Emmanuel Macron : gouverner par ordonnances, qu’est que ça implique ?

Le Président nouvellement élu, Emmanuel Macron, a promis de faire appliquer au plus vite certaines de ses réformes (notamment celle du travail) en ayant recours à des ordonnances. Mais qu’est-ce que cela implique au juste ? En droit constitutionnel français, une ordonnance est une mesure prise par le gouvernement dans des matières relevant normalement du domaine de la loi. Elle relève de la procédure législative déléguée... 

Dans le cadre actuel de la Cinquième République, le gouvernement ne peut prendre des ordonnances que s'il y a été habilité par le Parlement, conformément à l'article 38 de la Constitution, ou autorisé par la Constitution s'agissant de certaines dispositions relatives à l'outre-mer (article 74-1). Assimilées à des règlements, les ordonnances entrent en vigueur dès leur publication. Elles ne prennent toutefois valeur législative qu'après avoir été ratifiées par le Parlement dans un délai fixé.

La procédure des ordonnances prolonge la pratique des décrets-lois des III et IV République et reprend le principe de l’autorité législative exclusive des rois de France sous l'Ancien Régime.

Ordonnance d'Ancien Régime
Sous l'Ancien Régime, une ordonnance était un texte pris par une institution (par exemple, le pouvoir royal) et correspondant approximativement à une loi. Les ordonnances se distinguent des édits, portant sur une matière spécialisée alors que l'ordonnance est plus générale.

Utilisation de l'ordonnance sous la 5e République
Ce système est très utilisé pour des raisons qui tiennent à l’encombrement de l’ordre du jour législatif, à l’impopularité des décisions à prendre ou encore à un désir d’efficacité et de rapidité. Elles sont notamment utilisées pour transposer en bloc en droit interne les directives européennes, mais aussi, ce qui est critiqué, dans des domaines touchant à l’essence du domaine de la loi. Ainsi des ordonnances ont été prises pour rédiger la partie législative de plusieurs codes (de justice administrative, d’éducation…) ou pour « simplifier » la législation. Un grand nombre d'ordonnances sont aussi consacrées à l'application du droit métropolitain en outre-mer. Certaines ordonnances sont surtout techniques : ainsi celle qui, le 19 septembre 2000, a converti en euros tous les montants en francs figurant dans la législation française.

La loi d’habilitation doit fixer les domaines et la durée où le gouvernement pourra prendre des ordonnances, sous peine d’être sanctionnée par le Conseil constitutionnel français pour incompétence négative.

La première utilisation d'une ordonnance sur le fondement de l'article 38 de la Constitution remonte à la loi du 4 février 1960, qui permettait au Gouvernement de prendre des mesures de maintien de l'ordre en Algérie. C'est toutefois resté longtemps une pratique assez rare. L'ordonnance permettait par exemple à un Gouvernement de faire passer des mesures d'urgence plus rapidement, avec l'accord du parlement. Ces périodes d'ordonnance, délivrées par le Parlement, sont plus facilement accessibles lorsque la majorité parlementaire est de la même couleur que celle de l'exécutif (gouvernement et président de la République). Le délai est fixé par le Parlement. Ce délai a longtemps été de plus en plus long. Le dernier délai est de 4 ans.

Cette pratique s'est considérablement accélérée depuis quelques années. De 2000 à 2005, les gouvernements successifs ont pris 184 ordonnances, dont 83 pour la seule année 2005, contre 102 dans les quarante années précédentes (1960-1999). La plupart des ordonnances prises depuis 2003 auraient pour objet, selon le gouvernement, de simplifier la législation dans de nombreux domaines du droit.

Nature juridique
La valeur juridique de l’ordonnance varie. Ayant été prise par le gouvernement, et avant sa ratification par le Parlement, l’ordonnance est un acte réglementaire, contrôlée donc par le juge administratif. Un décret en Conseil d'État et Conseil des Ministres peut alors modifier ses dispositions.

Les ordonnances doivent faire l'objet d'un projet de loi de ratification déposé devant le Parlement avant l'expiration du délai indiqué dans la loi d'habilitation. À défaut, elles deviennent caduques. Le projet de loi peut ne pas être voté, les ordonnances seront appliquées. Toutefois, la Constitution n'impose pas que le projet de loi de ratification déposé soit inscrit à l'ordre du jour des assemblées parlementaires. Tant qu'elle n'est pas ratifiée, l'ordonnance conserve une nature réglementaire. Après ratification, l'ordonnance devient de nature législative. C'est à l'occasion de la discussion de la loi de ratification que le texte de l'ordonnance peut faire l'objet d'un examen par le Conseil constitutionnel.

Depuis la loi constitutionnelle du 23 juillet 2008, les ordonnances ne peuvent être ratifiées que de manière expresse. Cette nouvelle disposition constitutionnelle exclut donc les ratifications implicites autrefois admises par la jurisprudence constitutionnelle et administrative.

Sources constitutionnelles du droit d'ordonnances
La Constitution de 1958 distingue trois cas d'utilisation des ordonnances :

- L'article 38 permet au gouvernement de légiférer par ordonnance sur habilitation du Parlement, qui précise dans quels domaines et pendant quelle durée le Gouvernement peut prendre des dispositions à caractère législatif. Cet article est de loin le plus utilisé.

- Les articles 47 et 47-1 prévoient que le Gouvernement peut mettre en œuvre par ordonnance un projet de loi de finances ou un projet de loi de financement de la sécurité sociale, si le Parlement ne s'est pas prononcé assez rapidement sur l'un de ces textes (en moins de 70 jours dans le premier cas, en moins de 50 jours dans le second). Le Gouvernement n'a pas utilisé ces dispositions jusqu'à présent.

- L'article 74-1, créé par la politique de décentralisation du gouvernement de Jean-Pierre Raffarin en 2003, autorise le Gouvernement à utiliser les ordonnances pour étendre aux collectivités d'outre-mer les lois métropolitaines. Cette habilitation est permanente et ne demande donc pas d'accord explicite du Parlement, qui peut toutefois décider de s'y opposer au cas par cas. Deux ordonnances ont été prises sur le fondement de l'article 74-1 au cours de l'année 2005.

Par ailleurs :

- Dans sa rédaction originelle (abrogée par la révision constitutionnelle de 1995), l'article 92 permettait en outre au gouvernement, dans les quatre mois suivant la promulgation de la Constitution de 1958, de prendre par ordonnance les mesures nécessaires à la mise en place des nouvelles institutions et permettant les ajustements nécessaires à la vie de la nation, à la protection des citoyens et à la sauvegarde des libertés.

- L'article 11 sur le référendum législatif a été utilisé par Charles de Gaulle pour demander, par la loi référendaire du 8 avril 1962, au peuple français le droit de prendre par ordonnance toute mesure législative ou réglementaire relative à l’application des accords d'Évian. Dans l'arrêt CE, 1962, Canal et Godot, le Conseil d'État a assimilé ces ordonnances aux ordonnances non ratifiés de l'article 38, permettant leur annulation contentieuse.

Controverse à propos de la signature des ordonnances
L’article 13 de la constitution disposant que « Le Président de la République signe les ordonnances », la question s’est posée de savoir si c’était ou non une compétence liée. Ainsi le Président est-il tenu de les signer, ou peut-il exercer un veto en le refusant ?

En principe, en droit, le présent a valeur d'impératif, mais la constitution de 1958 fait du président un arbitre, gardien des institutions.

La question s’est posée notamment en 1986 quand le président Mitterrand refusa de signer trois ordonnances du gouvernement Chirac : relatives à la privatisation de 65 groupes industriels, à la délimitation des circonscriptions électorales et à la flexibilité du temps de travail. Jacques Chirac, ayant une vision gaulliste de la fonction, reconnut le droit pour le Président de ne pas signer, mais mit en avant la légitimité plus récente dont bénéficiait son gouvernement par rapport à François Mitterrand, élu cinq ans auparavant. Le gouvernement fut forcé de s'incliner devant le refus du président, et dut faire voter le contenu de ses ordonnances selon la procédure législative normale.

Une controverse eut lieu et toucha le grand public puisqu’on assista à des débats entre juristes par journaux interposés. Dans son ouvrage La Constitution, le juriste Guy Carcassonne soutient que le refus de signature de François Mitterrand était constitutionnel. Il écrit dans son commentaire de l'article 13 que cette situation « illustre bien toute la distance qui peut occasionnellement séparer le droit pur du droit réel, l'interprétation scientifique de l'interprétation authentique. En droit pur, on pourrait parfaitement soutenir la thèse de la compétence liée [...]. Mais quelque thèse que l'analyse juridique permette de soutenir avec pertinence, c'est le droit réel qui tranche : la preuve que le chef de l'État peut refuser de signer des Ordonnances, c'est qu'il l'a fait ; et la preuve qu'il ne peut pas refuser de signer des Ordonnances, ce serait que le Parlement, comme il le peut lui aussi, voie là un motif de destitution. »

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