Le reproche au salarié d’avoir saisi les prud’hommes implique nécessairement la nullité du licenciement

Un salarié avait saisi les prud’hommes pour demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail. L’employeur après convocation à un entretien préalable au licenciement, avait notifié la rupture du contrat de travail pour faute lourde notamment pour avoir volontairement détruit des données dans le système comptable de la société. Mais dans cette même lettre de licenciement était évoqué l’action en résiliation judiciaire intentée par le salarié. C’est sur ce dernier élément que la Cour de cassation s’appuie pour déclarer le licenciement nul en raison de l’atteinte portée au droit d’agir en justice, qui constitue une liberté fondamentale...

Extrait de l'arrêt de la Cour de cassation, civile, Chambre sociale du 8 février 2017.
Pourvoi n° 15-28085. 

« LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant : 

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été engagé le 4 janvier 2010, par la société Renk France, en qualité de contrôleur de gestion ; que, le 15 janvier 2013, il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail ; qu'il a été licencié pour faute lourde par lettre du 8 février 2013 ; 

Sur les premier et deuxième moyens, ci-après annexés : 

Attendu qu'il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur les moyens annexés qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ; 

Mais sur le troisième moyen : 

Vu l'article L. 1121-1 du code du travail, ensemble l'article 6, § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales ; 

Attendu que pour débouter le salarié de sa demande en nullité du licenciement, l'arrêt retient que, selon la lettre de licenciement, la décision de rupture du contrat de travail ne repose pas sur le seul motif qu'il a pris l'initiative de saisir le conseil de prud'hommes ; 

Qu'en statuant ainsi, alors que ce grief, s'il figure en tant que tel dans la lettre de licenciement, est constitutif d'une atteinte à une liberté fondamentale et entraîne à lui seul la nullité du licenciement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ; 

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les quatrième et cinquième moyens : 

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute le salarié de ses demandes tendant à la nullité de son licenciement et à sa réintégration au sein de la société Renk France ainsi que de ses demandes en paiement de dommages-intérêts pour licenciement nul et pour préjudice moral et de sa demande d'indemnité de congés payés, l'arrêt rendu le 15 octobre 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ; 

Laisse à chaque partie la charge de ses dépens ; 

Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ; 

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ; 

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille dix-sept. »

Photo : Thomas Lammeyer - Fotolia.com.


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