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L’échange des princesses 1721. Une idée audacieuse germe dans la tête de Philippe d’Orléans, Régent de France… Louis XV, 11 ans, va bientôt devenir Roi et un échange de princesses permettrait de consolider la paix avec l’Espagne, après des années de guerre qui ont laissé les deux royaumes exsangues. Il marie donc sa fille, Mlle de Montpensier, 12 ans, à l’héritier du trône d’Espagne, et Louis XV doit épouser l’Infante d’Espagne, Anna Maria Victoria, âgée de 4 ans. Mais l’entrée précipitée dans la cour des Grands de ces jeunes princesses, sacrifiées sur l’autel des jeux de pouvoirs, aura raison de leur insouciance… C’est la première fois que vous mettez en scène le livre de quelqu’un d’autre. Pourquoi avez-vous eu envie d’adapter L’Echange des princesses de Chantal Thomas ? Tout cela n’est pas très loin de mon univers habituel, largement consacré à la manipulation politique. Ces gamins aussi sont littéralement manipulés, par des adultes qui eux-mêmes ne sont pas vraiment des adultes. Les jeunes aristocrates princiers étaient élevés dans la grandeur tout en étant maintenus dans un statut assez infantile : celui de rester des enfants qui jouent à la guerre parce qu’ils n’ont rien d’autre à faire. Ce qui explique en partie le déclin de la monarchie. Dans le film, on voit bien qu’elle est, déjà très agonisante. D’emblée, votre film s’ouvre sur la fin d’un monde, avec l’omniprésence de la mort, dans un Versailles en ruine. Cette menace constante de la mort explique aussi l’importance de la religion, qui offrait un lien entre la vie éternelle et cette vie terrestre si éphémère... Quand Philippe V dit à l’infante que la vie et la mort ne sont qu’une seule et même chose, c’est un concept qui est à la base de la religion, pour rassurer les vivants face à la mort. J’avais envie de montrer cette terreur devant la prise de conscience qu’on est mortel, étape constitutive de l’enfance. En particulier chez Louis XV... Une phrase qu’il dit au Régent résume la complexité de son rapport à la fonction de roi : « A la veille de notre majorité, nous ordonnons de ne pas dormir seul. » Le jeune Louis XV est maladroit et indécis. Dès qu’on lui demande de prendre des décisions, il se méfie, scrute les regards, répond à peine. Je voulais montrer cette facette du pouvoir royal, cette difficulté d’occuper une telle charge pour cet enfant. Louis XV est dépassé par son rôle mais il l’assume aussi, parfois même avec dureté. Quand il est dans la barque avec l’infante et lui dit : « Madame, on ne vous voit pas grandir », d’un seul coup, il est dans la fonction de reproduction, au sens royal du terme. L’infante est un personnage à la force d’âme étonnante. Ces enfants sont embarqués dans un complot cynique mais ils se débattent avec noblesse, assument leur destin... C’est toute la question du déterminisme : dans quelle mesure peut-on s’exonérer de son éducation et s’extraire de là où l’on a été plongé dès l’enfance ? Le fait de s’opposer dramatiquement à son enfance, c’est déjà l’intégrer. S’en sortir est donc extrêmement compliqué pour ces enfants, notamment pour Louis XV, qui n’a qu’une solution : devenir roi puisqu’il est né pour être roi. Il l’accepte et le devient. Quant au peuple, il reste totalement hors-champs, hormis cette échappée dans la forêt, où la princesse croise le regard d’une jeune paysanne... Pour montrer cette aristocratie en déclin, pas la peine de rajouter l’image un peu clichée des sans culottes en guenilles, la consanguinité dans laquelle ils vivent suffit ! Cette aristocratie s’autodétruit dans des guerres tribales : la tribu des Bourbons contre celle des Orléans. Drame historique de Marc Dugain. 3,9 étoiles AlloCiné. Voir toutes les newsletters : www.haoui.com Pour les professionnels : HaOui.fr |