Loi NOME : la libéralisation du marché de l'électricité

La loi NOME, ou Nouvelle Organisation du Marché de l’Electricité, votée en première lecture à l'Assemblée nationale et au Sénat, devrait entrer en application début 2011. Imposée par Bruxelles, la réforme du marché de l'électricité constitue une ultime étape dans le processus de libéralisation...

Loi NOME
La loi NOME reprend en grande partie les conclusions du rapport de la Commission Champsaur. Elle devrait être adoptée en deuxième lecture à l'Assemblée pour entrer en application début 2011.

Contenu de la loi NOME
La loi NOME et les tarifs réglementés de l’électricité
La loi NOME programme théoriquement la disparition des tarifs réglementés vert et jaune, qui sont les tarifs fixés par le ministère de l'énergie pour les entreprises. C’est donc l’ouverture totale à la concurrence pour les professionnels dont le compteur présente une puissance souscrite supérieure à 36 kVA. La loi NOME donnerait un cadre directif pour l’évolution des tarifs réglementés des compteurs de moins de 36 kVA : ils évolueraient en tenant compte « de l’addition des coûts d’acheminement d’électricité, du prix d’accès à la base régulée, du prix du complément de fourniture évalué sur la base des prix observés sur les marchés et des coûts de commercialisation ».

Loi NOME et branchement des producteurs
Le sénateur Poniatowski, très impliqué dans la loi NOME, a fait adopter un amendement issu du rapport Charpin mettant les frais de branchement des nouveaux producteurs d'électricité (propriétaires de panneaux solaires, d'éoliennes...) à leur frais, et non plus à ceux d'ERDF ou de RTE. C'est un coup financier sévère porté à la filière renouvelable.

La loi NOME et le « droit d’accès régulé » à l’électricité de base
La loi NOME partage la rente nucléaire
La loi NOME inscrit également dans les textes le partage de l'électricité issue des centrales nucléaires françaises entre les fournisseurs d'électricité. EDF se verra ainsi contraint de céder l’électricité à ses concurrents (GDF Suez, Poweo, Direct Energie…) à un prix inférieur à celui qu’il pratique actuellement. La loi NOME fixerait ces conditions pour une période transitoire allant du 1er juillet 2010 au 21 décembre 2025. D'après le projet actuel de loi NOME, le volume maximal qu'EDF pourrait être amené à céder à ses concurrents serait de 120 TWh par an, soit un peu moins d’un tiers de la production nucléaire française. Les fournisseurs d'électricité alternatifs bénéficieraient ainsi d'un "droit d'accès régulé à l'électricité de base pour la période transitoire".

La fixation des volumes et des prix de cession d’électricité de base
Le volume maximal et le prix de cession seraient néanmoins fixés chaque année par les ministres en charge de l'économie et de l'énergie, après avis de la Commission de Régulation de l'Energie (ce système de décision prévaut déjà pour la fixation des tarifs réglementés bleu, vert et jaune). La loi NOME prévoit de lier le prix de cession au coût d’exploitation des centrales nucléaires (y compris les coûts d’investissements, notamment pour prolonger leu durée de vie). La loi NOME laisse entrevoir des changements de fournisseur potentiels de près d’un tiers des ménages (10 millions de sites) pour souscrire à des offres de marché aux prix durablement inférieurs aux tarifs réglementés d'EDF. Aujourd'hui, moins de 5% des ménages ont opté pour une offre de marché d'électricité.

Les critères de répartition des volumes d'électricité cédés par EDF
L'avant-projet de loi NOME évoque également les critères sur la base desquels seront répartis les 120 TWh annuels cédés par EDF. Le volume accordé à chaque fournisseur dépendra notamment de son portefeuille de clients, des perspectives d'évolution de son portefeuille de clients, afin de tenir compte de la part de marché relative des différents fournisseurs alternatifs. Un fournisseur bénéficiant de capacités de production hydrauliques verrait la production de ses barrages diminuer d'autant son accès à l'électricité nucléaire vendue par EDF. La Commission de Régulation de l'Energie serait chargée par la loi NOME de fixer le volume d'électricité qui reviendrait à chaque fournisseur.

La loi NOME réformerait la Commission de Régulation de l’Energie
Enfin, la loi NOME prévoit une réforme de l’organisation de la Commission de Régulation de l’Energie (CRE), qui ne devrait plus compter que cinq membres (un président et quatre commissaires) au lieu de neuf à l’heure actuelle dont les compétences seraient élargies. Le mandat des commissaires serait de six ans non renouvelables. La loi NOME définit également les modalités de nomination des commissaires : nomination par décret du président et d’un commissaire, nomination d’un deuxième commissaire par le président de l’Assemblée nationale, nomination d’un troisième commissaire par le président du Sénat et nomination d’un quatrième commissaire par le président du Conseil économique et social.
Les compétences de la CRE seraient élargies par la loi NOME. Elle se verrait conférer un rôle d’arbitre et de gendarme du partage de la rente nucléaire, fixant les prix et réglant les litiges entre fournisseurs. La CRE et l’Autorité de la Concurrence produiront également des rapports sur le dispositif de cession d’électricité en base par EDF à ses concurrents. La loi NOME proposerait que le gouvernement produise un rapport d’évaluation au 31 décembre 2015 au plus tard, puis tous les cinq ans par la suite, en utilisant comme bases de travail les rapports de la CRE et de l’Autorité de la Concurrence.

Historique de la loi NOME
Aboutissement logique du Rapport Champsaur, la loi NOME était censée entrer en vigueur le 1er juillet 2010, trois ans jour pour jour après l’ouverture du marché des particuliers. Néanmoins, son examen prévu à l’Assemblée pour l’automne 2009 a été repoussé au printemps 2010, puis à la rentrée laissant planer le doute sur la date de sa mise en œuvre effective. L'objectif était probablement de mettre la loi NOME à l'ordre du jour de l'agenda médiatique après les régionales, étant donnée la sensibilité du dossier. Le retard pris sur la loi NOME a néanmoins été justifié par un député UMP par la volonté de prendre le "temps de la concertation avec les professionnels". Le ministère de l'énergie et de l'écologie voudrait favoriser l'adoption d'une procédure d'urgence pour la loi NOME, afin que le vote puisse avoir lieu avant l'été. Les parlementaires prennent néanmoins le temps d'examiner ce texte polémique, et les amendements proposés sont très nombreux. La loi NOME découle d'engagements d'ouverture du marché de l'électricité français pris par le Premier Ministre François Fillon vis-à-vis de la Commission européenne le 15 septembre 2009. Face à la pression de la Commission européenne, il sera donc difficile de revenir sur les grands principes du projet de loi NOME, tels que définis ci-dessus.

Les enjeux de la loi NOME
Loi NOME et partage de la rente nucléaire
Les centrales nucléaires d'EDF ont été construites sur fonds publics il y a plusieurs dizaines d'années. Si le nucléaire souffre de coûts d'investissement très élevés, le coût d'exploitation des centrales, lui, est particulièrement bon marché, notamment en comparaison des centrales fonctionnant à partir de sources fossiles. L'exploitation de centrales amorties depuis longtemps génère donc des marges importantes: on parle de "rente nucléaire". EDF et ses clients sont aujourd'hui les principaux bénéficiaires de la rente nucléaire: l'énergéticien dégage des marges satisfaisantes et les clients d'EDF bénéficient de tarifs réglementés de l'électricité bon marché, au regard des prix de l’électricité pratiqués ailleurs en Europe. Avec la loi NOME, l'ensemble des fournisseurs d'électricité et l'ensemble des consommateurs pourraient bénéficier de la rente nucléaire.

La redistribution des cartes opérée par la loi NOME
La loi NOME est susceptible de bouleverser durablement la structure des marchés de l'électricité en France. La loi NOME pourrait signifier l'ouverture effective à la concurrence du marché de l'électricité français, avec un recul des parts de marché d'EDF au profit des fournisseurs d'électricité alternatifs (Poweo, Direct Energie). En effet, la loi NOME pourrait conduire EDF à partager la rente nucléaire avec ses concurrents, qui seraient alors assurés de bénéficier d'un approvisionnement en énergie à prix maîtrisés sur le long terme. Cependant, Henri Proglio a bien ménagé les intérêts de son groupe, et il semble aujourd'hui (août 2010) que la cession de l'électricité nucléaire se fasse à un prix intégrant les "coûts complets" d'EDF, et notamment de démantèlement. Le MWh pourrait donc atteindre 40 à 45 euros contre 32 à 40 attendus par les concurrents d'EDF (Direct Energie, GDF Suez, Poweo, E.ON, Alpiq...).

La loi NOME fait peur à EDF
La résistance d’Henri Proglio à la loi NOME
EDF ne s'y est pas trompé: la loi NOME constitue un risque direct pour sa position dominante sur le marché de l'électricité français. C'est ainsi qu'Henri Proglio a dénoncé la loi NOME dès la fin octobre 2009, alors qu'il n'était pas encore entré en fonction à la présidence d'EDF. Henri Proglio s'est en effet exprimé devant les membres de la Commission des Affaires économiques de l'Assemblée Nationale et a annoncé qu'il résisterait autant que possible au "pillage" d'EDF éventuellement imposé par la loi NOME.

L’opposition des syndicats EDF à la loi NOME
La direction d'EDF pourrait conclure une alliance de circonstance avec des syndicats ouvriers particulièrement hostiles à la loi NOME. La CGT parle ainsi de "déconstruction du système électrique français" et adopte une vision particulièrement négative de la loi NOME. Le syndicat FO a lui demandé au gouvernement de "renoncer au projet de loi NOME". La CFDT d'EDF s'est exprimée en des termes plus directifs: "arrêtez la casse d'EDF". Son administrateur a publié une longue lettre dans lesquels il dénonce la loi NOME, qui constituerait un "cadeau empoisonné pour la concurrence sur le dos des consommateurs". La CFDT d'EDF argumente en effet que la rente nucléaire ne peut être redistribuée à tous les français qu'au travers de tarifs réglementés proposés par un opérateur public. Le lobbying syndical pourrait donc se révéler important. La mise en concurrence effective d'Electricité de France grâce à la loi NOME serait en effet susceptible de faire apparaître l'inutile et coûteuse lourdeur de structure du fournisseur d'électricité historique qu'est EDF, en comparaison de ses concurrents fournisseurs alternatifs, développés dans un esprit très "start-up" où tous les coûts doivent être maîtrisés au plus juste.

Article rédigé par Xavier Pinon pour http://www.fournisseurs-electricite.com/loi-nome

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