 

Mais sur le second moyen, pris en sa seconde branche : 

Vu l'article L. 1233-3 du code du travail ; 

Attendu que pour dire le licenciement du salarié fondé sur un motif économique et le débouter de ses demandes, l'arrêt retient que la cessation de l'activité à laquelle le salarié était affecté, imposée à l'employeur par le groupe lui ayant consenti un contrat de location-gérance, et la suppression consécutive de son poste de travail caractérisent le motif économique de son licenciement ; 

Qu'en statuant ainsi alors que seule une cessation complète de l'activité de l'employeur peut constituer en elle-même une cause économique de licenciement, quand elle n'est pas due à une faute ou à une légèreté blâmable de ce dernier et qu'une cessation partielle de l'activité de l'entreprise ne justifie un licenciement économique qu'en cas de difficultés économiques, de mutation technologique ou de réorganisation de l'entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité, peu important que la cessation d'une activité de l'entreprise résulte de la décision d'un tiers, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; 

PAR CES MOTIFS : 

CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il déboute M. Y... de ses demandes au titre de l'obligation de formation et au titre de la perte de chance de trouver un emploi, l'arrêt rendu le 20 octobre 2016, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur les autres points restant en litige, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ; 

Condamne la société Charpenet aux dépens ; 

Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer la somme de 3 000 euros à M. Y... ; 

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; 

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze avril deux mille dix-huit. »

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