La traçabilité, en savoir plus

La traçabilité désigne la situation où l'on dispose de l'information nécessaire et suffisante pour connaître (éventuellement de façon rétrospective) la composition d'un matériau ou d'un produit tout au long de sa chaîne de production et de distribution. Et ce, en quelque endroit que ce soit, et depuis l'origine première du produit jusqu'à sa fin de vie, soit comme le dit l'adage :« du berceau jusqu'à la tombe » pour les produits industriels, ou « de la fourche à la fourchette » pour un produit alimentaire. Les règles et bonnes pratiques en matière de traçabilité sont déterminées par des normes et/ou des organismes de Contrôle nationaux ou internationaux. Ainsi en Europe, la traçabilité des aliments est sous le contrôle de l'EFSA,(Autorité européenne de sécurité des aliments)...

 

 

Le terme vient de l'anglais traceability qui signifie littéralement « aptitude au traçage » ; il n'est pas reconnu mais simplement toléré par l'Académie française.

Intérêt de la traçabilité
La traçabilité joue un rôle important dans la surveillance et l'appréciation de la qualité d'un produit : Mais, il ne suffit pas de constater qu'un élément du produit est défaillant. Il s'agit aussi et surtout de savoir quels produits composent cet élément, et quelles opérations ont été effectuées sur ces composants. Ceci afin d'être en mesure :

- d'agir de façon curative pour rectifier le plus rapidement possible la conformité du produit et/ou mieux gérer les conséquences/dégâts provoqués (résolution du/des problèmes et remise en conformité, destruction, rappel, etc.) ;

- de réaliser une analyse du problème en amont et aval pour mettre en place des actions correctives ;

- d'intégrer de manière préventive dans la conception et dans la production tous les éléments pertinents ;

- de poursuivre en justice - par le biais de la mise en cause de sa responsabilité juridique (articles 1382 et 1384 du Code Civil)- un producteur ayant occasionné aux personnes et/ou aux biens des désordres graves.

En Europe
- À la suite de plusieurs crises, dont celle de l'encéphalite spongieuse bovine, l'Union européenne (UE) a mis en place le système d'alerte RAPEX. Soit un système informatisé devant recenser tous les produits de consommation dangereux, à l'exception des denrées alimentaires, des produits pharmaceutiques et des appareils médicaux.

- Le slogan « De la fourche à la fourchette » a dans les années 2000 recouvert un vaste programme de restructuration et coordination à échelle européenne de « tous les aspects sensibles en la matière, à tous les stades de la filière agro-alimentaire: santé et alimentation animales, qualité des productions végétales (y compris les innovations OGM), sécurité des intrants agricoles (fertilisants, pesticides, etc.), qualité et surveillance des produits et denrées alimentaires transformés mis sur le marché (y compris les règles d'étiquetage), problématique de la sécurité alimentaire dans les échanges internationaux ». 

En janvier 2000, la Commission a publié une charte de base, le Livre blanc sur la sécurité alimentaire qui prévoit un plan de réformes législatives visant des règles cohérentes et transparentes, un renforcement des contrôles et des avis scientifiques. Tout le droit existant devait être revu avant 2007 et rendu compatible avec la nouvelle juridiction communautaire sur la sécurité alimentaire.

En France
La DGCCRF (Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes) a mis en place divers systèmes de traitement de données (dont données à caractère personnel) via notamment :

- le système « Alertes et signalements » « dont l'objet est la gestion des alertes RAPEX ou RASFF, des indices de danger et des signalements dans les secteurs alimentaires et non alimentaires »,

- le système IRIS (Intégration et restitution des informations saisies) « dont l'objet est de rassembler dans une seule base des informations en provenance d'autres bases de données métier, de les traiter et d'en assurer la présentation ».

Les domaines sensibles
Cette notion a une importance particulière et grandissante pour :

- les produits concernant la santé humaine, comme l'alimentation et les médicaments. Elle est utilisée par exemple pour prévenir les risques liés aux produits agro-alimentaires, faire face aux possibles contrefaçons de médicaments. Une norme européenne (UCC EAN 128) permet par exemple de standardiser la traçabilité en matière de santé (en particulier des médicaments ou des instruments chirurgicaux) ;
- la non-nocivité de toutes sortes de produits dédiés à des catégories d'utilisateurs fragiles : par exemple des jouets pour les enfants.
- la sécurité aéronautique, automobile, ou informatique, etc...
- le traitement des produits chimiques ou de déchets, puisque leur producteur en est responsable jusqu'à son élimination ;
- les composants et sous-composants de tout objet issu d'une activité de transformation industrielle ou artisanale.

C'est aussi une préoccupation croissante pour le consommateur-citoyen, qui veut par exemple être sûr que le produit ne fait pas intervenir d'éléments contraires à son éthique ou à sa morale, comme le travail des enfants, la destruction de ressources non renouvelables, une pollution non traitée, etc. C'est un des éléments essentiel de l'écocertification et de l'écosociocertification (du bois et produits dérivés du bois par exemple).

Histoire

Antiquité

La traçabilité des actes est attestée depuis l’antiquité, par les sceaux notamment. La traçabilité des animaux est également connue des éleveurs, propriétaires d’animaux et des autorités sanitaires depuis des milliers d’années. Ainsi l’identification par marques corporelles était déjà réglementée par le Code de Hammurabi en Mésopotamie, il y a 3 800 ans.

Le marquage indélébile au fer rouge, ou par des marques sur les oreilles (le bec d’oiseaux parfois), avec ou sans écrits attestant les caractéristiques de l’animal, semble avoir été pratiqué presque partout dans l’antiquité, au moins pour les animaux de valeur marchande, religieuse (cf sacrifices), symbolique ou militaire.

Les cygnes des rois d’Angleterre dès le XIIIe siècle étaient marqués par des incisions sur la peau du bec.

XIV° - XIX° siècles

Un marquage sanitaire accompagnant des certificats était utilisé pour contrer ou limiter les épizooties (peste bovine, peste humaine du XIVe siècle, péripneumonie contagieuse bovine, morve, rage...), avec de sévères sanctions en cas d’infractions. Il concernait par exemple des animaux vivants, malades, douteux, morts, ou des sous-produits suspects. Jean Blancou dans « Histoire de la traçabilité des animaux et des produits d’origine animale » (Rev. sci. tech. Off. int. Epiz., 20) cite le marquage lors d’épizooties duXVIIIe siècle, de produits contaminés ou à risques (viande, cuirs) découpés, lacérés ou couverts de chaux pour les reconnaître et les rendre inconsommables ou invendables.

En France, un arrêt du Conseil du roi, du 16 juillet 1784 imposait le marquage des animaux « soupçonnés de la morve ou de toute autre maladie contagieuse telle que le charbon, la gale, la clavelée, le farcin (morve cutanée) et la rage ». L’animal douteux ou malade devait porter un cachet de cire verte sur le front, portant les mots « animal suspect », ces animaux étant conduits et enfermés à part des autres.

En 1875, Hurtrel d'Arboval préfère lui le plombage, en tous cas chez les bêtes à cornes auxquelles on passe une ficelle reliant la base des cornes, les deux bouts sertis dans un plomb du type plomb de douane, « cette marque s’enlève dès qu’elle est devenue inutile, et cependant elle ne peut être changée sans que cette action laisse des traces sensibles »

Au XXe siècle

Reconstruction et production de masse

La traçabilité se développe d'abord pour répondre au modèle fordiste de production de masse relancé par les besoins de reconstruction de l'après-guerre. Dans ce nouveau contexte, un volume de plus en plus considérables de biens sont produits et diffusés via des organisations réparties sur des territoires de plus en plus étendus. Le maintien de la confiance dans ces systèmes répartis implique une parfaite et immédiate identification des objets de transaction.

En effet, la fabrication en série de produits fait aussi changer d'échelle de risque (possibilité de fraudes à grande échelle ou de production d'erreurs en série). Il est impératif de pouvoir retrouver facilement et rapidement l’origine de séries de produits défectueux, et d'identifier/localiser ces produits eux-mêmes, par exemple pour les retirer de la vente.

Des systèmes de normalisation (ex : systèmes ISO) se diffusent largement qui requièrent de tous les opérateurs participants aux échanges :

- d'identifier leur produit par un code et un numéro de série Les lots de production furent donc assortis de numéro identifiant le lot, voire le produit dans le lot ;
- de faire figurer ces informations en code barre ou dispositifs similaires, (éventuellement invisibles, tels que codes magnétiques, ou puces électronique (transpondeur) incluses dans le bois, dans un produit ou un animal vivant).

La traçabilité a profité de progrès majeurs, liés à l'informatique et à sa miniaturisation, avec notamment trois outils :

- les codes-barres, permettant une identification rapide et automatique par lecteur optique. La puce électronique qui peut contenir plus d’informations tend à les remplacer pour les usages sophistiqués ;

- les radio-étiquettes (ou "puces" RFID) qui permettent un suivi complet de la vie d'un produit. En effet, elles sont à lecture/écriture et ce à distance (jusqu'à plusieurs mètres) d'une capacité de 64 000 caractères — 32 pages de livre environ — et peuvent se reprogrammer plusieurs millions de fois. L'alimentation et l'échange des données en lecture ou en écriture se fait sur une porteuse inductive. La puce électronique étant «passive» ne nécessite pas d'être connectée à une source d'énergie ;

- les bases de données plus ou moins interconnectées, permettant de suivre un grand nombre de références et d'effectuer des recoupements de manière automatisée.

L'identification par l'ADN, (via des puces à ADN ) commence à apparaitre pour les produits directement issus du règne vivant viandes, poisson, champignons, et notamment pour le bois.

La traçabilité étend son domaine d'action vers le suivi individualisé de produits divers.
Par exemple :

- Le contenu d’un colis postal envoyé en recommandé, est suivi grâce à son identifiant. Le cheminement est relevé : quel opérateur a manipulé quel produit et où, avec quelle machine, dans quel endroit. La température, les chocs, etc. peuvent aussi être enregistrés) ;

- Les déchets produits par chaque famille peuvent être pesés et suivis grâce à des puces électroniques sur la poubelle domestique et les camions de ramassage.

Sous-traitance et diversification des approvisionnements

Lorsque les process industriels sont éclatés en amont par un large recours à la sous-traitance, le contrôle des composants avant leur arrivée sur le lieu de leur assemblage est une condition d'efficacité et de qualité. La conformité et la traçabilité des pièces fournies visent à fournir les éléments pour améliorer et conforter de façon continue le bon fonctionnement du système d'ensemble.

Mondialisation et diversification des échanges

Outre le service des exigences usuelles, La traçabilité s’est mise au service -dans le cadre de la mondialisation- de la lutte contre la fraude internationale, de la lutte anti-contrefaçon, et trafics en tous genres. 

Risques
Les nouvelles méthodes de traçabilité permettent de suivre un objet, un animal ou un individu, de satellite et jusque dans ses activités privées, avec de nombreuses dérives possibles.

Contraintes techniques de la traçabilité

De nombreuses questions économiques et éthiques se posent :

- Jusqu'où la traçabilité doit-elle aller ?
- Faut-il identifier les produits un par un, ou par groupe (numéro de série, de lot) ?
- La source et le trajet d'un produit doivent-ils être accessibles au public ?
- Combien de temps conserver les archives ?
- Comment tracer des nanoproduits ou produits issus des nanotechnologies ?
- Avec quelle précision tracer des produits particuliers tels que les OGM, des poissons, le gibier, les champignons, le bois et ses produits dérivés, des espèces protégées ou menacées soumis à restrictions de commerce (Convention CITES) ?

Les réponses sont différentes selon que l'on parle d'animaux vivants, de produits alimentaires ou non, d'éléments à risques pathogènes, toxicologiques ou environnemental à court, moyen ou long terme (ex déchets radioactifs à longue durée de vie), ou susceptible de mobilité ou de reproduction (animal ou plante) ou de se reproduire (OGM), etc.

Tout produit matériel est élaboré à partir de matières premières. La traçabilité va alors par exemple consister à noter leurs origines puis celle du produit (marque commerciale, référence du produit, numéro de lot…), ainsi que les conditions dans lesquelles la matière première a été intégrée puis transportée, stockée et vendue. Outre la date, ceci peut aller jusqu'à une liste de paramètres physiques, voire le nom des opérateurs ayant effectué les tâches.

Pour des produits destinés à l'aéronautique, notamment, la traçabilité doit permettre de remonter jusqu'aux matières premières utilisées pour élaborer la pièce concernée (analyse chimique de la matière), et d'identifier toutes les opérations ayant permis d'obtenir le produit fini à partir de cette matière. Si une pièce s'avère défectueuse, il faut en effet être capable de retrouver toutes les pièces fabriquées avec la même matière et dans les mêmes conditions (fonderie, usinage, traitements), afin d'interdire leur montage sur unavion tant que l'absence du même défaut n'a pas été démontrée.

Dans le cas de l'agriculture, il faudrait noter la nature et la quantité de tous les produits utilisés « de la fourche à la fourchette », c'est-à-dire dans les champs, lors du stockage et transport, puis lors de la transformation ou de transformations successives ainsi que les traitements médicamenteux et conditions d'élevage des animaux...

Texte sous licence CC BY-SA 3.0. Contributeurs, ici

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