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Chômage structurel : pourquoi est-il aussi élevé en France ? Si depuis la crise financière de 2009, le taux de chômage ne cesse d’augmenter en France, cela fait tout de même 30 ans qu’il fluctue autour des 9%. Serait-ce à ce niveau que se situe son taux de chômage structurel ? Ce taux d’équilibre qui est atteint lorsque l’économie est à son niveau d'équilibre, c’est-à-dire lorsqu’il n’y a pas de surproduction (haut du cycle économique) ou en sous-production (bas du cycle). Pourquoi le taux de chômage structurel est-il aussi élevé en France ? Différentes théories existent. Le nouveau gouvernement saura-t-il faire le bon diagnostic pour engager les actions efficaces ? Rien n’est moins sûr car coincé entre idéologie et électorat, ses marges de manœuvre paraissent bien faible… Attention aux confusions : deux approches Vision normative : Le taux de chômage naturel Vision positive : Le taux de chômage d'équilibre On distingue deux applications de cette conception du taux de chômage structurel : - Le NAIRU, qui provient principalement d'une approche empirique (on cherche à réaliser une estimation économétrique du taux de chômage structurel). - Le taux de chômage d'équilibre du modèle WS-PS, qui provient principalement d'une approche théorique (on cherche à mettre en avant les facteurs explicatifs du chômage structurel, modélisés selon des comportements microéconomiques), mais peut néanmoins être estimé empiriquement. Explication du chômage structurel Rigidités et chômage structurel Rigidités exogènes Cotisations sociales (côté demande de travail) Exemple : salaire minimum (SMIC) Prestations sociales (côté offre de travail) Exemple : allocations chômage (RSA) Protection de l'emploi (côté offre de travail) Exemple : pouvoir de négociation des syndicats Rigidités endogènes Modèle Insider-Outsider (Lindbeck et Snower 1989) L'entreprise est très averse au risque, principalement du fait du coût de rotation de la main d'œuvre, et du pouvoir de négociation décentralisé. Ainsi, plutôt que d'embaucher des outsiders prêts à accepter un salaire réel plus faible, les entreprises préfèrent garder les insiders et les rémunérer à un salaire réel plus élevé que celui du niveau concurrentiel. Le modèle explique donc la persistance du chômage. Les contrats implicites (Azariadis 1975) Même situation que le modèle insider-outsider. Il y a information imparfaite, les salariés ne savent pas ce qu'ils vont gagner, ils sont plus averse au risque que les entreprises. Pour partager le risque de façon optimale, les salariés établissent avec l'entreprise un contrat implicite qui permet de garantir le salaire réel à un certain niveau, déconnecté de la conjoncture économique. En période de récession, les salaires réels versés sont supérieurs aux salaires réels conjoncturels (=productivité des salariés), donc les entreprises licencient. Les travailleurs sont protégés sur le salaire, mais pas sur l'emploi. Le salaire d'efficience (Shapiro et Stiglitz 1984) Situation d'aléa moral: les employeurs ne pouvant pas connaître parfaitement l'effort fourni par les salariés dans leur travail. Afin de l'inciter à fournir l'effort maximum, l'employeur paye le salarié un peu plus que ce qu'il peut attendre dans une autre entreprise : ce salaire réel plus élevé que le salaire réel du marché est le salaire d'efficience. Le salarié aura donc tout intérêt à fournir le maximum d'effort de façon à rester dans l'entreprise qui le paie le plus. À l'inverse si son salaire est au niveau du prix d'équilibre du marché, le salarié ne perd rien à changer d'emploi et peut donc "relâcher" ses efforts au travail : c'est le salaire de réservation. Le taux de salaire entretient donc une relation croissante avec la productivité de l'employé. La négociation salariale (Mc Donald et Solow 1981, Nickel et Andrews 1983) La négociation salariale peut être endogénéisée. La négociation n'est plus décentralisée, elle se fait collectivement par les insiders, contrairement au modèle de Lindbeck et Snower. Les agents ont des stratégies différentes, la détermination du salaire se fait selon la maximisation de fonctions objectives de Nash. La négociation peut porter sur le salaire et l'emploi (modèles des contrats optimaux) ou seulement sur le salaire (modèles des droits à gérer). Les seconds sont plus efficaces sur le plan empirique. L'hypothèse de décentralisation (d'exclusion des outsiders dans la négociation) fait apparaître une explication de la segmentation du marché du travail (marché stable contre marché précaire), plutôt que la persistance du chômage. Rigidités et chômage frictionnel Modèles de "Job Search ou prospection d'emploi" (Stigler 1962) Mécanisme : Le chômeur est dans un processus de prospection d'emploi. Il existe un différentiel de salaire entre les secteurs de l'économie. L'agent cherche à trouver le meilleur salaire en minimisant ses coûts de recherche. Modèles de "Matching ou appariement" (Pissarides 1990) Mécanisme : on cherche à endogénéiser le délai nécessaire pour retrouver un autre emploi. Aussi, le comportement des entreprises n'est pas seulement défini par un salaire réel exogène. La rencontre entre les offreurs et demandeurs de travail se formalise par des fonctions d'appariement (facteurs: nombre de chômeurs et nombre d'emplois vacants selon la courbe de Beveridge qui relie négativement ces deux éléments). Type de chômage : Le chômage est involontaire, il correspond aux actifs qui recherchent activement un emploi mais qui n'ont pas encore «matché» une offre d'emploi. Effet d'hystérèse du chômage On peut retenir trois causes principales - mais non exhaustives - de l'effet d'hystérèse: - Dégradation du capital humain: les chômeurs de longue durée connaissent une dévalorisation de leur capital humain. Ainsi, ils seront considérés par les employeurs comme moins productifs, donc moins rentables. On dit généralement que "l'employabilité" se dégrade, et que le chômage de longue durée a donc tendance à "s'auto-entretenir". - Niveau élevé des taux d'intérêts et baisse de l'investissement: en phase de reprise, i.e. au début de la période d'expansion, les entreprises sont contraintes de réduire leurs investissements de capacité, elle n'embauchent pas. - Pouvoir de négociation des insiders: pendant la récession, les salaires sont rigides à la baisse. En revanche, en période d'expansion, les insiders réclament des augmentations de salaire. Dans le cadre de la théorie des insiders-outsiders de Lindbeck et Snower, l'entreprise est considérée très averse au risque du fait des coûts de rotation de la main d'œuvre. Ainsi, l'entreprise préfère rémunérer les insiders à un salaire réel plus élevé que le niveau concurrentiel plutôt que d'embaucher des outsiders pourtant prêts à recevoir un salaire plus faible. Texte sous licence CC BY-SA 3.0. Contributeurs, ici. Photo : Fotolia.com. 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