Pyramides d'Egypte : comment ont-elle été édifiées ?...

Les méthodes de construction des pyramides égyptiennes demeurent incertaines. Les données archéologiques sur ces chantiers gigantesques restent très fragmentaires, tandis que les théories fleurissent et se multiplient, surtout depuis la fin du XIXe siècle. Focus sur ces théories contemporaines…

Elles se focalisent généralement sur la Grande pyramide, partant du principe qu'une méthode pouvant expliquer sa construction peut également s'appliquer à toutes les autres pyramides d'Égypte. En fait, rien ne permet d'affirmer que les mêmes méthodes aient été appliquées à toutes les pyramides, de tous types, toutes tailles et toutes époques.

Des rampes

Rampe frontale en brique crue

Cette théorie fut développée pour la première fois par l'égyptologue allemand Ludwig Borchardt, interprétant ainsi la présence des vestiges de rampes aux abords de la pyramide de Meïdoum. Elle consiste en une rampe unique, perpendiculaire à une face de la pyramide, dont la pente est constante quelle que soit l'élévation. Cela implique que la longueur de celle-ci croisse proportionnellement avec le nombre d'assises de la pyramide. Les blocs, posés sur des traîneaux, étaient alors charriés sur la rampe à la force des bras. De l'huile, déposée sur le sol, aidait à faire glisser les traîneaux.

L'inconvénient majeur de cette théorie est que la rampe prend des dimensions considérables et qu'elle représente, au final, un travail aussi colossal que la pyramide elle-même. Aussi ce principe fut-il modifié, notamment par Jean-Philippe Lauer, qui propose une rampe linéaire unique en brique crue, perpendiculaire à la face orientée vers le Nil, de longueur variable jusqu'à une faible hauteur puis de longueur constante avec inclinaison variable.

Rampe frontale préconisée par Jean-Philippe Lauer

La rampe, suivant ces deux théories, pose des problèmes de mécanique et de génie civil importants :

- soit la rampe a une pente faible et une longueur extrêmement importante. Le volume de matériaux que représente la rampe, et qu'il faudrait déblayer ensuite est énorme, de l'ordre de grandeur du volume de la pyramide elle-même ;

- soit sa pente s'élève à mesure que la pyramide se construit, ce qui lui donne une pente très forte. La pente pour hisser les blocs devient énorme, bien au-delà de ce qui est admissible pour une voie praticable, et a fortiori pour hisser des blocs.

Cette théorie présente donc des lacunes. Elle est difficile à concilier avec la tenue des sols, la place disponible, qui sont connus des ingénieurs civils, et les possibilités de traction humaine, qui sont aujourd'hui mieux connues grâce à l'archéologie expérimentale.

Rampe hélicoïdale en brique crue

Cette théorie est retenue par de nombreux commentateurs. Elle s'appuie sur une construction de la pyramide avec des rampes de brique crue parallèles aux faces et permettant de tirer les blocs de pierre d'un étage à l'autre. Enveloppant entièrement la construction, cette rampe aurait permis l'élaboration de chaque assise, pierres de parement incluses, offrant une explication plausible à la finition des pierres de revêtement à partir du sommet de la pyramide. En effet, une fois le pyramidion posé, il ne restait plus qu'à démanteler la rampe à partir du sommet, dévoilant les blocs de parement qu'il suffisait de ravaler. Certains objectent à cette théorie le fait que la construction de ces rampes aurait demandé une énergie colossale, que les pentes retenues seraient incompatibles avec la tenue géotechnique des matériaux employés et qu'elle est en contradiction avec le témoignage d'Hérodote.

Bien que cette théorie ait la faveur de beaucoup d'égyptologues, elle se heurte à un écueil : comment 300 haleurs peuvent-ils continuer à tirer des charges dans des virages où il leur serait impossible de se déployer ? Georges Goyon présente des bornes faisant office de renvoi d'angle pour des cordes de traction, solution qui n'est qu'une hypothèse de dessin, non validée au niveau de la tenue mécanique des composants.

Rampes latérales

Cette théorie consiste à accoler des rampes latérales disposées en colimaçon aux faces des degrés du massif interne de la pyramide. Elle fut énoncée pour la première fois par l'égyptologue allemand Uvo Hölscher. L'inconvénient majeur est la forte pente imposée aux rampes qui ne peuvent s'étendre que sur la longueur des faces.

Ce système ne peut donc permettre que l'élévation de pierres relativement légères. De plus, il rend impossible la pose du revêtement final. Cette théorie semble mieux adaptée à la construction des pyramides à degrés, dont la masse des pierres à assembler dépasse rarement les 350 kg, ce qui rendrait également possible l'emploi d'une rampe frontale à forte pente.

Rampe latérale avec extension

L'égyptologue allemand Rainer Stadelmann a dessiné une rampe latérale qui s'étend très largement devant la pyramide, de manière à adoucir la pente.

Rampe engagée


Son collègue Dieter Arnold a présenté une variante de la rampe précédente, non plus latérale, mais engagée dans la pyramide et dépassant, elle aussi, largement à l'extérieur.

Double rampe frontale et rampe intérieure (théorie de Jean-Pierre Houdin)

En 2000, l'architecte français Jean-Pierre Houdin (avec l'aide de Bob Brier) élabore une théorie innovante s'appuyant sur des relevés de mesures micro-gravimétriques effectués par EDF.

L'édification de la grande pyramide aurait été possible par deux projets simultanés d'édification:

Jean-Pierre Houdin propose l'utilisation d'une double rampe frontale pour la construction des quarante premiers mètres de l'édifice : une rampe est utilisée pour monter les blocs de pierre pendant que l'autre rampe est rehaussée, permettant ainsi la continuité des travaux.

L'architecte met en exergue les défauts des autres théories afin de soutenir la sienne. Ainsi une rampe frontale allant jusqu'au sommet de la pyramide nécessiterait une pente trop forte ou un volume trop important. La rampe en spirale préconisée par Georges Goyon aurait manqué de stabilité et n'aurait offert que trop peu de liberté aux haleurs. C'est pourquoi Il avance la théorie fondée sur la conception d'une rampe intérieure qui aurait permis de monter les blocs pour la suite des travaux : cette rampe en forme de spirale aurait ainsi couru à quelques mètres des faces de la pyramide, en 21 tronçons et sur 1,6 km. À chaque rencontre de l'une des arêtes, un espace ouvert aurait permis de tourner les blocs de pierre.

Jean-Pierre Houdin s'appuie sur plusieurs indices archéologiques afin d'étayer son hypothèse. L'un d'eux est la présence dans l'obélisque maçonné d'un temple solaire (celui de Niouserrê à Abousir), de ce qu'il qualifie d'une rampe interne. Le site, datant de la Ve dynastie égyptienne et méticuleusement étudié par Ludwig Borchardt, présente il est vrai une structure interne en colimaçon, un escalier d'accès à la terrasse du premier tronc de l'obélisque.

L'autre argument principal est le contrôle des arêtes de la pyramide, que seule l'édification par rampe interne aurait permis de maîtriser. L'auteur soutient que les faces des pyramides devaient rester dégagées et posséder dès les premiers lits de pierre, leur parement en calcaire fin.

Les mesures micro-gravimétriques, effectuées par EDF en 1986 lors de l'étude de l'architecte français Gilles Dormion, ont révélé des différences de densité dans l'infrastructure. Ce dernier interprète ces mesures comme l'évidence de la présence de gradins dans le corps de la pyramide. Ce fait a déjà été constaté dans d'autres pyramides dans un état de ruine plus avancé. La pyramide de Mykérinos, éventrée sur son côté nord, montre de tels gradins. La pyramide de Meïdoum, pyramide à faces lisses effondrée, ne montre plus que son massif interne en gradins. Les pyramides de la Ve dynastie égyptienne étaient également dotées de ce type d'infrastructure. Cette particularité démontre que les égyptiens, tout en faisant évoluer leurs monuments, intégraient dans leurs édifices des éléments architectoniques et symboliques élaborés de longue date. Jean-Pierre Houdin, quant à lui, y voit plutôt la présence d'une structure interne en colimaçon.

La conception de cette structure dotée sur toute sa longueur d'une voûte en encorbellement, analogue à la grande galerie mais longue de 1,6 km, aurait nécessité une mise en œuvre très délicate.

Une telle rampe intérieure n'a jamais été détectée ni dans la pyramide de Khéops, ni dans la pyramide de Khéphren (pyramide présentant le même défi technique qu'à Khéops). Mais seule une étude plus poussée du monument permettrait de valider ou non cette théorie.

Théorie du système constructif des pyramides

Le système constructif des pyramides proposé par Pierre Crozat, architecte - ingénieur polytechnicien EPFL, repose sur l'analyse de l'histoire des techniques de l'art de bâtir, la géologie du site et une lecture au premier degré des écrits d'Hérodote, qui rapportant les paroles des prêtres égyptiens de son temps concernant la construction des pyramides. Dans ce système, la forme pyramidale de la construction est une conséquence de la technique d'agencement des blocs (que Crozat appelle « algorithme constructif »), c'est-à-dire par encorbellement successifs à l'aide d'un levier posé sur un trépied. Cet algorithme constructif ne génère que de la pyramide. Les matériaux proviennent des carrières, dont les fronts de tailles et les laissés peuvent être vus encore aujourd'hui. Cette théorie a fait l'objet d'une thèse de doctorat de l'ENSMN.

Des rampes et des machines

Rampes en zigzag, chèvres et cabestans

Jean-Pierre Adam a une préférence pour un système de quatre rampes en zigzag, soit une sur chaque face. Mais il n'exclut pas l'utilisation complémentaire de chèvres, déjà proposées par Auguste Choisy, ou de cabestans mus à la force des bras. Selon Jean-Pierre Adam, les Égyptiens connaissaient la roue.

Jean Kérisel, polytechnicien, ingénieur des Ponts et Chaussées, propose des solutions de nature similaire.

Si le principe de la rampe est une théorie intéressante dans sa globalité, elle reste actuellement largement insuffisante au niveau des hypothèses sur les modes de réalisation, et n'est qu'un élément bien partiel de la compréhension de la logistique et de l'organisation spatiale du chantier. Il ne suffit pas de dire qu'il y a une rampe pour que tout soit résolu. Cette théorie doit être améliorée pour répondre au problème de son assise sur la pyramide, et des moyens de traction des blocs. Ces théories et les hypothèses de leurs modes de réalisation doivent être vérifiées dans le détail par des calculs de base de génie civil, tels que la tenue à la charge de la voie, le cubage des matériaux, la vitesse de transport des blocs, la place nécessaire pour la main d'œuvre, les coefficients de frottement et les moyens de repérage pour les géomètres.

Ces éléments de vérification sont rarement présentés par les égyptologues dans les ouvrages publiés, et leurs présentations restent critiquables du point de vue mécanique, ce qui les amène à de simples formulations d'hypothèses. Ce manque d'intérêt est assez frappant, pour ce qui n'est finalement que l'étude d'un énorme chantier de génie civil.

Des machines

Chèvres

Auguste Choisy, polytechnicien, ingénieur des Ponts et Chaussées, émet l'hypothèse de la construction par degrés et en pelures d'oignon.

L'égyptologue allemand Uvo Hölscher défendit d'abord l'idée des rampes en zigzag (reprises plus récemment par Jean-Pierre Adam), puis se pencha sur des moyens de manutention comme les pinces de levage.

Hermann Strub-Roessler reprend l'idée des chèvres, mais d'un modèle beaucoup plus élaboré que celles d'A. Choisy, avec de multiples cabestans et cordages de manœuvre.

Élévateurs

Louis Croon, ingénieur allemand, reprend le principe du chadouf, c'est-à-dire d'un levier de grande dimension manœuvré sur un axe, et pivotant pour l'occasion. Il étudie aussi un type de rampe frontale peu éloigné de celui de Jean-Philippe Lauer, mais de largeur constante.

En 1993, L.Albertelli propose un système de levier pouvant tracter un monolithe de 30 tonnes le long de la paroi de la pyramide, grâce à une nacelle lestée d'ouvriers

Théories alternatives

Transport et levage par canaux et écluses

Selon Jean-Pierre Adam, Pline l'Ancien préconisait déjà de transporter les obélisques et autres lourds monolithes suspendus entre deux embarcations et immergés, de sorte qu'ils perdent, par la poussée d'Archimède, plus du tiers de leur poids. Le halage devient alors possible, aisé même, analogue à celui des lourds chalands sur nos canaux.

Manuel Minguez, technicien du génie civil, a présenté en 1985 une hypothèse d'application de moyens hydrauliques au transport des mégalithes, à la construction des pyramides et à l'érection des obélisques : il mène des expériences de halage en grandeur nature et développe l'idée des monolithes suspendus et immergés entre deux chalands ; puis il décrit un système d'écluses pour la construction des pyramides. Les obélisques, quant à eux, descendus au fil du fleuve depuis les carrières d'Assouan, ne nécessitaient aucun halage, mais plutôt un freinage efficace. Ils étaient mis en place et érigés, selon Manuel Minguez, par redressement dans un bassin artificiel, de manière contrôlée et à tout moment réversible.

Théories des pierres moulées

Selon ces théories, les blocs de pierre des pyramides d'Égypte n'ont pas été taillés, mais moulés, à la manière du béton.

Depuis 1978, le professeur Joseph Davidovits, ingénieur chimiste, développe une théorie selon laquelle les pyramides égyptiennes ne seraient pas faites de blocs de pierre taillée, mais de pierre réagglomérée : du calcaire naturel désagrégé, mélangé à un liant, puis moulé.

Depuis 2001, Joël Bertho, architecte des structures, propose une autre théorie sur la pyramide en pierre reconstituée.

Selon l'égyptologue Rosemarie Klemm et le géologue Dietrich Klemm, auteurs d'une étude sur la provenance des pierres des pyramides, ces théories ne reposent sur aucun élément sérieux.

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