Le vin rosé

Le vin rosé ne possède pas de définition satisfaisante malgré de longs débats tant en France qu'à l'international. En effet, si la législation européenne ou l'Organisation internationale de la vigne et du vin donnent bien une définition du vin, elles n'en proposent aucune pour les vins blancs, les vins rouges ou encore les vins rosés. En fait, les usages se sont parfaitement accommodés de ce vide, puisqu'on édicte des règlements et des circulaires, on négocie, on signe des contrats, bref on reconnaît une existence indéniable au rosé dans le monde du vin. La controverse actuelle autour des mélanges de vin rouge et de vin blanc pour élaborer du rosé est l’occasion pour les producteurs de rappeler la spécificité technique de ce produit. Le vin rosé peut être décrit comme le produit issu de la fermentation alcoolique d’un moût obtenu par une macération pelliculaire préfermentaire maîtrisée de raisins noirs (à jus blanc)...

Controverses autour des mélanges de rouge et de blanc
Fin janvier 2009, les 27 États de l'Union européenne (UE), dont la France, ont adopté un projet de règlement autorisant les mélanges de rouge et de blanc à prendre le nom de « rosé ». Ce projet était par ailleurs soutenu par le Comité Européen des Entreprises de Vin (CEEV). Devant la protestation de vignerons, en particulier de Provence, et devant le report d'une décision de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) concernant la concordance de cette autorisation avec ses propres règles, la décision de Bruxelles a été repoussée à juin 2009.

François Millo, le directeur du Conseil interprofessionnel des vins de Provence, remarquait que cela équivalait à « légaliser la contrefaçon », au moment même où les États du monde entier prétendent lutter contre celle-ci. Certaines organisations ou lobbys (notamment d'Afrique du Sud et d'Australie, où ces procédés sont déjà utilisés) cherchent à autoriser le mélange de vin rouge et de vin blanc pour faire du vin rosé, ce qui est fortement contesté par les principaux producteurs de vin rosé « traditionnel ». Le 8 juin 2009, la commissaire à l'agriculture européenne Mariann Fischer Boel a annoncé que l'Union Européenne renonçait à légiférer sur le vin rosé : le statu quo sur le mode d'élaboration du vin rosé dans l'union européenne est donc maintenu. Les producteurs voyaient surtout dans cette mesure une dérive vers une viticulture et une œnologie exclusivement industrielles au détriment d'une tradition partagée collectivement.

Du point de vue technique, le vin rosé n’est ni un vin blanc, ni un vin rouge, ni un mélange de vin blanc et de vin rouge car il possède un mode d’élaboration spécifique.

La différence essentielle entre le vin rosé et le vin rouge porte sur le moment et la durée de la macération pelliculaire. Dans le cas du vin rosé, la macération pelliculaire se déroule dans le moût avant fermentation alors que pour le vin rouge elle a lieu avant, pendant et après la fermentation. La diffusion des composés des pellicules se produit donc en phase aqueuse pour le vin rosé mais en présence d’alcool pour le vin rouge. Les molécules extraites ne sont pas les mêmes dans les deux cas. D’autre part, la durée de la macération pelliculaire influence la quantité des composés extraits. Dans le cas du vin rosé, la macération pelliculaire varie de quelques minutes à quelques heures alors que pour le vin rouge elle dure de quelques jours à quelques semaines. Les composés de la pellicule diffusent plus intensément dans ce deuxième cas. On ne peut donc pas imaginer créer un vin rosé de qualité en éclaircissant la couleur d’un vin rouge.

La différence essentielle entre le vin rosé et le vin blanc porte sur la nature des cépages utilisés. La composition des cépages blancs et des cépages noirs est très différente. Au-delà de la couleur, ils n’ont pas la même composition aromatique ni la même « texture ». On ne peut donc pas imaginer créer un vin rosé de qualité en intensifiant la couleur d’un vin blanc. Dans ce cas, les vins rosés auraient le goût des vins blancs car ils seraient composés d'au moins 98 % de blanc. Ils s’approcheraient des caractéristiques des quelques rares cépages blancs qui se sont répandus en Europe (chardonnay, sauvignon …) : le risque de standardisation serait important. La richesse et la diversité des vins rosés du monde sont menacées. Cette palette de couleur et de goût est pourtant un atout pour le vin rosé : il rend possible sa consommation à tout moment de la journée, de l’année et de la vie.

Jouer sur le caractère évocateur de la couleur rosée sans en proposer l’arôme et le goût risque donc de décevoir le consommateur.

En France seule une zone d'appellation autorise l'assemblage de vins rouges et blancs en vue de l'obtention d'un rosé, la Champagne, où lors de l'élaboration de la cuvée, il est possible d'assembler des vins de Chardonnay avec ceux de Pinot noir et Pinot Meunier. Pour autant, il ne s'agit pas d'un simple mélange de vins finis puisque cette cuvée doit subir la prise de mousse qui correspond à une nouvelle fermentation, celle de la liqueur de tirage et qui donne la mousse en bouteilles. Elle est ensuite suivie d'une période de vieillissement en bouteilles, de 15 mois minimum dont 12 mois sur lies, et qui contribue encore à modifier le profil du vin obtenu grâce aux phénomènes d'autolyse des levures. Une autre exception à cette interdiction de coupage persiste encore en Europe pour le « vino tinto de mezcla » produit en Espagne.

Texte sous licence CC BY-SA 3.0. Contributeurs, ici. Photo : Fotolia.com.

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