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Le Conseil constitutionnel valide la suppression des élections des prud’hommes Le Conseil constitutionnel le 11 décembre dernier a validé la constitutionnalité de la loi relative à la désignation des conseillers prud'hommes. Ce texte adopté le 20 novembre 2014 autorise le gouvernement à définir par ordonnances les modalités de désignation des prud’hommes. L’objectif étant qu’ils ne soient plus élus mais désignés en fonction de l’audience des différents syndicats de salariés et patronaux. Un changement d’importance pour une institution qui remonte au moyen-âge... Du Moyen Âge à la Révolution Étienne Boileau (1200-1270), prévôt de Paris sous le roi Saint Louis cite l'arbitrage traditionnel des anciens, les « probi homines », hommes de valeur, prudents et de bon conseil. Le terme prud'homme s'appliquait alors aux « défenseurs du métier » qui intervenaient si un conflit surgissait entre artisans, il était tranché par leurs pairs : les prud'hommes. C'est sous le règne de Philippe le Bel que furent constitués les premiers conseils de prud'hommes. En l'an 1296, le conseil de la ville de Paris créa vingt-quatre prud'hommes et les chargea d'assister le prévôt des marchands et les échevins afin de juger, en dernier ressort, les contestations qui pourraient s'élever entre les marchands et les fabricants qui fréquentaient les foires et les marchés établis à cette époque ; ils allaient, de plus, faire la visite chez les maîtres et peuvent être regardés, par-là, comme l'origine des gardes et jurés établis postérieurement dans chaque communauté d'arts et métiers. Pendant près de deux siècles, la ville de Paris posséda seule des prud'hommes. Dans plusieurs villes maritimes, notamment à Marseille, il existe un conseil de prud'hommes dont l'origine paraît fort ancienne. Ce sont des prud'hommes pêcheurs qui jugent les contraventions en matière de pêche maritime et les différends entre marins à l'occasion de leur profession de pêcheurs. Cette catégorie de prud'hommes remonterait, croit-on, à l'époque du roi René, comte de Provence (1462). Des arrêts différents de mai 1758, novembre 1776, octobre 1778 et mars 1786 ont réglementé sans beaucoup la modifier cette institution qui traversa sans à-coups la Révolution de 1789, pour arriver telle quelle jusqu'à nos jours, telle qu'elle était dès le XVe siècle. Au Moyen Âge comme sous l'Ancien Régime existent également des prud'femmes2 dont le rôle est de défendre les intérêts des femmes. En effet, les femmes sont présentes dans les corporations et certains métiers leur sont même réservés, par exemple dans le travail de la soie3. Comme les hommes, elles peuvent accéder au statut de maître, ce qui est en principe la condition à remplir pour participer aux scrutins professionnels. Cela explique que des femmes puissent diriger certaines corporations à forte main d'œuvre féminine, notamment dans le textile, et qu'y soient élues des prud'femmes. Les prud'femmes disparaissent avec la suppression des corporations en 1791, lors de la Révolution française, en même temps que les conseils de prud'hommes, qui pour leur part sont rétablis sous Napoléon. De l'Empire à la IIIe République La Deuxième République remanie la législation des prud'hommes par la loi du 27 mai 1848, qui confère à l'institution un élément fort de sa forme actuelle avec l'apparition du paritarisme ("employeurs" et "salariés" rendant ensemble les décisions). La loi de 1848 déclarait électeurs pour les conseils de prud'hommes tous les patrons, chefs d'atelier, contremaîtres, ouvriers et compagnons âgés de 21 ans et résidant depuis six mois au moins dans la circonscription du conseil de prud'hommes. Elle déclarait les mêmes éligibles, s'ils savaient lire et écrire et s'ils étaient domiciliés depuis un an au moins dans la circonscription du conseil. Elle rangeait dans la classe des patrons les contremaîtres, les chefs d'atelier et tous ceux qui payaient patente depuis plus d'un an et occupaient un ou plusieurs ouvriers. La présidence donnait voix prépondérante : mais elle durait 3 mois et était attribuée alternativement à un patron et à un ouvrier, élus chacun par leurs collègues respectifs. Les audiences de conciliation devaient être tenues par deux membres : l'un patron, l'autre ouvrier ; quatre prud'hommes patrons et quatre prud'hommes ouvriers devaient composer le bureau général ou de jugement. La loi spécifiait que le nombre des prud'hommes ouvriers serait toujours égal à celui des prud'hommes patrons et disposait que chaque conseil aurait au moins 6 membres et 26 au plus. Il était procédé à deux élections : dans la première, ouvriers et patrons nommaient un nombre de candidats triple de celui auquel ils avaient droit ; dans la seconde, qui était définitive, les ouvriers choisissaient, parmi les candidats patrons, les prud'hommes patrons, et les patrons choisissaient à leur tour les prud'hommes ouvriers sur la liste des candidats ouvriers. Ainsi, au cours du XIXe siècle, les conseils de prud'hommes s'ancrent dans le paysage judiciaire et social de la France. Leur nombre augmente – celui de Paris étant créé en 1844-1847 – pour dépasser les quatre-vingts au milieu du siècle. La procédure préalable de conciliation aboutit (à cette époque) dans 90 % des cas et les jugements s'efforcent de développer des jurisprudences sur la base des usages locaux. De ce fait, les prud'hommes suscitent l'intérêt du mouvement ouvrier : en 1848, tous les ouvriers deviennent électeurs et éligibles et, en 1880, le président et le vice-président sont élus selon le système de la parité. Une loi de 1905 supprime la voix prépondérante du président et transfère les appels des tribunaux de commerce aux tribunaux civils. Pendant leur deuxième siècle d'existence, les conseils de prud'hommes ont été étendus à de nouvelles professions, ouverts aux femmes (électrices depuis 1907, éligibles depuis 1908) et aux étrangers ; ils sont devenus des éléments de la démocratie sociale. En 1907, une loi est votée et met en place une véritable juridiction sociale, reconnue compétente en matière de contentieux individuels du travail. En 1908, la loi du 15 novembre 1908 (dite Loi des prud’femmes) instaure que les femmes sont désormais éligibles. De la IVe République à nos jours Il existait, jusqu'à fin 2008, 271 conseil de prud'hommes mais la réforme de la carte judiciaire menée par la ministre de la justice, Rachida Dati, a conduit à la fermeture de 60 d'entre eux. Texte sous licence CC BY-SA 3.0. Contributeurs, ici. Photo : Fotolia.com Pour vous conseiller en droit social, des avocats : 75007 - ALBERT ASSOCIES AVOCATS http://www.avocat-immobilier.eu Voir toutes les newsletters : www.haoui.com Pour les professionnels : HaOui.fr |