La fleur du Verseau : le perce-neige

Petite fleur blanche parfumée qui fleurit à la fin de l’hiver, elle annonce le printemps. Si bien qu’en Occident elle est devenue symbole de consolation et d’espérance. On la trouve parfois dès la première quinzaine de janvier dans des lieux abrités.

Son nom latin est Galanthus Nivalis, il vient du grec « gala » qui signifie « lait », et « anthos » qui se traduit par « fleur ». Le perce-neige serait donc la « fleur de lait ». D’ailleurs, dans certaines régions, elle porte le joli nom de « goutte de lait ».



En français, on ne sait si on doit en parler au féminin ou au masculin et de ce fait on peut dire aussi bien le perce-neige que la perce-neige, de même au pluriel on peut ou non accorder le mot « neige », le verbe ne prenant jamais la marque du pluriel dans un nom composé, ainsi on peut écrire les perce-neige ou les perce-neiges.

C’est une plante vivace, à bulbe, qui fleurit tous les ans. Elle n’offre qu’une seule fleur et deux petites feuilles très étroites. Et pourtant malgré son extrême modestie, le perce-neige est l’objet de bien des légendes.


La première raconte la naissance du perce-neige. Alors qu’elle se battait avec la Sorcière Hiver qui ne voulait pas lui laisser la place, la belle fée Printemps se coupa au doigt. Quelques gouttes de sang tombèrent sur la neige qui la firent fondre. Aussitôt, une fleur poussa à la place et la fée Printemps triompha de la sorcière Hiver.


Dans une autre légende, le perce-neige devient un symbole d’espoir. En effet, alors qu’Adam et Eve venaient d’être chassés du Paradis terrestre, Eve se désespérait pensant que l’hiver durerait toujours. C’est alors qu’un ange apparut transformant une partie des flocons de neige en fleurs suggérant par là que l’hiver allait bientôt finir et céder sa place au printemps.

Dans un autre récit, l’ange ramasse une poignée de neige et la répand sur le sol. Partout où la neige tombée de sa main touche le sol des perce-neige jaillissent et fleurissent.


Dans une variante de ces légendes, on raconte que l’ange pointa du doigt le sol où des larmes de pénitence étaient tombées et, surprise… il apparut une petite plante à la fleur en forme de larme. Il donna cette fleur à Eve en lui disant que c’était là l’assurance du retour du bonheur pour elle et pour sa descendance. Le perce-neige est d’ailleurs également connu sous le nom de « larmes d’Eve ». Cette légende a également cours en Italie.

En Allemagne, on raconte cette vieille légende : Ce serait la neige que Dieu créa en dernier dans la nature. Cependant, sous ce manteau blanc, il ne restait plus la moindre couleur. La neige implora l’herbe verte, la rose rouge et toutes les autres fleurs de lui prêter un peu de couleur, mais tous refusèrent. Seule la toute dernière eut pitié et donna à la neige sa couleur, elle était blanche et c’était le petit perce-neige. En signe de reconnaissance, la neige lui permit de fleurir sans lui faire de mal alors qu’elle recouvre encore la nature.

Pour les Indiens de la Prairie, le perce-neige est un symbole de courage, d’endurance et de fidélité inébranlable.

Et puis, il y a ce joli conte de Roumanie qui raconte que par une nuit d’orage, une vieille femme se rendit au palais pour demander asile. Le prince la vit et lui demanda de partir ou de travailler pour gagner le droit d’être abritée. C’est alors que la vieille femme se changea en princesse et lui di : « Vous n’avez ni pitié, ni âme. Vous serez transformé en cheval et le sort ne sera rompu seulement si une jeune fille sincère vous donne un cadeau ».

Bien des années passèrent. Le prince était malheureux et désolé de ce qu’il avait fait. Bien des princesses vinrent lui apporter un cadeau. Mais le sort s’acharnait contre lui. Pourtant, un jour, une jeune bergère nommée Giralda qui était amoureuse du prince ramassa un perce-neige. Elle l’enveloppa dans un papier blanc et au dos du papier, elle écrivit en rouge « martisor ». En fait, ce cadeau était un symbole de son amour et quand elle le donna au prince, il redevint aussitôt humain. Ils se marièrent donc et vécurent heureux ensemble. Et le prince décida que, chaque année le 1er mars, en souvenir, les garçons donneraient aux filles en gage de reconnaissance et d’amour un « martisor ».


« Martisor » dérive de « martie », mars. Cette fête est en rapport avec notre Saint-Valentin. En effet, les hommes offrent aux femmes des martisors, porte-bonheur en forme de broche ou de pendentif, comprenant notamment deux fils torsadés, rouge et blanc. On dit que les origines de Martisor remonteraient à plus de deux mille ans. D’innombrables légendes et traditions s’y rattachent.

Une autre légende raconte qu’il y a très très longtemps, c’était un 1er mars, un beau perce-neige, tout blanc, tout discret, sortit de dessous la neige dans la forêt. Le vent d’hiver l’aperçut, se mit en colère et déclencha une tempête de neige sur la pauvre fleur. Le délicat perce-neige, mordu par le froid, se mit à crier. La bonne fée Zina Primavara entendit la fleur sangloter et lui demanda : « Pourquoi pleures-tu ? ». « Je suis couvert de neige et je me meurs de froid » répondit le perce-neige. La fée Primavara débarrassa le perce-neige de la neige qui l’ensevelissait. Tandis qu’elle faisait cela, elle se blessa au doigt contre un petit caillou tranchant caché à côté du perce-neige. Son sang tomba sur la racine de la fleur, la réchauffant et le perce-neige revint à la vie. Une autre goutte de sang tomba sur les pétales qui devinrent rouges. Aussitôt un autre perce-neige blanc poussa à côté de lui. Et c’est ainsi que les deux inséparables clochettes, la rouge et la blanche, devinrent à la fois le symbole du printemps, de l’amour et de l’espoir, appelé « Martisor ».

Un autre récit de Martisor évoque un couple d’amoureux qui s’enfuit et qui est poursuivi. Les deux amants sont sauvés lorsqu’ils arrivent dans la forêt où fleurissent des perce-neige. La jeune fille en fait un bouquet qui sera taché de son sang car elle a été blessée dans sa fuite.

Les couleurs obligées de Martisor symboliseraient la lutte du printemps contre l’hiver, du bien contre le mal. Cependant ce passage hiver-printemps semblerait être précisément l’occasion d’un rite de passage. Si le perce-neige est symbole de pureté et de virginité, du moins dans la tradition chrétienne, le rouge et le sang de la jeune fille, ou de la fée, qui tachent la fleur virginale, peuvent faire une excellente contrepartie et rappeler les fêtes du printemps habituellement celles de la fécondité, comme l’étaient les Lupercales romaines qui, christianisées, ont donné la Saint-Valentin.

En Angleterre, on trouve les perce-neige autour de plusieurs anciens monastères comme Anglesey Abbey, Hodsock Priory ou Walsingham Abbey, ainsi que dans d’anciens cimetières On suppose que le perce-neige, Amaryllidaceae, non indigène en Angleterre, y aurait été introduit par des moines italiens vers le XVe siècle, peut-être pour les besoins du rituel de la Chandeleur. De plus des jardins de perce-neige sont aménagés dans les cimetières en souvenir des nouveau-nés décédés. Par ailleurs, on est tenté d’expliquer cette présence du perce-neige dans les cimetières par l’existence encore vivante d’une superstition à l’opposé du symbolisme habituel de la fleur : en effet, rentrer des perce-neige dans une maison porterait malheur tandis que la vue d’une fleur solitaire dans un jardin présagerait d’un désastre imminent.


Anglesey Abbey

Et puis, c’est dans la littérature que l’on donne une petite place au perce-neige.

Vous avez sans doute entendu parler des Précieuses car Molière les immortalisa dans une pièce de théâtre où ces Précieuses sont qualifiées de Ridicules. Il se trouve qu’elles avaient leurs origines à Rambouillet. La plus belle et la plus spirituelle s’appelait Julie d’Angennes et tenait avec sa mère, Madame de Rambouillet, née Catherine de Vivonne, un célèbre et brillant salon à Paris. C’est à l’instigation d’un soupirant de la belle Julie, le duc de Montausier qui la courtisait depuis 1631, qu’une vingtaine de poètes habitués de l’Hôtel de Rambouillet composèrent à partir de 1633 un recueil intitulé « La Guirlande de Julie », nom que porte d’ailleurs une petite sente dans un quartier de Rambouillet, près de la Mairie.

Sous le nom de différentes fleurs allégoriques, quatre-vingt-sept madrigaux célèbrent la beauté de la jeune fille. Ce recueil est d’ailleurs illustré par un grand peintre des fleurs, Nicolas Robert. Il fut offert à Julie en 1641, le jour de la Sainte Julie. Et comme toujours dans les contes de fées, le duc Charles de Montausier et la belle Julie d’Angennes se marièrent en 1645. Ils avaient pris le temps de la réflexion… comme il se devait pour une Précieuse…


Julie d’Angennes dans sa célèbre guirlande

Toutefois, parmi les madrigaux figuraient deux poèmes consacrés au perce-neige.

On hésite sur l’auteur du premier entre Isaac de Benserade (1613-1691) et Monsieur de Briote. Le madrigal s’intitule La Perceneige (notez qu’à l’époque la fleur était féminisée et était un mot simple) :

Sous un voile d’argent la Terre ensevelie

Me produit malgré sa fraîcheur

La Neige conserve ma vie,

Et le donnant son nom me donne sa blancheur :

Mais celle de ton Sein, nonpareille Julie,

Me fait perdre aujourd’hui le prix

que je ne cède pas au Lys.

Le second est d’un certain Henri-Louis Habert de Montmor (1603-1679). Il s’intitule également : la Perceneige.

Fille du bel Astre du jour, 

Je nays de sa seule lumiere,

Alors que sans chaleur, à son nouveau retour,

Des mois il ouvre la Carriere.

Je vis pure, et dans la froideur ;

Et mon teint, qui la Neige efface

Conserve son éclat dans l’extreme rigueur 

De l’hyver couronné de glace.

Fleurs peintes d’un riche dessein

Que le chaud du Soleil fait naistre,

Et qui, peu chastement, ouvrez votre beau sein

Au Père qui vous donna l’estre 

Vous qui sans pudeur aux Zéphirs

Souffrez découvrir vos richesses,

Et vous laissant toucher à leurs foibles soupirs,

Ployez sous leurs molles caresses ;

Osez-vous, peu modestes Fleurs,

Prétendre Couronner cette beauté sévère ?

Et ne craignez-vous point les cruelles froideurs

Dont elle sait punir une ame temeraire ?

N’ayez plus cette vanité,

Puis que seule je dois obtenir l’avantage

D’orner de son beau chef l’auguste majesté,

Lors que de tous les cœurs elle reçoit l’hommage,

Au Throsne de la pureté.


Plus près de nous, on doit à Robert Desnos (1900-1945), un joli poème mettant en scène le perce-neige :

Violette de la Chandeleur,

Perce, perce, perce-neige,

Annonces-tu la Chandeleur,

Le soleil et son cortège

De chansons, de fruits, de fleurs ?

Perce, perce, perce-neige

A la Chandeleur.

Mais revenons au perce-neige… et au pourquoi tant de légendes pour une si modeste fleur ?

Autrefois, l’hiver était une saison éprouvante pour nos ancêtres, beaucoup plus qu’on ne l’imagine aujourd’hui. Il symbolisait souvent désespoir et mort, au figuré mais également au propre… Il n’est que de voir aujourd’hui le nombre de SDF décédés en cet hiver 2009/2010, plus nombreux que les morts de la grippe, malheureuses victimes dans notre société d’opulence… et du manque de volonté de nos dirigeants qui ont quand même su trouver l’argent pour des vaccins sans grande et véritable utilité… Donc autrefois, comme maintenant, comme toujours, la fin de l’hiver était attendue avec impatience et fêtée. Il est possible que nos ancêtres aient utilisé un calendrier floral pour se repérer dans l’année et par sa date de floraison le perce-neige est le messager naturel du printemps. Il n’est donc pas surprenant de le trouver associé aux fêtes traditionnelles du printemps et aux légendes qui ponctuent les saisons. Et c’est ainsi que le perce-neige symbolise la victoire de la fée Printemps sur l’hiver mortifère comme l’exprime des légendes de la tradition roumaine, ainsi que l’espoir dans cette légende chrétienne qui met en scène nos premiers parents chassés du jardin d’Eden et consolés par un ange. Apparaît là le symbole de la pureté que célèbre la Chandeleur.

Cette fête chrétienne s’est superposée à des fêtes préexistantes, puis les a finalement remplacées. Les Romains fêtaient les Parentalia en l’honneur de Proserpine, de Pluton et des morts, ainsi que les Lupercales en l’honneur de Pan. Tandis que ces divinités seront satanisées par le Christianisme, les flambeaux romains seront remplacés par les cierges qui donneront leur nom à la fête chrétienne de la Chandeleur. Ailleurs, d’autres fêtes subiront la même substitution comme par exemple en Irlande où la déesse Brighde deviendra Sainte Brigitte et sa fête correspondra également à la Chandeleur. Cette fête correspond à la tradition juive de la Présentation de l’enfant Jésus au temple et la fête des Relevailles, c’est-à-dire la purification de l’accouchée, en l’occurrence Marie, au quarantième jour.


De ce fait le perce-neige est symbole de la pureté de Marie et est appelé la Fleur de la Purification parce qu’il est souvent en fleur le 2 février, fête de la Purification de Marie. En Italie, et dans d’autres pays d’Europe, la statue de Marie était enlevée de l’autel en ce jour et des perce-neige étaient répandus à son emplacement. Ce jour était également la Fête de la Présentation de Jésus au temple. Les fleurs furent appelées « Cloches de la Chandeleur » après que la cérémonie de bénédiction des chandelles ai débuté. Tardivement au VIIIe siècle, le 2 février devint connu comme « jour de la Chandeleur ».

Par contre, dans le langage des fleurs, les perce-neige parlent d’un espoir d’amour naissant. Ils sont aussi symbole de la fin prochaine d’une épreuve.

Il existe d’autres petites croyances liées au perce-neige comme celle qui veut que les boutons des perce-neige percent la neige comme des épées grâce à sa double feuille effilée.

On dit aussi que les fourmis multiplient les perce-neige dans la nature. En effet, lorsque les graines tombent sur la terre, elles s’en emparent pour les disséminer et les semer dans les environs. Les abeilles, elles-mêmes, apprécieraient particulièrement les fleurs très riches en nectar des perce-neige.

Et le rapport du perce-neige et de l’astrologie vous demandez-vous ?

Il est multiple… D’abord les tout premiers perce-neige apparaissent plus ou moins avec l’entrée du Soleil dans le signe du Verseau, aux environs du 20 janvier, et cela fait de lui la toute première fleur de l’année.


Le Verseau est un personnage ailé, un ange. Les pétales repliés du perce-neige ressemblent assez aux ailes de l’ange quand elles le sont tout autant et leur blancheur est respective.

Le Verseau est en rapport avec l’indifférencié, l’ambivalence aussi. Comme on vient de le loir, la fleur n’est ni vraiment féminine, ni franchement masculine et son pluriel même ne se distingue pas forcément de son singulier.

Comme le Verseau est tourné vers le futur et donc l’espérance, la fleur porte avec son apparition l’espoir du printemps en devenir.


L’un des mythes du Verseau est celui de Pandore dont la curiosité causa les malheurs de l’humanité. Ce mythe n’est pas sans rappeler la désobéissance d’Eve telle qu’elle est racontée par la Bible et qui fit le malheur à sa lignée.

Bien que timide le Verseau n’est pas sans nous surprendre par ses audaces et son indépendance farouche, un peu à l’image de cette fleur timide et effacée qui hardiment brave les intempéries pour nous annoncer l’espoir du retour du printemps et du réveil de la nature. Comme le Verseau qui pense toujours en termes d’avenir, le perce-neige nous ouvre la porte du renouveau de la vie.


SYLVIE TRIBUT ASTROLOGUE : www.sylvie-tribut-astrologue.fr