La vallée des loups

Il existe encore aujourd’hui en France des territoires secrets. Ce film est une quête personnelle, l’histoire d’un pari fou tenté par un passionné rêveur, un anti héros capable de briser toutes les barrières pour parvenir à son but : rencontrer des loups sauvages dans leur milieu naturel. Après trois années passées sur le terrain à bivouaquer en pleine nature par n’importe quel temps, le réalisateur parvient à remonter la piste des loups. Petit à petit, il observe, se rapproche et finit par se faire accepter par la meute. Contre toute attente les prédateurs magnifiques offrent alors un peu de leur intimité à ce drôle de personnage. Mais le film pose aussi la question des limites de cette intimité...

Entretien avec Jean-Michel Bertrand, le réalisateur

J’ai la passion pour la nature sauvage parce que j’ai le sentiment qu’une bonne partie des réponses aux questions fondamentales qui nous taraudent se trouve là…Tout près de nous. Il suffit d’ouvrir la porte et d’essayer de comprendre.

Au début de cette nouvelle aventure, j’ai bien conscience que je vais faire un film sur un animal que je ne verrai peut-être jamais. Ça ne va pas être facile, mais cette vallée paraît tellement idéale que si le loup n’est pas encore là… Je vais l’attendre.

Mais je vais y arriver, je serai ainsi une des rares personnes dans le monde à pouvoir observer des loups sauvages. Je garderai bien sûr cette vallée secrète pour mieux protéger les loups.

De la même façon que j’ai filmé l’aigle, je veux filmer le loup sauvage et libre.

Tout le monde est tellement habitué aujourd’hui à voir des loups filmés de très près, dans toutes les situations. Des loups filmés dans de grands enclos donnant l’illusion de la nature sauvage. Ou encore des loups apprivoisés exécutant leur numéro dans des paysages de rêve. Même chose pour les aigles d’ailleurs…

À l’état sauvage ces grands prédateurs évoluent librement sur d’immenses territoires. Ils ont des comportements sociaux et territoriaux à la hauteur de ces grands espaces. J’ai du mal à comprendre l’intérêt de raconter le sauvage en filmant des animaux captifs ou apprivoisés. Pas de liberté, pas de poésie, pas de magie. Seulement une image sur papier glacé, vide de son sens. Une imposture.

Pour moi observer ou filmer les animaux sauvages dans leur milieu, c’est une immersion, un parcours initiatique qui prend beaucoup de temps et qui n’est jamais gagné d’avance. Et ce sentiment fabuleux de se sentir chaque jour un peu plus perméable aux mystères du monde et vivre une vraie histoire d’amour avec la nature, dans les Alpes en particulier. Une histoire qui aura durée 3 ans. 

Un nouveau défi
Cette expérience d’un tournage qui s’est étalé sur plusieurs années, au cœur du territoire d’un couple d’aigles royaux, m’a conduit à poursuivre mes observations et à essayer de pénétrer un peu plus dans l’intimité de ces oiseaux farouches. J’ai continué à passer des semaines en montagne, à rester invisible, caché sous des affûts de roches ou de branchages. Dans mon esprit, j’étais déjà parti pour réaliser une suite logique de cette quête et de continuer le voyage en compagnie des grands rapaces.

C’est alors que les aigles m’ont conduit vers une aventure que je n’avais pas imaginée…

Un soir, je suis caché dans une vieille forêt de sapins. Une forêt magique, couverte de lichens et jonchée de grands rochers moussus. Cela fait plusieurs soirs que je viens ici. Je reste des heures caché au creux d’un rocher pour écouter le chant nuptial de la chouette chevêchette. Une chouette de montagne très discrète. Un elfe minuscule à peine de la taille d’un merle. À lui seul, cet oiseau évoque toute la force et le mystère de la nature sauvage. La chouette est là. Elle pousse son cri à quelques dizaines de mètres de moi. Des heures de patience enfin récompensées. Je décide de dormir sur place pour profiter de ces instants uniques.

C’est au cours de cette nuit que tout a basculé pour moi. J’ai pris la mesure de cette vallée. Une vallée immense (il faut deux jours pour la traverser), isolée et entourée de toutes parts d’immenses falaises qui l’enferment avec quelques rares accès par des cols étroits et difficiles à franchir. De plus, la vallée est très giboyeuse. Chamois, bouquetins, cerfs, chevreuils, sangliers sont nombreux. Au matin, une intuition s’insinue dans mon esprit…Ce territoire est idéal pour les loups. Une intuition qui deviendra une obsession. Voir le loup ! Filmer le loup sauvage...

Documentaire français de Jean-Michel Bertrand. 4 étoiles AlloCiné.


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