Cassandre, la voyante que personne ne croyait…

 

Il était une fois une princesse qui s’appelait Cassandre. Homère qui ne mentionne pas ses dons de prophéties nous rapporte qu’elle était la plus belle des filles du Roi Priam et de la Reine Hécube, les souverains de Troie. De sa beauté, le dieu Apollon était tombé amoureux et espérant la séduire, il lui offrit le don merveilleux et redoutable de prédire l’avenir. Pourtant, elle repoussa le dieu qui, terriblement offensé, la condamna à ne jamais être crue.

La malheureuse continua d’avertir les Troyens des périls qui allaient assombrir leur vie, en vain. Non seulement elle n’était pas écoutée, mais en plus on se moquait d’elle. Sa première prédiction va concerner la guerre de Troie et ses conséquences. C’est d’abord son frère Pâris qu’elle met en garde alors qu’il part pour la Grèce. Cela ne l’empêchera pas d’enlever la belle Hélène des bras de son époux Ménélas, le roi de Sparte, et de la ramener à Troie causant ainsi la perte de la ville.

Cassandre est la seule à prédire le malheur qui va s’abattre sur Troie. Car fou de rage, Ménélas décide de ramener son épouse et de donner une bonne leçon aux suborneurs infâmes. Mais les Troyens sont subjugués par la beauté d’Hélène et n’ont cure des avertissements de Cassandre. Elle prédira également que le fameux cheval, une idée d’Ulysse, utilisé par les Grecs, est un subterfuge. Cet énorme cheval attise tant et si bien la curiosité des Troyens qu’ils ne résistèrent pas à l’envie de le faire entrer dans la ville et de le montrer à Priam. En transe, Cassandre annonce des événements terribles dans un délire qui la fait passer pour folle et, plutôt que de l’écouter, chacun la fuit. Elle supplie : « N’en faites rien, conjure-t-elle, cet animal porte la mort dans ses flancs ». Mais les Troyens haussent les épaules, accrochent des cordes au cou de la bête et sourds aux sanglots de la Princesse, le hissent jusqu’au cœur de la ville. La nuit tombée, des soldats grecs sortirent des entrailles du cheval et portèrent la mort du nord au sud, de l’est à l’ouest de la ville. Ce fut la fin de Troie.

Cassandre va aussi répandre le malheur dans les rangs des amis de Troie. Elle est si belle que ces Princes étrangers qui luttent aux côtés des Troyens la courtisent, mais ils vont tous tomber sous les coups portés par les guerriers grecs. Cassandre est donc vouée à rester seule et d’ailleurs elle ne se mariera jamais. Lors du sac de Troie, Ajax le Petit la surprend dans le temple d’Athéna, agrippée à la statue sacrée de la déesse, le Palladium. Il la traîne hors du temple et la viole. Pour expier ce sacrilège légendaire les Locriens (*) étaient condamnés à envoyer à Troie chaque année, pendant mille ans, deux vierges destinées à être esclaves dans le temple d’Athéna et si les Troyens réussissaient à s’en emparer avant qu’elles n’arrivent au temple, elles étaient mises à mort. Ce châtiment resta d’ailleurs en vigueur jusqu’au IIe siècle avant J.C.

Après le sac de Troie, Cassandre est offerte en butin au Roi d’Athènes, Agamemnon qui en fit sa concubine et dont elle eût deux fils. Cassandre le supplia de ne pas retourner auprès de sa femme Clytemnestre. En ne l’écoutant pas, le Roi signa son arrêt de mort et celui de Cassandre. Tous deux périrent assassinés sous les coups de Clytemnestre et de son amant Egiste.

Tel fut le dramatique destin de Cassandre, la voyante que personne ne croyait. Aujourd’hui son prénom est devenu un nom commun. On dit une cassandre, comme on dit un frigidaire, un bic... Magnifique revanche du vocabulaire sur l’incrédulité humaine !

(*) La Locride était une ancienne région de Grèce centrale. D’après l’Iliade, les Locriens étaient commandés par Ajax, fils d’Oïlée, pendant la guerre de Troie.

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