Le géant égoïste

Arbor, 13 ans, et son meilleur ami Swifty habitent un quartier populaire de Bradford, au Nord de l’Angleterre. Renvoyés de l’école, les deux adolescents rencontrent Kitten, un ferrailleur du coin. Ils commencent à travailler pour lui, collectant toutes sortes de métaux usagés. Kitten organise de temps à autre des courses de chevaux clandestines. Swifty éprouve une grande tendresse pour les chevaux et a un véritable don pour les diriger, ce qui n’échappe pas au ferrailleur. Arbor, en guerre contre la terre entière, se dispute les faveurs de Kitten,  en lui rapportant toujours plus de métaux, au risque de se mettre en danger. L’amitié des deux garçons saura-t-elle résister au Géant égoïste ?...

Entretien avec Clio Barnard, le réalisateur

Quelle est l’origine de ce projet ?
J’avais depuis longtemps l’ambition d’adapter le conte d’Oscar Wilde qui a donné son nom au film, Le Géant égoïste (The Selfish Giant). Dans ce récit, le géant interdit aux enfants de rentrer dans son jardin, si bien qu’ils

n’ont nulle part où jouer. Mais lorsque le géant découvre que, sans leur présence, son jardin se meurt, il laisse les enfants revenir. Il découvre l’amour au moment même où il le perd. Si vous vous ouvrez à l’amour, vous vous ouvrez également à la souffrance. C’est une histoire très forte et profonde, car tout le monde a fait l’expérience de la perte. J’ai vécu 19 ans près de Bradford, là où le film se passe, et j’ai été témoin de l’exclusion d’enfants des parcs des logements sociaux… des marginaux au sein de communautés marginalisées, sans avenir, relégués à la lisière d’une économie décimée et désindustrialisée. Je voulais explorer leur exclusion, mais je n’arrivais pas à intégrer le géant à cette histoire, jusqu’à ce que j’en apprenne davantage sur les casses et leurs propriétaires. Si la majorité de ces chantiers de ferraille fonctionnent selon des règles bien établies afin de réduire le vol de métal, j’ai aussi découvert l’existence de chantiers plus modestes, moins régulés, et me suis interrogée sur l’ambiguïté de leurs propriétaires. Ces personnes offrent-elles des opportunités aux jeunes, ou cherchent-elles au contraire à les exploiter ? J’ai alors trouvé mon géant, que j’ai surnommé « Kitten » (« Chaton »).

Comment avez-vous réussi à faire un film contemporain d’un conte de l’ère victorienne ?
Le Géant égoïste est certes un texte de l’ère victorienne, mais j’ai d’abord souhaité faire un film contemporain qui transcende les époques en fusionnant le conte de fée et le réalisme social, deux genres apparemment contradictoires. Les similitudes entre ces deux mondes sont nombreuses. On peut voir Kitten comme un équivalent de Fagin, le personnage du roman Oliver Twist de Dickens, chef d’une famille de substitution, qui recueille les enfants livrés à eux-mêmes pour en faire des voleurs. Arbor, de son côté, a quelque chose du « Renard », un autre personnage du célèbre roman de Dickens.

La notion d’un « retour vers le futur » est un thème clé de mon film. Ces enfants, avec leurs chevaux et leurs chariots, ferraillent et fouillent les poubelles dans un paysage désindustrialisé, où la verdure a repris ses droits. On voit des centrales électriques hors d’usage perdues dans le brouillard, par-delà champs et moutons. Mes deux protagonistes survivent d’une manière qui préfigure peut-être leur avenir et celui de leur génération, dans un monde dépourvu d’emplois, où les ressources se raréfient. L’ironie du sort est que les ferrailleurs contribuent à démanteler des éléments de l’infrastructure moderne de leur propre pays, comme les câbles en cuivre des voies ferrées, afin de nourrir la croissance des pays en voie de développement, en particulier la Chine. Au départ, j’avais écrit l’histoire du point de vue du Géant mais il m’a vite semblé clair qu’il serait plus poignant de mettre les enfants en avant. Je me suis donc demandé si le film devait encore s’appeler Le Géant égoïste, mais l’égoïsme du titre évoque pour moi d’autres thème cruciaux du film : la cupidité, l’individualisme. Et tout cela est très contemporain. Lorsque des gens tout en haut de l’échelle se mettent à voler (et beaucoup considèrent l’évasion fiscale, la fraude aux notes de frais ou la dérive des marchés financiers comme du vol), alors ces pratiques illicites sont reproduites tout en bas de la hiérarchie, là où se trouve Kitten.

Drame britannique, d’après Oscar Wilde

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