Le statut des cheminots dans le viseur

Le rapport Spinetta, commandé par le gouvernement, met en lumière les faiblesses de la SNCF à l’approche de l’ouverture à la concurrence de ses lignes TGV dès 2020. Selon lui, l’ouverture à la concurrence doit s’inscrire dans une perspective de long terme de reconquête de la SNCF. Au fil des ans, c’est à dire au fur et à mesure que le nombre d’agents statutaires se réduira, et que les dispositions conventionnelles de la SNCF seront remplacées par d’autres accords, l’entrée de nouveaux opérateurs mettra en lumière un écart de compétitivité important entre la SNCF et ses concurrents. Ne pas prendre en compte cet écart qui grandira au fil du temps serait condamner la SNCF à disparaître des services régionaux et à être gravement pénalisée pour ses autres activités...

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L’expérience du fret a montré que les causes les plus importantes de l’écart de compétitivité étaient :

- La sur-cotisation T2 qui finance les avantages du régime spécial de retraite (supérieure à 12 %) ;
- La réglementation spécifique du travail avec deux sujets :
. La durée du travail et son organisation (RH 77) ; c’est maintenant un accord collectif sur lequel l’encre est à peine sèche ;
. Le dictionnaire des filières et les contenus d’emploi dont la jurisprudence considère qu’il s’agit de dispositions à valeur réglementaire, même si elles sont totalement à la main de la SNCF ;

- Les classifications et les déroulements de carrière inscrits dans le statut qui génèrent un GVT supérieur à 2 % ;
- Les frais de structure.

En outre, le niveau des difficultés rencontrées pour ajuster l’emploi au volume d’activité a incontestablement alourdi les coûts et généré des pertes de compétitivité.

Il est difficile de procéder à une évaluation exacte de l’écart de compétitivité (sauf sur le fret) pour des activités qui aujourd’hui encore sont dans des situations de monopole. On peut néanmoins considérer que la situation statutaire de la SNCF, les frais de structure et les excédents de personnel génèrent un écart potentiel de compétitivité d’au moins 30% par rapport aux règles du marché (convention collective, grilles salariales, définition des emplois). 

Plusieurs scénarios complémentaires peuvent à cet égard être examinés.

En premier lieu, une évolution des règles statutaires permettant à la SNCF plus « d’agilité » dans un monde concurrentiel en transformation rapide.

Ainsi, si elle veut rester dans le marché et ne pas subir un déclin progressif de ses activités, la SNCF devra affronter résolument le problème de sa compétitivité en s’attaquant à la polyvalence de ses emplois, à l’assouplissement de ses organisations du travail et du temps de travail, à son système de rémunération. Sur ces sujets, il serait inéquitable de ne pas traiter la SNCF de la même façon que les nouveaux opérateurs qui se verront transférer ces règles sous le régime des accords collectifs, des usages et des décisions unilatérales règles qui pourront donc évoluer conformément à la jurisprudence.

D’ores et déjà, l’entreprise peut par la voie de la concertation préalable faire évoluer ces règles dans les conditions posées par la loi de 2014. Elle peut aussi avancer par la voie de la négociation collective. L’ensemble des procédures conventionnelles de droit privé trouverait à s’appliquer mettant les acteurs face à leur responsabilité respective, et assurant aux salariés les protections des accords collectifs.

Pour donner plus d’autonomie d’action à l’entreprise, une étape supplémentaire pourrait être franchie, la loi précisant que désormais les modifications des règles d’emploi ne sont plus soumises au régime de l’approbation publique et qu’elles n’ont plus un caractère réglementaire.

C’est une évolution importante qui permettrait à l’entreprise de sortir d’une forme de tripartisme social générateur de rigidités. Des premiers pas significatifs ont été faits dans cette direction, notamment par la modification du rôle de la commission mixte du statut. Il n’en reste pas moins que la puissance publique est omniprésente dans la construction sociale de la SNCF :

son rôle évolue au gré des rapports de force et il est rarement purement notarial. Sortir la SNCF de ce tripartisme, c’est lui donner une forme d’émancipation sociale et de renforcement de sa responsabilité qui lui permettra de « courir dans la même cour » que ses compétiteurs. Elle le pouvait déjà mais sous le regard tutélaire de l’Etat. Elle doit désormais pouvoir le faire sous sa seule responsabilité. Il faut parachever le mouvement engagé avec la réforme de la commission mixte du statut.

Recommandation 37 : Dans le cadre de l’ouverture à la concurrence, la SNCF doit réduire son écart de compétitivité avec le marché. Pour cela elle dispose dans le cadre des mécanismes internes de concertation de la faculté de faire évoluer les dispositions statutaires. La mission recommande qu’elle le fasse en priorité sur l’évolution des métiers et des compétences dans le cadre d’une gestion prévisionnelle de long terme lui permettant d’anticiper les transformations technologiques et celles de son environnement économique. Le principe d’approbation par l’Etat de certaines décisions  sociales doit être supprimé pour donner à l’entreprise et à ses partenaires sociaux l’entière responsabilité de l’évolution de son cadre social.

En outre, il y a lieu de se poser la question de l’unité sociale de l’entreprise réaffirmée par la loi de 2014 et qui conduit à une centralisation de quasiment toutes les évolutions sociales envisageables à la suite des concertations normales. Dans des domaines où le contexte économique de l’activité d’une branche surdétermine les conditions de son exploitation, il pourrait être utile socialement et économiquement efficace de permettre une certaine décentralisation des transformations sociales. Ainsi, comme on vient de le dire, en est-il de l’évolution des métiers, de leur contenu et des prospectives qui peuvent être réalisées à cet égard. Considérer par exemple les métiers de l’infrastructure en méconnaissant les changements profonds que connaissent ces emplois chez les sous-traitants et plus généralement dans le secteur des travaux publics, est une grave erreur. La SNCF ne peut ignorer ce qui se passe autour d’elle dans ses différents métiers. Une approche par branche d’activité, dans le cadre de concertations préalables, doit être organisée.

En second lieu, et en dehors de la question du régime spécial de retraite qui fait par ailleurs l’objet de travaux spécifiques, la question de la poursuite de recrutements dans le cadre du statut actuel du personnel doit être posée. Et un régime conventionnel, dont la construction est à parachever, pourrait constituer un cadre d’accueil pour les nouveaux embauchés

Certains des experts cités au début de ce rapport considèrent que la SNCF doit pouvoir recruter les nouveaux entrants sous un régime conventionnel. Il faut à cet égard rappeler quelques chiffres :

- En 2005, près de 160 000 cheminots étaient au statut, dix ans après ils sont à peu près 130 000 ; dans le même temps, les contractuels sont passés de 6 500 à près de 15 000 ;

- Sur les 15 dernières années, le départ en retraite d’agents au statut a été en moyenne de 6 à 8 000 par an ; le groupe public ferroviaire a continué de recruter au statut entre 3 500 et 4 500 personnes par an sur les quinze dernières années.

La loi du 4 août 2014 dans son article 1 ouvrait la possibilité de faire évoluer cet équilibre en indiquant que les trois EPIC pouvaient employer des salariés sous le régime des conventions collectives. Ce texte précisait même qu’en l’absence d’accord, de nouvelles modalités de recrutement pouvaient être fixées par le Conseil de Surveillance de la SNCF.

L’opposition des principales organisations syndicales de cheminots – y voyant une remise en cause de la règle d’or d’embauche au statut - a conduit à abandonner cette possibilité et à renforcer les modalités actuelles de recrutement à travers un accord conclu avec les deux organisations syndicales majoritaires. Dans la situation actuelle, le recrutement « au cadre permanent » reste la règle et l’embauche de contractuels l’exception.

Pour autant, la base législative créée en 2014 est un socle qui, le moment venu, pourrait permettre de nouvelles évolutions sans recourir à un nouveau texte législatif et réglementaire.

La SNCF a la possibilité de prendre l’initiative pour autant qu’elle soit seule maîtresse de ses  décisions.

La question de l’embauche au statut est un sujet récurrent indissociable à terme de la recherche d’un accroissement de la compétitivité de l’entreprise. Décider par une disposition législative  d’arrêter l’embauche au statut pourrait être la solution qui, sans rompre le contrat moral passé avec les cheminots présents aujourd’hui dans l’entreprise, irait dans cette direction. 

Il ne s’agit évidemment pas de remettre en cause les droits individuels des agents statutaires, mais de ne plus alimenter un régime qui pèse sur les coûts de l’entreprise, sur son dynamisme et sur  l’emploi. Ne pas évoluer, c’est se condamner à voir disparaître progressivement les embauches, celles au statut comme les autres. Vis-à-vis du statut, les positions dogmatiques ne sont pas de mise.

Le statut a beaucoup apporté à la SNCF en lui permettant tout au long de son histoire de s’adapter à la modernisation de l’entreprise et aux changements de la Société. Aujourd’hui, les évolutions des compétences, l’automatisation de certaines tâches, la digitalisation, les formes nouvelles d’organisation du travail appellent dans toutes les entreprises une plus grande rapidité d’évolution difficilement concevable dans le cadre d’un statut qui fige un cadre organisationnel et social préjudiciable aux agents eux-mêmes.

Il est à noter que d’autres entreprises (La Poste, Orange) se sont engagées dans cette voie. Elles ont inscrit cette transformation dans un vaste projet de modernisation sociale au profit de leurs salariés, du développement des compétences. Elles ont su par la voie de la négociation éviter de créer des régimes à deux vitesses qui auraient généré un sentiment d’iniquité.

Recommandation 38 : Dans le cadre de la loi, il pourrait être mis un terme au recrutement au statut des nouveaux embauchés, en préservant strictement les droits individuels des personnels en bénéficiant. Les nouveaux recrutements devront s’opérer, pour toutes les catégories de personnel, dans un cadre conventionnel à parachever.

En troisième lieu, l’entreprise doit supporter des excédents d’effectifs nés de replis d’activités (comme dans le fret), d’actions de modernisation, d’introduction de nouvelles technologies, de réorganisations, tous changements que les entreprises industrielles et de service sont appelées à prendre en compte à travers une adaptation rapide de leurs effectifs.

Malgré les considérables efforts de reclassements internes qu’elle a réalisés, l’entreprise subit le coût d’excédents d’effectifs qu’elle gère tant bien que mal, notamment à travers des structures dédiées de reclassement (EIM), le statut lui interdisant de recourir à des procédures de ruptures collectives. La SNCF doit pouvoir recourir pendant deux ans à la procédure des plans de départs volontaires. Elle devrait pour cela respecter les règles prévues par le code du travail (notamment en matière de consultations des instances). Le volume des effectifs concernés pourrait sans doute être proche de 5.000 personnes (chiffre estimé à partir des effectifs des EIM et des sureffectifs supportés par certaines activités), ce qui pourrait représenter un gain de compétitivité rapide. Des efforts de reclassement externes et de formation devraient accompagner cette action.

Recommandation 39 : Autoriser la SNCF à recourir pendant deux ans à la procédure des plans de départs volontaires, dans le respect des règles prévues par le code du travail.

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