No land’s song

En Iran, depuis la révolution de 1979, les femmes n'ont plus le droit de chanter en public en tant que solistes. Une jeune compositrice, Sara Najafi, avec l'aide de trois artistes venues de France (Elise Caron, Jeanne Cherhal et Emel Mathlouthi), va braver censure et tabous pour tenter d'organiser un concert de chanteuses solo...   

Note du réalisateur Ayat Najafi
Ma sœur Sara fait de la musique depuis son plus jeune âge. Témoin de son  combat quotidien pour étudier puis pratiquer son art (Sara est la première  femme diplômée en composition d’Iran), j’ai pu mesurer l’ampleur des difficultés  que rencontrent les femmes musiciennes dans mon pays. Avec ce  film, je veux montrer l’absurdité du quotidien des jeunes musiciennes iraniennes.  L’amour de la musique est la raison de vivre de Sara. Et le concert  dont elle porte le projet durant plusieurs années à travers ce film devient un  effort collectif pour voir un rêve devenir réalité. 

Le rôle de la musique dans la vie politique et sociale de l’Iran au XXe siècle  a toujours été crucial. À chaque période de notre histoire, la musique aura  été le porte-voix des aspirations des Iraniens. Si nombre des chanteuses ont  quitté l’Iran depuis la révolution, beaucoup d’entre elles vivent et travaillent  encore ici. L’ironie veut que les filles soient beaucoup plus nombreuses que  les garçons à fréquenter les écoles de musique.

Mais pourquoi apprendre  une discipline qu’elles n’auront pas le droit de pratiquer ensuite ?  Ce film suit pas à pas le processus d’organisation d’un concert à Téhéran,  questionnant de front le système de la censure, face à la caméra. En terme  de stratégie, nous avons opposé la détermination et la « fausse naïveté » de  Sara aux interdits que nous rencontrions. Cela nous a permis de filmer et  d’enregistrer (en caméra cachée) toutes ses démarches auprès des autorités,  ses rencontres avec les représentants politiques et religieux, et d’éclairer  la « logique » de la censure qu’impose le régime. 

La ligne musicale du film a pour leitmotiv le chant traditionnel révolutionnaire  Oiseau de l’aube (Morg-e Sahar) auquel Sara veut donner une voix  nouvelle. Le film est un hommage à Qamar, celle qui le chanta la première  fois. Artiste de légende en Iran, elle parvint dans les années 20 à briser les  tabous de la société iranienne et à libérer la voix des femmes, la déplaçant du domaine privé où elle restait confinée, au domaine public. C’est ce  même combat que Sara et ses amies doivent mener à nouveau aujourd’hui. 

La résistance de Qamar a inspiré le défi que nous avons lancé entre 2011 et  2013 aux gouvernements d’Ahmadinejad puis de Rohani.  Le film est centré sur le personnage de Sara. Les artistes françaises qui se  sont associées à son combat offrent un poignant contrepoint au point de  vue des protagonistes iraniens : entre choc des cultures et solidarité artistique,  le public vit ce voyage vers Téhéran à travers le regard d’Elise Caron,  Jeanne Cherhal et Emel Mathlouthi.

Nous avons ici fait appel à trois artistes  de générations et de mondes musicaux complémentaires, trois femmes  engagées et ouvertes à d’autres univers. De plus en plus conscientes de  la réalité vécue par leurs homologues en Iran alors qu’elles rejoignent enfin  Sara à Téhéran, celles–ci participent activement au bras de fer de Sara avec  les autorités, au côté des chanteuses iraniennes Parvin Namazi et Sayeh  Sodeyfi.

La seule arme de ces femmes : la musique et le chant, expression  par excellence d’un corps féminin que ce régime n’a de cesse de combattre.

À l’issue de notre aventure, une porte s’est ouverte pour la voix des femmes,  le temps d’une soirée, le 19 septembre 2013, à l’opéra de Téhéran : mais  qu’en sera-t-il demain ? 

Documentaire musical d'Ayat Najafi. Prix du meilleur film documentaire au Festival des films du monde de Montréal (Canada, 2014). 4,1 étoiles AlloCiné.

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