Toni Erdmann

Quand Ines, femme d’affaire d’une grande société allemande basée à Bucarest, voit son père débarquer sans prévenir, elle ne cache pas son exaspération. Lorsque son père lui pose la question « es-tu heureuse? », son incapacité à répondre est le début d'un bouleversement profond...

Entretien avec Maren Ade la réalisatrice 

Comment est née l'idée du film et celle de ce personnage  haut en couleur inventé par le père d'Ines : Toni Erdmann ?Ma famille est souvent ma première source d'inspiration, elle nourrit mon récit et peut influencer les liens entre les personnages. Winfried, le père d'Ines, s'invente un alter ego, comme une tentative désespérée et audacieuse de bousculer leur relation père-fille. Toni Erdmann prend alors vie ! l'humour est souvent le meilleur moyen pour transcender la réalité. Winfried, incapable de communiquer avec sa fille, trouve ici un moyen d'échapper à cette situation en créant ce personnage. L'humour est sa seule arme, et elle va lui permettre de communiquer à nouveau ... 

Le film est-il un appel au lâcher prise ?
Pour moi, le "lâcher prise", c'est trop proche du mot "abandon", ça me fait trop penser à ces expressions tirées de bouquins de développement personnel. Mon film est moins un appel ou lâcher prise qu'une injonction à s'assumer pleinement. Ce que fait Ines à la fin du film, c'est quelque chose d'assez radical et il fout un certain courage pour le faire. Ça peut paraître un peu dingue, mais c'est un nouveau départ pour elle : à partir de ce jour-là, elle sera toujours la femme qui a ouvert la porte de chez elle à son boss en tenue d'Eve.

Elle ne lâche rien du tout, en réalité, on peut dire qu'elle reprend les rênes. A la toute fin , on est face à deux personnes qui ont peut-être su mûrir et s'accepter un peu plus telles qu'elles sont. On pourrait également considérer que Toni "se cache" derrière le rôle, comme on dit, mais moi, je pense plutôt que Winfried se dévoile pleinement dans les rôles qu'il interprète. C'est particulièrement vrai pour la partie kukeri qui est l'illustration de son vrai moi, il est cette créature de grande taille pleine de mélancolie avec une drôle de tête.

Le film ne montre-t-il pas également que tout a une fin ?
Toute relation parents-enfants est faite de ruptures. Quand un nouveau chapitre s'ouvre pour un enfant, cela veut souvent dire, pour les parents, que quelque chose arrive à son terme. Je l'observe avec mes propres enfants actuellement. Mon fils est ravi à chaque centimètre qu'il prend quand moi, c'est la mélancolie qui me gagne. C'est pour cette raison qu'il y a quelques scènes de ruptures dans le film.

Winfried a un étudiant qui décide d'arrêter ses études, son chien meurt, lui et sa fille se disent ou revoir un certain nombre de fois sans jamais vraiment se dire adieu. Leur embrassade à la fin du film est un moyen de transmettre cette idée d'un adieu. Le costume kukeri transforme Winfried, et ainsi, pendant un court instant, Ines a l'impression de se retrouver devant son père d'avant, grand et maladroit, ce père qu'elle a connu quand elle était enfant. L'espace d'un instant, elle peut redevenir la petite fille qu'elle était.

Drame de Maren Ade. Prix de la Critique internationale Cannes 2016. 4,2 étoiles presse Allociné.

Pour investir dans des films de cinéma :

75008 - CINÉFEEL PROD http://www.cinefeelprod.com


Voir toutes les newsletters :
www.haoui.com
Pour les professionnels : HaOui.fr