L'hermine

Michel Racine est un Président de cour d'assises redouté. Tout bascule le jour où Racine retrouve Ditte Lorensen-Coteret. Elle fait parti du jury qui va devoir juger un homme accusé d'homicide. Six ans auparavant, Racine a aimé cette femme... 

 

Entretien avec Christian Vincent le réalisateur 

Comment est né le projet de L’HERMINE ?
Christian Vincent : D’une envie partagée par mon producteur Matthieu Tarot et moi, de retrouver Fabrice Luchini 25 ans après LA DISCRETE. Restait à trouver un personnage et une histoire. En discutant avec Matthieu – un passionné du monde judiciaire – nous avons imaginé Fabrice en Président de Cour d’Assises.

Je pensais qu’il porterait assez bien la robe rouge et le col d’hermine. Comme je ne connaissais rien à l’univers de la justice, j’ai commencé par assister à un procès d’assises. Là, je découvre qu’une salle d’audience, c’est un peu un théâtre, avec son public, ses acteurs, sa dramaturgie et ses coulisses. C’est un ordre réglé qui ne demande qu’à être bousculé. Mais c’est avant tout un lieu de parole, fondé essentiellement sur l’oralité des débats. Un lieu où certains maîtrisent le langage, là ou d’autres, parfois, ne comprennent même pas les questions qu’on leur pose.

Il y a tout dans un procès d’assises. Il y a de la détresse humaine, des envolées lyriques, des moments d’ennui, des plongées dans l’intime, des camps qui s’affrontent, des gens qui mentent, des vérités qui s’opposent et beaucoup de questions qui restent sans réponse. Au bout de l’audience, parfois, il arrive que la vérité triomphe.

Mais pas toujours. Le plus souvent, on ne sait pas. Par quel biais avez-vous abordé l’écriture du scénario ?
C. V. : J’ai commencé en me rendant au tribunal de Bobigny. Quatre jeunes hommes étaient accusés de viol en réunion dans un local poubelle. Malgré le huis clos, avec l’accord des parties, j’ai pu assister au procès « côté cour », comme n’importe quel élève magistrat. A chaque suspension de séance, j’accompagnais le Président, Olivier Leurent, ses deux juges assesseurs, sa greffière et les neuf jurés dans ce que l’on peut appeler les coulisses.

J’ai vu les jurés poser des questions aux magistrats, faire connaissance les uns avec les autres, parler entre eux de ce qu’ils avaient entendu. J’ai vu des magistrats attentifs à leurs demandes, répondant à chacune de leurs questions, tout cela pendant cinq jours…

Et puis j’ai immédiatement renouvelé l’expérience, à la Cour d’Assises de Paris cette fois-ci. Un jeune homme était accusé d’avoir égorgé son amant. A partir de là, je pouvais commencer à écrire. J’avais les éléments qui me permettaient de le faire. Pour que le film soit juste, il fallait que la partie documentaire le soit.

Restait l’histoire…
C. V. : L’histoire est venue simplement, naturellement, de la personnalité du magistrat. J’imaginais un Président de Cour d’Assises proche de la retraite. Un homme respecté et craint au Palais de Justice, mais méprisé et ignoré à son domicile. Chez lui, à l’exception de son chien, on lui témoigne assez peu d’égards, alors qu’au tribunal on lui donne du Monsieur le Président.

J’imaginais donc un homme amer, peu enclin à la jouissance. Un homme qui, une seule fois dans sa vie, était tombé amoureux d’une femme. C’était cinq ou six ans auparavant. Un accident l’avait plongé dans le coma. En se réveillant, un visage de femme était penché sur lui. Ça avait été une illumination. Or, voici que cette femme réapparaît dans sa vie. Elle est jurée d’un procès dont il va diriger les débats. Il va devoir vivre à ses côtés pendant quelques jours… L’histoire était trouvée.

Fabrice Luchini incarne son rôle de magistrat avec sobriété. L’avez vous dirigé dans ce
sens ?
C. V. : Ça n’était pas nécessaire. Fabrice est un acteur aux antipodes de la méthode « actor’s studio » et de toutes les techniques qui prônent l’introspection, la recherche psychologique ou l’identification.

Néanmoins, avant que nous ne commencions à tourner, il a voulu rencontrer le Président de Cour d’Assises qui m’avait accueilli à deux reprises. Un jour, il est donc venu au Palais de Justice de Paris pour assister à une demi-journée de procès. Il a vu la sobriété avec laquelle le Président dirigeait son procès. Pas un mot plus haut que l’autre. Au bout d’une heure, il avait compris.

Drame de Christian Vincent avec Fabrice Luchini, prix d'interprétation masculine à la Mostra de Venise 2015. 3,8 étoiles Allociné.

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