Linky : controverses sur le nouveau compteur d’électricité

Linky est le nom du compteur communicant développé par Enedis (anciennement ERDF), principal gestionnaire du réseau électrique de distribution en France en application de directives européennes préconisant la généralisation de ce type de compteurs. Il est prévu qu'il intègre trente-cinq millions de foyers français à l'horizon 2021. Ce déploiement a fait l'objet de controverses...

Entre l'annonce de son arrivée dans les foyers français et son déploiement, le compteur Linky est l'objet de diverses critiques formulées par des associations : mise en cause possible de la vie privée, mise en cause possible de la santé publique par les ondes électromagnétiques, faute environnementale, selon eux, consistant à se débarrasser de millions de compteurs actuels en parfait état de marche pour la plupart, etc.

En 2016, plus d'une centaine de communes votent des délibérations pour s'opposer au déploiement des compteurs communicants d'électricité (Linky) mais aussi de gaz (Gazpar) et d'eau.

Utilisation des données
La Commission nationale de l'informatique et des libertés (CNIL) s'inquiète en 2013 du respect de la vie privée des utilisateurs ; elle recommande que les courbes de charge ne soient pas collectées de façon systématique, mais uniquement lorsque cela est justifié par les nécessités de maintien du réseau ou lorsque l'usager en fait expressément la demande pour bénéficier de services particuliers. Fin novembre 2015, elle précise ses recommandations : conservation de la courbe de charge dans la mémoire du compteur limitée à un an, seulement avec l'accord de l'usager, et remontée de ces données à ERDF ou à des tiers seulement avec le consentement de l'abonné. Finalement, toutes les informations collectées seront chiffrées à la source, c'est-à-dire dans le compteur, et l'enregistrement des données peut être désactivé à tout moment par l'usager, qui a le droit de refuser dès le départ la transmission des informations par ERDF. Concernant le possible piratage des boitiers, chaque compteur dispose d'une clé spécifique de telle manière que si un concentrateur détecte l'ouverture d'un capot et une forte variation de la consommation, il s'arrête et efface ses clés par précaution. Par ailleurs, selon Patrick Dardoise : « Le message envoyé contient le numéro du compteur, l'évolution de consommation depuis la veille, et des informations techniques. En aucun cas le profil de consommation toutes les dix minutes. Et tout est crypté. ».

Le 19 avril 2016, la Ligue des droits de l'Homme (LdH) demande par communiqué un moratoire sur l'installation des compteurs Linky et demande à la Cnil de vérifier le respect par ERDF du « pack de conformité » qu'elle lui avait assigné.

Ondes et CPL
En 2011, des associations pointent les risques sanitaires pouvant être causés par les ondes électromagnétiques émises par le compteur Linky du fait de son utilisation des courants porteurs en ligne (CPL).

Questionné à l'Assemblée nationale, le ministère a prétendu qu'une étude du Centre de recherche et d'information indépendantes sur les rayonnements électromagnétiques (CRIIREM) avait montré qu'« il n'y avait pas de risque sanitaire aigu ni de risque d'effets physiopathologiques à craindre en lien avec l'exposition aux rayonnements extrêmement et très basses fréquences, radiofréquences et hyperfréquences » au niveau du compteur lui-même qui est un système CPL. Le CRIIREM a protesté fortement par la voix de son Président : « C’est une présentation très malhonnête de notre expertise ! » tempête Pierre Le Ruz, président du Criirem. « Car cette absence de risque concerne uniquement les « effets thermiques » de ces compteurs » .

Le ministère de l'Écologie précise de son côté que « le niveau d'ondes électromagnétiques générées par Linky est conforme à la réglementation en vigueur et qu'il n'y a donc pas de risque sanitaire attaché à l'utilisation de ce compteur ». Le Conseil de l'Europe a en effet fixé un seuil maximum de puissance pour les ondes électromagnétiques. Il s'élève à 0,6 volt par mètre. Linky, à une distance de 50 cm à 1 m, émet de son côté des ondes électromagnétiques oscillant entre 0,2 et 0,4 volt par mètre. Depuis 2012, trois syndicats régionaux d'Indre-et-Loire (SIEIL), de Lyon (SIGERLy) et de Paris (SIPPEREC) ont également réalisé des mesures complètes relatives aux émissions de Linky et concluent à son innocuité pour la santé.

En parallèle, comme c'est possible pour les box internet, Linky fonctionne par courants porteurs en ligne (CPL). Une technologie qui lui permet de communiquer directement grâce aux câbles électriques, sans passer par des techniques comme le WiFi. Des associations de personnes déclarant souffrir d'hypersensibilité aux ondes, comme Priartem-Electrosensibles, s'inquiètent alors de l'envoi par Linky "en permanence des informations par CPL" qui ferait rayonner le compteur "dans toutes les pièces de la maison". ERDF précise de son côté que l'envoi d'informations via le réseau électrique ne dure pas toute la journée, mais uniquement quelques secondes par jour.

Le 26 avril 2016, le Premier ministre Manuel Valls profite de son discours de clôture de la quatrième conférence environnementale depuis l'élection de François Hollande pour affirmer son soutien pour Linky qui, selon lui, "ne présente aucun risque pour la santé".

Propriété du compteur
Des communes s'opposent au déploiement des compteurs Linky sur leur territoire, certaines concernant des communes de plusieurs dizaines de milliers d'habitants (par exemple Yerres, Bagnolet, etc) jusqu'à cinquante mille habitants (par exemple: Bondy, Fontenay-sous-Bois. À la mi-mai 2016, selon le journal La Dépêche, ce sont 149 communes qui refusent ces compteurs, dont dix en Dordogne. Pour sa part, ErDF a publié le calendrier d'installation des compteurs Linky dans l'ensemble des 36 000 communes de France.

Selon le SIPPEREC dans un communiqué datant de 2013, les collectivités locales sont, de droit, propriétaires des ouvrages, des réseaux de distribution, des compteurs et des systèmes de comptage, comme cela est prévu dans les cahiers des charges de concession, signés par EDF puis ERDF, ainsi que par la loi (article L 322-4 du Code de l’Énergie). Or, le 1 avril 2016, la Direction générale des collectivités locales (DGCL) adresse un courrier aux préfectures et affirme que les collectivités territoriales ne peuvent faire obstacle au déploiement de Linky. Selon elle, si les compteurs sont effectivement la propriété des autorités organisatrices de distribution (AOD) d'électricité, « seul le concessionnaire a le droit de les développer et de les exploiter » et, les communes ayant conclu un contrat de concession avec ERDF, elles ne peuvent pas refuser le déploiement du compteur.

La Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR) demande entre temps à un cabinet d'avocat une étude juridique, qui affirme que le déploiement des compteurs est une obligation légale et estime qu'il serait « inadéquat pour le maire de se prévaloir de son pouvoir de police générale » pour refuser l’installation des compteurs communicants dans le territoire de sa commune.

En avril 2016, ERDF dépose un recours devant le tribunal administratif de Melun pour contester une délibération de la commune de Varennes-sur-Seine s'opposant au déploiement de Linky. La commune a néanmoins décidé de maintenir sa délibération

Prix
Des voix s'élèvent également à propos du coût de l'installation de ces nouveaux compteurs pour les foyers français. L'enveloppe totale pour le projet (à l'horizon 2020) est estimée à 5 milliards d’euros, soit un coût unitaire moyen d'environ150 euros par compteur. Le 9 juillet 2013, le Premier ministre, Jean-Marc Ayrault, lors de l'annonce du déploiement du compteur Linky, a précisé que l'objectif est que « la charge finale » soit « indolore » pour les consommateurs. Selon la Commission de régulation de l'énergie, l'autorité de régulation des marchés de l'énergie, les investissements d'ERDF seront contrebalancés par les économies réalisées (disparition de la relève à pied, réduction des fraudes et des dysfonctionnements de compteurs, etc.).

Les associations de consommateurs, dont la CLCV, s'inquiètent cependant au sujet de la relève des compteurs à distance possible grâce à Linky et de possibles licenciements des techniciens chargés d'effectuer les relevés des compteurs jusqu'alors, ainsi que des agents en contact avec la clientèle (mises en service, déménagements…), opérations qui pourront être réalisées à distance. ERDF répond que de sa conception à sa fabrication, le déploiement du compteur Linky devrait créer près de 10 000 emplois en France.

Consommation
L’UFC-Que Choisir souligne que la généralisation des compteurs Linky va entraîner 10 millions de foyers à souscrire à une puissance d'abonnement plus élevée car ce nouveau compteur, à l'inverse des compteurs actuellement en service, ne supporte aucun dépassement de la puissance souscrite et se coupe instantanément. Ce surcoût d'abonnement représenterait globalement 308 millions d'euros pour les clients d'EDF sur la base d'une facturation unitaire de 36 euros pour le simple changement de puissance (effectué à distance via le réseau informatique) et qui selon UFC—Que Choisir, pourrait rapporter à EDF 724 millions d'euros.

ERDF conteste les éléments communiqués par UFC—Que Choisir notamment sur le coût d'un changement d'abonnement. Depuis la délibération du 7 juillet 2011, la CRE a demandé que « la prestation de changement de puissance soit réalisée gratuitement par ERDF ». Dans sa réponse à l'UFC—Que Choisir, ERDF a en conséquence rappelé que l'entreprise « respectera le barème de prestations décidé par la CRE ».

De plus, ERDF note que l'association de consommateurs UFC a réalisé une étude sur un panel de 201 compteurs classiques et a extrapolé les résultats à 35 millions de futurs compteurs communicants, ce qui pose un problème méthodologique de fond. Le retour d'expérience réalisé sur les 300 000 compteurs Linky actuellement en service (validé par la CRE) montre que les cas de modification d'abonnement n'ont représenté que 0,87 % des situations rencontrées. Le compteur communicant n'est pas plus sensible aux dépassements de puissance qu'un compteur classique d'après les tests métrologiques réalisés.

Un groupe de chercheurs du CNRS publie en 2015 une étude empirique « TicElec », réalisée de 2012 à 2014 dont le but est de trouver de premiers éléments de réponse quant aux réelles économies réalisées avec une technologie comme Linky. À Biot(Alpes-Maritimes), une centaine de ménages volontaires ont eu accès à une information régulière (et pour certains non-intrusive) de leur consommation électrique. Deux groupes de familles étaient équipés de compteurs intelligents ou capteurs nomades et un groupe témoin non équipé. Les foyers équipés avaient des informations plus ou moins fines (au jour le jour, jusqu’à une indication de la consommation par type d’équipement (chauffe-eau, chaudière, électroménagers par exemple). Ceux qui ont suivi leur consommation ont effectivement réduit (de 23 % en moyenne) leur utilisation d’électricité. En outre une information « neutre » (ne comparant pas la consommation du foyer avec celle des autres) s'est alors montrée la plus efficace. Ceux qui ont eu une information plus fine ont moins consommé que ceux qui n’avaient qu’une information globale.

A contrario, le document "Linky : analyse des bénéfices pour l'environnement" publié par l' l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) rapporte qu'une expérience menée en Australie a montré, chez les consommateurs bénéficiant d’un affichage dans leur logement, une baisse effective de consommation de 10% pendant les deux premiers mois, se réduisant à 5% deux mois plus tard, pour un retour à la situation de départ au bout de six mois.

Texte sous licence CC BY-SA 3.0. Contributeurs, ici. Photo : Ener356.

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